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17/09/2019 | FRANCE | N°18MA04250

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 17 septembre 2019, 18MA04250


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2017 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1800271 du 3 mai 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2018, M. D..., représenté par Me A..., dema

nde à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 3 mai 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2017 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1800271 du 3 mai 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2018, M. D..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 3 mai 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 30 octobre 2017 ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de réexaminer sa demande de titre de séjour dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'un vice de procédure tenant à l'absence de saisine du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa demande ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet de l'Hérault ne pouvant opposer l'absence du visa de long séjour exigé par l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour rejeter son admission au séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du même code ;

- elle méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;

- elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2019, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les observations de Me C..., substituant Me A..., représentant M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant arménien né le 28 avril 1956, fait appel du jugement du 3 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 octobre 2017 du préfet de l'Hérault portant refus d'admission au séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 2 du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, selon la décision contestée et les indications du préfet de l'Hérault dans ses écritures en défense, M. D... a présenté le 4 avril 2017 une demande de renouvellement de l'autorisation provisoire de séjour dont il bénéficie en qualité d'accompagnant de son épouse malade. Néanmoins, bien que le requérant ne produise aucun élément de nature à établir que cette demande aurait eu également pour objet d'obtenir un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort de l'arrêté du 30 octobre 2017 que le préfet de l'Hérault a également entendu refuser l'admission au séjour de M. D... sur ce fondement.

4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable au présent litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".

5. En l'espèce, M. D... avait déposé le 20 janvier 2016 une demande d'admission au séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 rejetée par une décision du 22 février 2016. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de la demande du 4 avril 2017, il n'avait pas produit de pièces relatives à une détérioration récente de son état de santé. Par suite, en l'absence d'éléments nouveaux, le préfet de l'Hérault a pu refuser d'admettre M. D... au séjour sur ce fondement sans recueillir l'avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

6. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment de la motivation de l'arrêté contesté, que le préfet de l'Hérault a procédé à un examen réel et complet de la demande de titre de séjour dont M. D... l'avait saisi. Par suite, le moyen tiré de l'absence d'un tel examen doit être écarté.

7. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment d'un certificat médical du 11 mai 2016, que M. D... souffre de pathologies diverses. Cependant, ces pièces n'établissent pas que le défaut de prise en charge médicale pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précédemment citées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

8. En cinquième lieu, le préfet de l'Hérault a indiqué, dans l'arrêté contesté, que M. D... n'est pas en mesure de présenter un passeport revêtu d'un visa de long séjour, en méconnaissance de l'article L. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne ressort cependant pas des pièces du dossier que, par cette mention, au demeurant matériellement exacte, le préfet ait entendu opposer l'absence d'un tel visa pour rejeter l'admission au séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du même code. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

9. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. L'épouse et le fils majeur, avec lesquels M. D... réside en France depuis 2009, sont également en situation irrégulière. Aucune intégration sociale ou professionnelle du requérant, qui est arrivé en France à l'âge de cinquante-trois ans, ne ressort des pièces du dossier. Par suite, la décision portant refus de titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.

11. En septième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ".

12. Il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des pièces médicales produites, que la présence en France de M. D... ou de son épouse réponde à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels. Par suite, c'est sans erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions que le préfet de l'Hérault a refusé d'admettre M. D... au séjour.

13. En dernier lieu, pour les motifs mentionnés aux points 10 et 12, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

14. En premier lieu et en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier qu'après avoir examiné la demande de titre de séjour dont M. D... l'avait saisi, le préfet de l'Hérault a examiné son droit au séjour sur le fondement d'autres dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a estimé qu'il ne justifiait d'aucun droit à se maintenir en France. Par suite, le moyen tiré de l'absence d'examen réel et sérieux de la situation personnelle de M. D... avant de prendre la mesure d'éloignement en litige doit être écarté.

15. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement du traitement approprié (...) ". Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté par les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 7.

16. En dernier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de M. D... et, en tout état de cause, de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux mentionnés aux points 10, 12 et 13 en réponse aux moyens semblables soulevés à fin d'annulation de la décision portant refus de titre de séjour.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

18. Le présent arrêt n'impliquant nécessairement aucune mesure d'exécution, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées à titre principal et à titre subsidiaire par M. D... doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit à verser au conseil de M. D... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. B..., président assesseur,

- M. Maury, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 septembre 2019.

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N° 18MA04250

jm


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA04250
Date de la décision : 17/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 26/09/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-09-17;18ma04250 ?
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