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11/07/2019 | FRANCE | N°19MA02006

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 11 juillet 2019, 19MA02006


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... F...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du préfet de l'Hérault du 22 septembre 2017 portant rejet de sa demande de regroupement familial au profit de son épouse.

Par un jugement n° 1705014 du 29 janvier 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 avril 2019, M. F..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribun

al administratif de Montpellier n°°1705014 du 29 janvier 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 22 sep...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... F...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du préfet de l'Hérault du 22 septembre 2017 portant rejet de sa demande de regroupement familial au profit de son épouse.

Par un jugement n° 1705014 du 29 janvier 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 avril 2019, M. F..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier n°°1705014 du 29 janvier 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 22 septembre 2017 par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de regroupement formée par M. F... au profit de son épouse ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui accorder le bénéfice du regroupement familial de son épouse, dans un délai d'un mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 2 000 euros à verser à Me E...A....

Il soutient que :

- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de l'incompétence de l'autorité signataire de la décision attaquée ;

- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de l'erreur de droit du préfet de l'Hérault qui s'est cru en situation de compétence liée pour lui refuser le bénéfice du regroupement familial de son épouse ;

- le préfet de l'Hérault s'est cru, à tort, en situation de compétence liée pour lui refuser le bénéfice du regroupement familial ;

- la décision en litige est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le préfet de l'Hérault n'a pas pris en considération la particularité de la situation du couple ;

- la décision en litige méconnait son droit à mener une vie privée et familiale normale tel que garanti par l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de l'Hérault qui n'a pas produit d'observations en défense.

M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Silvy, premier conseiller,

- et les observations de Me A..., représentant M. F....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... F..., ressortissant serbe né le 20 août 1949 et titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2027, a sollicité du préfet de l'Hérault le bénéfice du regroupement familial pour son épouse, Mme D...C..., le 13 février 2017. Par une décision du 22 septembre 2017, le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande. M. F... relève appel du jugement du 29 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Hérault du 22 septembre 2017.

Sur la régularité du jugement :

2. M. F... fait valoir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer sur le moyen tiré de l'incompétence de l'autorité signataire de la décision attaquée. Il ressort toutefois de la minute du jugement attaqué que les premiers juges ont visé ce moyen et ont expressément statué sur ses mérites au point 2 de leur décision. Le moyen doit, par suite, être écarté.

3. M. F... fait également valoir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer sur le moyen tiré de l'erreur du préfet sur l'étendue de sa compétence. Il ressort toutefois de la minute du jugement attaqué que les premiers juges ont visé ce moyen et ont expressément statué sur ses mérites au point 5 de leur décision. Le moyen doit, par suite, être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, M. F... persiste en appel à invoquer, sans apporter d'éléments de fait ou droit nouveaux, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision lui refusant le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse. Un tel moyen doit, par suite, être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, (...) ". Aux termes de l'article L. 411-5 de ce code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016, alors applicable : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'État prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée aux articles L. 821-1 ou L. 821-2 du code de la sécurité sociale ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code ou lorsqu'une personne âgée de plus de soixante-cinq ans et résidant régulièrement en France depuis au moins vingt-cinq ans demande le regroupement familial pour son conjoint et justifie d'une durée de mariage d'au moins dix ans ; (...) ". Aux termes de l'article R. 411-4 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2008-614 du 27 juin 2008 alors applicable : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : / - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes ; (...) ". Et aux termes de l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015, alors applicable : " Toute personne justifiant d'une résidence stable et régulière sur le territoire métropolitain ou dans une collectivité mentionnée à l'article L. 751-1 et ayant atteint un âge minimum bénéficie d'une allocation de solidarité aux personnes âgées dans les conditions prévues par le présent chapitre. Cet âge minimum est abaissé en cas d'inaptitude au travail ou lorsque l'assuré bénéficie des dispositions prévues à l'article 37 de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites. (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que les revenus de M. F... sont principalement constitués de l'allocation de solidarité aux personnes âgées versées par la caisse nationale d'assurance vieillesse pour un montant mensuel de 736,71 euros, lesquels ne peuvent être pris en considération pour l'appréciation de ses ressources dans le cadre de la procédure de regroupement familial par application des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code de la sécurité sociale. Il ressort également des pièces du dossier que l'allocation personnalisée au logement, servie à M. F... par la caisse d'allocations familiales, pour un montant de 266 euros qui présente le caractère d'une prestation familiale ne peut pas plus être prise en compte pour l'application de l'article L. 411-5 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En l'état de l'instruction, les ressources régulières de M. F... sont uniquement constituées de l'allocation servie par le régime de retraite complémentaire Arrco pour un montant mensuel de 47,14 euros et par le régime de la mutualité sociale agricole pour un montant mensuel d'environ 20 euros. Si M. F... fait également valoir la promesse d'embauche dont justifie son épouse, ce document ne permet pas de constater l'existence de ressources régulières à la date à laquelle l'autorité préfectorale s'est prononcée sur sa demande, non plus que l'attestation rédigée par sa petite-fille aux termes de laquelle celle-ci s'engage à prendre en charge les dépenses imprévues que pourrait être amené à supporter M. F.... Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Hérault n'a pas méconnu les dispositions sus-rappelées en lui refusant le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse au regard de la faiblesse de ses ressources propres. Si M. F... fait également valoir que l'intégralité de sa famille ainsi que le fils de son épouse résident habituellement et régulièrement en France, l'autorité préfectorale n'a pas, en s'abstenant d'user de son pouvoir d'accorder le regroupement familial alors même que les conditions fixées par l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas satisfaites, commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation des intéressés.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. F... n'a épousé Mme C... que le 19 novembre 2016, dans la municipalité de Zemun à Belgrade, en république serbe, et que leur vie commune n'est pas établie avant cette date. Au regard de la brièveté de cette union, M. F... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des termes de la décision attaquée qui apprécie les conséquences d'un refus de regroupement familial sur son droit au respect de sa vie privée et familiale, que le préfet de l'Hérault se serait cru, à tort, lié par le non-respect par le demandeur des conditions énumérées par l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit commise par le préfet doit être écarté.

10. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. L'ensemble de ses conclusions, en ce y compris ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doit, par suite, être rejeté.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... F..., à Me E... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2019, où siégeaient :

- M. Poujade, président,

- M. Portail, président assesseur,

- M. Silvy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2019.

2

N° 19MA02006


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 19MA02006
Date de la décision : 11/07/2019
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: M. Jean-Alexandre SILVY
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : BERRY

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-07-11;19ma02006 ?
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