Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 9 mars 2016 par lequel le maire de la commune de Rochefort-du-Gard a opposé un sursis à statuer à sa demande de permis de construire sollicitée en vue de la réalisation d'une maison individuelle, ensemble la décision du 24 mai 2016 rejetant son recours gracieux.
Par jugement n° 1602280 du 7 novembre 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 décembre 2017, et par un mémoire complémentaire, enregistré le 8 janvier 2019, M. A..., représenté par la SCP d'avocats Tournier-Barnier, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 7 novembre 2017 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 mars 2016 du maire de la commune de Rochefort-du-Gard, ensemble la décision du 24 mai 2016 rejetant son recours gracieux ;
3)° de mettre à la charge de la commune de Rochefort-du-Gard la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision en litige est insuffisamment motivée ;
- aucun travaux sur les réseaux publics n'est nécessaire pour assurer la desserte du projet au sens de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme ;
- le terrain d'assiette du projet, situé en zone naturelle, n'a pas vocation à être "restitué" à la zone agricole ;
- les orientations d'aménagement définies dans ce secteur par le projet d'aménagement et de développement durable (PADD) du projet du plan local d'urbanisme (PLU) ne présentent pas un état d'avancement suffisant ;
- le projet n'est pas de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan en cours d'élaboration au sens de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme ;
- le tribunal administratif de Nîmes a déjà jugé que ce terrain d'assiette est un reliquat de zone NA et a annulé le certificat d'urbanisme négatif délivré par le maire pour ce projet ;
- il bénéficie de l'application des dispositions d'urbanisme en vigueur à la date de ces certificats d'urbanisme selon l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme ;
- la commune aurait dû faire application de l'article 2NA5 du règlement du plan d'occupation des sols qui permet de manière dérogatoire de construire sur ce terrain dont la superficie est inférieure à celle de 10 000 m² exigée par le règlement du plan ;
- la décision en litige est entachée de détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 avril 2018, la commune de Rochefort-du-Gard, représentée par la SCP d'avocats Margall-d'Albenas, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du requérant la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le motif tiré de la méconnaissance par le projet de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme est fondé ;
- en tout état de cause, la Cour procèdera à une neutralisation de ce motif ;
- la construction de la maison d'habitation projetée est de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan, dont l'état d'avancement était suffisant à la date de la décision en litige ;
- le moyen tiré de l'application de l'article 2NA5 du règlement du plan d'occupation des sols est inopérant ;
- la décision en litige n'est pas entachée de détournement de pouvoir.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de M. A... et de Me E..., représentant la commune de Rochefort-du- Gard.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a déposé, le 9 novembre 2015, auprès du maire de la commune de Rochefort-du-Gard une demande de permis de construire pour édifier, sur la parcelle cadastrée n° BM 20 située chemin du Mourillon, le Fus, sur le territoire de la commune, une maison individuelle en R+1 avec garage, d'une surface de plancher créée de 65 m². Par l'arrêté en litige du 9 mars 2016, le maire de cette commune a opposé un sursis à statuer à cette demande. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande du requérant tendant à l'annulation de cet arrêté, ensemble la décision du 24 mai 2016 rejetant son recours gracieux.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Pour décider d'opposer un sursis à statuer à la demande de permis de construire déposée par M. A..., le maire s'est fondé sur deux motifs tirés, d'une part, de ce que le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) du futur plan local d'urbanisme prévoit de restituer le secteur du terrain d'assiette du projet, situé au-delà de la limite de la "frange urbaine", à la zone agricole ou naturelle et que le projet d'une construction individuelle est ainsi de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan et, d'autre part, le projet méconnaît l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme dès lors que le terrain d'assiette du projet n'est pas desservi par les réseaux.
3. En premier lieu, le requérant se borne devant la Cour à réitérer le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision sans l'assortir d'aucun élément de fait ou de droit nouveau, qu'il y a donc lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 4 du jugement attaqué.
4. En deuxième lieu et, d'une part, aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. / Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. / Lorsque le projet est soumis à avis ou accord d'un service de l'État, les certificats d'urbanisme le mentionnent expressément. Il en est de même lorsqu'un sursis à statuer serait opposable à une déclaration préalable ou à une demande de permis. / Le certificat d'urbanisme est délivré dans les formes, conditions et délais déterminés par décret en Conseil d'État par l'autorité compétente mentionnée au a et au b de l'article L. 422-1 du présent code. ". Ces dispositions ont pour effet de garantir à la personne à laquelle a été délivré un certificat d'urbanisme, quel que soit son contenu, un droit à voir sa demande de permis de construire déposée durant les dix-huit mois qui suivent, examinée au regard des dispositions d'urbanisme applicables à la date de ce certificat, à la seule exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique.
5. D'autre part, aux termes du 3ème alinéa de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " A compter de la publication de la délibération prescrivant l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan. ". Une telle possibilité vise à permettre à l'autorité administrative de ne pas délivrer des autorisations pour des travaux, constructions ou installations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan local d'urbanisme. Il appartient à l'autorité compétente de prendre notamment en compte les orientations du projet d'aménagement et de développement durables dès lors qu'elles traduisent un état suffisamment avancé du futur plan local d'urbanisme pour apprécier si un projet serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuses l'exécution de ce plan. Lorsque le plan en cours d'élaboration et qui aurait justifié, à la date de délivrance du certificat d'urbanisme, que soit opposé un sursis à une demande de permis ou à une déclaration préalable, entre en vigueur dans le délai du certificat, les dispositions issues du nouveau plan sont applicables à la demande de permis de construire ou à la déclaration préalable.
6. Si le requérant soutient qu'il bénéficie, en application de cet article L. 410-1 du code de l'urbanisme, du droit de voir sa demande de permis de construire examinée au regard des dispositions d'urbanisme applicables à la date des certificats d'urbanisme qu'il détiendrait pour ce projet, c'est-à-dire au regard de l'ancien plan d'occupation des sols de la commune qui autoriserait selon lui le projet en litige, il ressort des pièces du dossier que, d'une part, M. A... n'a déposé sa demande de permis de construire que le 9 novembre 2015 et donc postérieurement à l'expiration du délai de dix-huit mois courant de la délivrance, le 21 juin 2013, du premier certificat d'urbanisme dont il se prévaut. Dans ces conditions, il ne peut utilement se prévaloir de la cristallisation des dispositions d'urbanisme applicables à la date de ce certificat. D'autre part, si M. A..., a, en revanche, déposé sa demande d'autorisation dans le délai de dix-huit mois courant à compter de la délivrance, le 30 juillet 2015, du second certificat d'urbanisme, il ressort des pièces du dossier, notamment des mentions figurant sur la décision de sursis à statuer qui lui a été opposée par la décision en litige du 9 mars 2016, qu'à la date de délivrance de ce certificat d'urbanisme, l'élaboration du projet du plan local d'urbanisme avait été prescrit par une délibération du conseil municipal du 3 décembre 2010 et que le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables avait été acté par une délibération du 28 novembre 2014. Ainsi, le projet de PLU avait atteint, à la date de délivrance du certificat d'urbanisme du 30 juillet 2015, un état d'avancement suffisant pour apprécier si un projet serait de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l'exécution de ce plan. Par suite, c'est à bon droit que le maire s'est fondé sur les règles d'urbanisme applicables à la date de la décision en litige et entrées en vigueur dans le délai de ce certificat. Dès lors, le requérant ne peut pas utilement soutenir que le maire aurait dû faire application de l'article 2NA5 du plan d'occupation des sols qui permet de manière dérogatoire de construire sur le terrain d'assiette du projet.
7. En troisième lieu, le PADD du PLU en cours d'élaboration de la commune précise que, dans un souci de limitation de consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain, le secteur 2NA du POS "Le Fus", d'une superficie de 10,5 hectares, dans lequel se situe le terrain d'assiette du projet, est éloigné du village et des équipements collectifs, que son accès est insuffisant, qu'il représente un espace boisé de transition entre l'urbanisation existante et la zone agricole et qu'il sera "restitué" à la zone naturelle ou à la zone agricole. La carte de synthèse des orientations retenues dans le PADD délimite notamment clairement la limite des "franges urbaines" au-delà desquelles se situe le secteur du Fus. Eu égard à la volonté des auteurs du PLU de délimiter précisément une zone d'urbanisation du territoire communal pour lutter contre le mitage, la circonstance que ces auteurs du PADD n'aient pas décidé si ce secteur serait classé en zone naturelle ou agricole, dans lesquelles les constructions nouvelles à usage d'habitation sont susceptibles d'être interdites quelque soit le choix finalement retenu entre ces deux zones, n'est pas de nature à remettre en cause l'état suffisamment avancé de ce plan. La construction projetée par M. A... d'une maison individuelle dans ce secteur est de nature à compromettre la mise en valeur ou la préservation des terres et, par conséquent, l'exécution du futur plan. En outre, la faculté ouverte à l'autorité compétente pour se prononcer sur la demande de l'autorisation d'urbanisme, de surseoir à statuer sur cette demande, est subordonnée à la seule condition alternative, que l'octroi de cette autorisation soit susceptible de compromettre ou de rendre plus onéreuse l'exécution du projet de PLU en cours d'élaboration. Par suite, le moyen tiré de ce que le classement du terrain d'assiette du projet en zone agricole, finalement d'ailleurs abandonné au profit du classement en zone naturelle par le PLU adopté le 23 mars 2017, serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation est sans incidence sur la légalité de la décision en litige de sursis à statuer opposé à la demande de permis de construire du requérant.
8. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que le maire aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur le motif tiré de ce que la construction projetée par M. A... est de nature à compromettre l'exécution du futur plan. Par suite, il n'y a pas lieu pour la Cour de se prononcer sur la légalité de l'autre motif fondant le refus en litige tiré de la méconnaissance de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme.
9. En cinquième lieu, la décision en litige est fondée sur l'intérêt général qui s'attache à la volonté de la commune de ne pas compromettre l'exécution du futur PLU. Par suite, le détournement de pouvoir allégué, tiré de ce que le maire s'acharnerait à refuser par tout moyen de délivrer à M. A... une autorisation pour construire sur la parcelle BM n° 20, n'est pas établi. Ce moyen doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 mars 2016 du maire de la commune de Rochefort-du-Gard, ensemble la décision du 24 mai 2016 rejetant son recours gracieux.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Rochefort-du-Gard, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. A... la somme de 1 000 euros à verser à la commune de Rochefort-du-Gard au titre des frais qu'elle a engagés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : M. A... versera à la commune de Rochefort-du-Gard une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et à la commune de Rochefort-du-Gard.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019, où siégeaient :
- Mme D..., présidente,
- Mme B..., première conseillère,
- Mme F..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 17 septembre 2019.
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N° 17MA05089