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10/07/2019 | FRANCE | N°18MA03587

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 10 juillet 2019, 18MA03587


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... G...A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 15 juin 2015 par laquelle le président de l'université d'Aix-Marseille a rejeté sa demande d'inscription dérogatoire en cinquième année de doctorat et d'enjoindre au président de l'université d'Aix-Marseille de réexaminer sa demande.

Par un jugement n° 1505121 du 30 mai 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée l

e 30 juillet 2018, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... G...A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 15 juin 2015 par laquelle le président de l'université d'Aix-Marseille a rejeté sa demande d'inscription dérogatoire en cinquième année de doctorat et d'enjoindre au président de l'université d'Aix-Marseille de réexaminer sa demande.

Par un jugement n° 1505121 du 30 mai 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 juillet 2018, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 23 avril 2015 rejetant sa demande d'inscription dérogatoire en cinquième année de doctorat ainsi que la décision du 15 juin 2015 rejetant son recours gracieux contre cette première décision ;

3°) d'enjoindre au président de l'université d'Aix-Marseille de procéder au réexamen de sa demande à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'université d'Aix-Marseille la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le président de l'université Aix-Marseille n'est pas lié par l'avis du directeur de l'école doctorale ;

- la décision contestée est entachée d'un vice de procédure, en ce que l'avis du conseil de l'école doctorale n'a pas été recueilli ;

- l'avis de son directeur de thèse est insuffisamment motivé ;

- le refus qui lui a été opposé constitue une rupture de l'égalité vis-à-vis des autres doctorants pour lesquels les dérogations sont plus facilement attribuées ;

- cette décision repose sur d'autres motifs que l'état d'avancement de sa thèse et est entachée de détournement de pouvoir ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 août 2018, le ministre de l'éducation nationale fait valoir qu'il appartient à l'université d'Aix-Marseille de défendre à l'instance.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 décembre 2018, l'université d'Aix-Marseille, représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le recours gracieux formé par M. A... le 15 avril 2015, antérieur à la décision de refus d'inscription dérogatoire en date du 23 avril 2015 et dirigé contre l'avis du directeur de thèse du requérant, simple mesure préparatoire, n'a pu proroger le délai de recours, de telle sorte que la demande présentée devant le tribunal administratif le 6 juillet 2015 était irrecevable ;

- la décision de rejet du recours gracieux du 15 juin 2015 notifiée le 24 juin 2015 est une décision confirmative de celle du 23 avril 2015, devenue définitive ;

- le président de l'université est en situation de compétence liée et n'a pas commis d'erreur de droit en s'estimant tenu de suivre l'avis du directeur de l'école doctorale ;

- les décisions de refus d'inscription dérogatoire en cinquième année de doctorat sont suffisamment motivées ;

- ces décisions sont fondées.

Par ordonnance du 13 décembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 28 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'arrêté du 7 août 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... Grimaud, rapporteur ;

- les conclusions de M. C... Thiele, rapporteur public ;

- et les observations de Me B... représentant M. A... et de Me F... pour l'université d'Aix-Marseille.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., fonctionnaire tunisien, a commencé en 2010 la rédaction d'une thèse de doctorat en sciences de gestion, management logistique et stratégie, au sein du CRET-LOG, centre de recherches rattaché à l'université d'Aix-Marseille. Après avoir obtenu une dérogation afin de s'inscrire en quatrième année de doctorat, M. A... a sollicité, au début de l'année universitaire 2014-2015, une nouvelle dérogation pour une inscription en cinquième année. Le 10 février 2015, le directeur de l'école doctorale de sciences économiques et gestion a émis un avis défavorable à cette demande. Le président de l'université d'Aix-Marseille a décidé de ne pas renouveler son inscription par une décision du 23 avril 2015 révélée par un simple formulaire interne à l'établissement qui n'a été porté à la connaissance du requérant que de manière informelle et dont il n'a eu connaissance qu'après l'introduction de l'instance devant les premiers juges. Le président de l'université d'Aix-Marseille a rejeté, par une décision du 15 juin 2015, le recours gracieux formé à l'encontre de cette décision par M. A..., qui doit être regardé comme contestant ces deux décisions.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de M. A... :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". Aux termes des dispositions de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

3. Ni la décision du 23 avril 2015 refusant le bénéfice d'une cinquième inscription à M. A... ni la décision du 15 juin 2015 rejetant son recours gracieux contre cette première décision, qui font toutes les deux grief à l'intéressé, ne lui ont pas été notifiées avec l'indication des voies et délais de recours. L'université d'Aix-Marseille n'est dès lors pas fondée à soutenir que la demande de M. A... serait tardive et, par suite, irrecevable.

4. En second lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a produit, devant le Tribunal, la décision du 15 juin 2015 rejetant son recours gracieux, seule décision explicite en sa possession dès lors que la décision du 23 avril 2015 ne reposait que sur un formulaire qui n'avait pas été porté à la connaissance du requérant et qui a été produit ultérieurement par l'établissement universitaire. Celui-ci n'est dès lors pas fondé à soutenir que la demande de M. A... était irrecevable.

En ce qui concerne la légalité des décisions attaquées :

6. Aux termes des dispositions de l'article 15 de l'arrêté du 7 août 2006 relatif à la formation doctorale : " La préparation du doctorat s'effectue, en règle générale, en 3 ans. Des dérogations peuvent être accordées, par le chef d'établissement, sur proposition du directeur de l'école doctorale et après avis du directeur de thèse et du conseil de l'école doctorale, sur demande motivée du candidat. La liste des bénéficiaires de dérogation est présentée chaque année au conseil scientifique ".

7. Si, ainsi que le soutient l'université d'Aix-Marseille, le chef d'établissement est tenu de suivre la proposition formulée par le directeur de l'école doctorale quant au bien-fondé de la demande d'inscription dérogatoire en quatrième ou cinquième année de doctorat, il n'en va ainsi que dans l'hypothèse où cette proposition est présentée aux termes d'une procédure conforme aux dispositions précitées. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le conseil de l'école doctorale n'a pas été consulté sur la demande de M. A..., de telle sorte que la proposition du directeur de l'école doctorale, intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière, n'a pu lier la compétence du président de l'université d'Aix-Marseille. Il en résulte que le moyen tiré du vice de procédure entachant cette décision est opérant. Par ailleurs, eu égard au rôle tenu par le conseil de l'école doctorale dans le suivi des priorités scientifiques de recherche et des conditions d'accueil et de soutenance des doctorants, la méconnaissance de cette formalité procédurale a privé M. A... d'une garantie. Ce dernier est dès lors fondé à demander l'annulation de la décision contestée et, par suite, l'annulation du jugement attaqué en ce qu'il a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ".

9. Eu égard au motif sur lequel elle repose, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique, au vu des motifs exposés au point 7, que le président de l'université d'Aix-Marseille réexamine la demande de M. A... dans un délai de deux mois à compter de sa notification. Il y a donc lieu de le lui enjoindre.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée par l'université d'Aix-Marseille sur leur fondement soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de l'université d'Aix-Marseille en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1505121 du tribunal administratif de Marseille du 30 mai 2018 et les décisions du président de l'université d'Aix-Marseille des 23 avril 2015 et 15 juin 2015 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au président de l'université d'Aix-Marseille de réexaminer la demande de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'université d'Aix-Marseille versera une somme de 2 000 euros à M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de l'université d'Aix-Marseille tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... G...A...et à l'université d'Aix-Marseille.

Délibéré après l'audience du 1er juillet 2019, où siégeaient :

- M. David Zupan, président,

- M. E... Grimaud, premier conseiller,

- M. Allan Gautron, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 juillet 2019.

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N° 18MA03587


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA03587
Date de la décision : 10/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Enseignement et recherche - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement - Enseignement supérieur et grandes écoles - Universités - Organisation des études universitaires.

Enseignement et recherche - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement - Enseignement supérieur et grandes écoles - Universités - Organisation des études universitaires - Diplômes.


Composition du Tribunal
Président : M. ZUPAN
Rapporteur ?: M. Philippe GRIMAUD
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : BEAUVILLARD

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-07-10;18ma03587 ?
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