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11/07/2019 | FRANCE | N°17MA04457-17MA04531

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2019, 17MA04457-17MA04531


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. FrédéricVOTTIERa demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Montpellier à lui verser la somme de 27 765 euros au titre des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'aggravation de son état de santé après une intervention chirurgicale réalisée le 29 juin 1992 dans cet établissement hospitalier.

La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Hérault a demandé la condamnation du CHRU de Montpellier à lui verse

r la somme de 170 661,97 euros à parfaire ainsi que les intérêts au taux légal à co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. FrédéricVOTTIERa demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Montpellier à lui verser la somme de 27 765 euros au titre des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'aggravation de son état de santé après une intervention chirurgicale réalisée le 29 juin 1992 dans cet établissement hospitalier.

La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Hérault a demandé la condamnation du CHRU de Montpellier à lui verser la somme de 170 661,97 euros à parfaire ainsi que les intérêts au taux légal à compter de la notification du jugement ainsi que la somme de 1 047 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par un jugement n° 1601345 du 26 septembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a condamné le CHRU de Montpellier à verser à M. VOTTIER la somme de 5 297 euros, sous réserve de la déduction de la somme ayant pu lui être versée à titre provisionnel en application de l'ordonnance du juge des référés du tribunal du 10 mai 2016, et à la CPAM de l'Hérault la somme de 163 252,17 euros au titre des débours et la somme de 1 047 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 16 novembre 2017 sous le numéro 17MA04457 et un mémoire enregistré le 7 mars 2019, M.VOTTIER, représenté par Me Bard, demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du 26 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a limité à la somme de 5 297 euros l'indemnité au versement de laquelle il a condamné le CHRU de Montpellier en réparation du préjudice qu'il a subi ;

2°) de porter à la somme de 27 765 euros le montant de cette indemnité ;

3°) de mettre à la charge du CHRU de Montpellier la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les dépens.

Il soutient que :

- la responsabilité du CHRU de Montpellier est engagée ;

- il a subi un préjudice fonctionnel temporaire, des souffrances évaluées à 3 ,5 sur une échelle de 7, un préjudice esthétique évalué à 0,5 sur une échelle de 7, un préjudice lié aux frais d'assistance par une tierce personne et un préjudice professionnel.

Par un mémoire enregistré le 8 décembre 2017, la CPAM de l'Hérault, représentée par la SCP Cauvin Leygue, demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du 26 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a limité à la somme de 163 252,17 euros l'indemnité au versement de laquelle il a condamné le CHRU de Montpellier au titre des débours ;

2°) de porter à la somme de 170 661,97 euros à parfaire le montant des débours, ainsi que les intérêts au taux légal et la capitalisation de ces intérêts à compter de ce mémoire et à la somme de 1 055 euros le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

3°) de mettre à la charge du CHRU de Montpellier la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que ses débours s'élèvent à la somme de 170 661,97 euros.

Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés le 6 mars 2018 et le 19 février 2019, le CHRU de Montpellier, représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête et la demande de la CPAM de l'Hérault ;

2°) par la voie de l'appel incident :

- de réformer le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 26 septembre 2017 en tant que ce jugement l'a condamné à verser à la CPAM de l'Hérault la somme de 163 252,17 euros au titre des débours ;

- de ramener le montant des débours à la somme de 22 511,42 euros.

Il soutient que :

- les préjudices de M. VOTTIERont été justement réparés ;

- le préjudice professionnel est sans lien avec l'aggravation de l'état de santé imputable à la faute médicale ;

- la CPAM n'est fondée à exercer un recours qu'au titre des indemnités journalières versées avant la date de consolidation intervenue le 12 septembre 2014 ;

- le recours subrogatoire de la CPAM concernant la pension d'invalidité doit être rejeté en l'absence de préjudice professionnel de M.VOTTIER et dès lors que le versement de la pension d'invalidité est imputable à la fracture du tibia droit et non aux conséquences des manquements et que l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 23 mars 2005 s'oppose au versement d'une somme à ce titre ;

- il appartient à la CPAM de justifier des dépenses de santé actuelles exposées.

II. Par une requête enregistrée le 24 novembre 2017 sous le numéro 17MA04531 et un mémoire enregistré le 20 février 2019, le CHRU de Montpellier, représenté par Me Gaud, demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 26 septembre 2017 en tant que ce jugement l'a condamné à verser à la CPAM de l'Hérault la somme de 163 252,17 euros au titre des débours ;

2°) de ramener le montant des débours à la somme de 22 511,42 euros.

Il soutient que :

- la CPAM n'est fondée à exercer un recours qu'au titre des indemnités journalières versées avant la date de consolidation ;

- le recours subrogatoire de la CPAM concernant la pension d'invalidité doit être rejeté en l'absence de préjudice professionnel de M. VOTTIERet dès lors que le versement de la pension d'invalidité est imputable à la fracture du tibia droit et non aux conséquences des manquements et que l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 23 mars 2005 s'oppose au versement d'une somme à ce titre ;

- il appartient à la CPAM de justifier des dépenses de santé actuelles exposées ;

- les préjudices de M. VOTTIERont été justement réparés ;

- le préjudice professionnel est sans lien avec l'aggravation de l'état de santé imputable à la faute médicale ;

La requête a été communiquée à M. VOTTIERet à la CPAM de l'Hérault qui n'ont pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'arrêté du 27 décembre 2018 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la Cour a désigné Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jorda-Lecroq,

- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,

- et les observations de Me Davidreprésentant le CHRU de Montpellier.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes visées ci-dessus n° 17MA04457 et n° 17MA04531 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. Le principe de la responsabilité du CHRU de Montpellier n'est pas discuté en appel. L'étendue du litige d'appel est relative à la détermination du montant de la réparation due par le CHRU de Montpellier, d'une part, à M. VOTTIERau titre des préjudices subis du fait des fautes commises par cet établissement en 1992 se trouvant entièrement à l'origine de l'aggravation, à compter de l'année 2012, en particulier sous la forme de problèmes de marche ayant nécessité un séjour en centre de rééducation fonctionnelle et de lésions cutanées nécrotiques du mollet droit, de l'état de santé de l'intéressé du fait de complications imputables à ces manquements, et, d'autre part, à la CPAM de l'Hérault au titre des débours et de l'indemnité forfaitaire de gestion.

3. Le rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier le 25 juin 2015 a exposé que la date de la consolidation de l'état de santé de M. VOTTIER était intervenue le 12 septembre 2014, tout en relevant que celui-ci n'avait repris son activité professionnelle que le 20 octobre 2014 et, en outre, que cette reprise s'est faite dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique qui a été prolongé jusqu'au 31 juillet 2015. Par ailleurs, ce rapport ne se prononce pas sur le taux de déficit fonctionnel permanent éventuellement imputable, non pas à la pathologie initiale de M.VOTTIER, mais aux fautes commises par l'établissement de soins et tenant compte de l'aggravation de l'état de santé survenue en 2012. Dans ces conditions, l'état du dossier ne permet à la cour ni de déterminer la date de consolidation de l'état de santé de M. VOTTIERni d'évaluer les préjudices, en particulier professionnels, subis par celui-ci à la suite de l'aggravation survenue en 2012, ainsi que les droits de la CPAM en lien avec les complications imputables aux fautes commises par le CHRU de Montpellier en 1992. Par suite, il y a lieu, avant de statuer sur les requêtes, d'ordonner une expertise sur ces points dans les conditions précisées dans le dispositif du présent arrêt.

D É C I D E :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les requêtes de M. VOTTIERet du CHRU de Montpellier, procédé à une expertise médicale contradictoire avec M.VOTTIER, le CHRU de Montpellier et la caisse primaire maladie de l'Hérault, avec mission pour l'expert de :

1°) se faire communiquer tous documents relatifs à l'état de santé de M. VOTTIERet, notamment, tous documents relatifs au suivi médical, aux actes de soins et aux diagnostics pratiqués sur lui en particulier depuis le dépôt du précédent rapport ; convoquer et entendre les parties et tous sachants ; procéder à l'examen sur pièces du dossier médical de M. VOTTIERainsi qu'éventuellement à son examen clinique ;

2°) décrire l'ensemble des préjudices subis par M. VOTTIERà la suite de l'aggravation de son état de santé survenue en 2012 pouvant être regardés comme directement et exclusivement imputables aux fautes du CHRU de Montpellier commises en 1992 à l'exclusion, d'une part, de ceux résultant de sa pathologie initiale, et, d'autre part, de ceux ayant une cause extérieure ;

3°) dire si l'état de santé de M. VOTTIERa entraîné à compter de l'année 2012, en particulier un déficit fonctionnel temporaire et en préciser les dates de début et de fin, ainsi que le ou les taux ;

4°) indiquer à quelle date l'état de santé de M. VOTTIERpeut être considéré comme consolidé ; préciser s'il subsiste une incapacité permanente partielle et, dans l'affirmative, en fixer le taux, en distinguant la part imputable aux conséquences des fautes commises par le CHRU de Montpellier en 1992 de celle ayant pour origine toute autre cause ou pathologie, eu égard notamment à l'état préexistant et aux antécédents médicaux de l'intéressé ;

5°) dire si l'état de santé de M. VOTTIERtel que résultant des fautes commises a entraîné des répercussions sur sa vie professionnelle et en préciser la nature et l'importance ;

6°) donner tous éléments utiles permettant d'évaluer les autres postes de préjudices tels que le besoin d'assistance par une tierce personne, les souffrances endurées, le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément ;

7°) de fournir toutes précisions complémentaires que l'expert jugera utile à la solution du litige et de nature à permettre d'apprécier l'étendue du préjudice.

Article 2 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il prêtera serment par écrit devant le greffier en chef de la Cour. L'expert déposera son rapport au greffe de la Cour en deux exemplaires et en notifiera copie aux parties dans le délai fixé par la présidente de la Cour dans sa décision le désignant.

Article 3 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.

Article 4 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. FrédéricVOTTIER, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault et au centre hospitalier universitaire de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2019, où siégeaient :

Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère,

- M. Merenne, premier conseiller

Lu en audience publique, le 11 juillet 2019.

La présidente-rapporteure,

signé

K. JORDA-LECROQL'assesseure,

signé

A. BOURJADE-MASCARENHAS

La greffière,

signé

C. MONTENERO

La République mande et ordonne au ministre de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 17MA04457 et 17MA04531


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA04457-17MA04531
Date de la décision : 11/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-03 Responsabilité de la puissance publique. Réparation. Évaluation du préjudice.


Composition du Tribunal
Président : Mme JORDA-LECROQ
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS CAUVIN - LEYGUE ; SCP D'AVOCATS CAUVIN - LEYGUE ; SCP GAUD MONTAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-07-11;17ma04457.17ma04531 ?
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