Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Gamba a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon à lui verser la somme de 71 470,30 euros hors taxes en règlement des travaux du marché relatif à l'aménagement d'un hôtel dans l'ancien bâtiment " Cadoppi ", à Saint-Michel-l'Observatoire, ainsi que des indemnités de 185 842,31 euros hors taxes en réparation du préjudice matériel résultant du retard du chantier et de 10 000 euros en réparation du préjudice moral découlant des conditions d'exécution de ce chantier.
Par un jugement n° 1609907 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 21 février 2018 et 7 janvier 2019, la société Gamba, représentée par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) avant dire-droit, d'ordonner une expertise en vue de déterminer si les prix proposés par le maître d'oeuvre couvrent ou non la totalité des éléments entrant dans la prestation commandée et s'éloignent indûment ou non des bases ayant servi à la formation des prix du marché, d'établir le décompte des jours de retard et les causes de ce retard puis de dresser les comptes entre les parties ;
3°) de condamner la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon à lui verser la somme de 71 470,30 euros hors taxes en règlement des travaux du marché, une indemnité de 185 842,31 euros hors taxes en réparation du préjudice matériel résultant du retard du chantier et une indemnité de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral, majorées des intérêts moratoires au taux légal à compter du 15 septembre 2014 ;
4°) de mettre à la charge de la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa demande de première instance était recevable car le décompte général qui lui a été notifié est irrégulier en l'absence de projet de décompte final ;
- les travaux ayant atteint le montant du marché, elle était fondée à cesser leur exécution ;
- la décision de résiliation est infondée car elle n'a pas abandonné le chantier, auquel elle a affecté un nombre suffisant d'employés et qui n'a connu aucun retard ;
- elle est en droit d'obtenir la rémunération des travaux supplémentaires qu'elle a réalisés ;
- elle n'a pas été mise à même de suivre l'exécution du marché de substitution.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 novembre 2018, la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société Gamba en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par la société Gamba ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 28 mai 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 19 juin 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- l'arrêté du 8 septembre 2009 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D... Grimaud, rapporteur,
- les conclusions de M. A... Thiele, rapporteur public,
- et les observations de Me C... substituant Me E..., représentant la société Gamba.
Considérant ce qui suit :
1. Par un marché de travaux conclu à prix global et forfaitaire le 23 mai 2013, la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon a confié à la Société Gamba le lot n° 1 " gros oeuvre - maçonnerie " de l'opération d'aménagement d'un hôtel dans l'ancien bâtiment dit " Cadoppi " à Saint-Michel-l'Observatoire. Après une mise en demeure adressée à la société Gamba le 27 mai 2014, la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon a, par une décision du 29 septembre 2014, résilié le marché aux frais et risques de cette entreprise en application de l'article 46.3 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux. La société Gamba a réclamé auprès du maître de l'ouvrage, le 27 septembre 2016, le versement du solde du marché et l'indemnisation du préjudice matériel et du préjudice moral qu'elle estime découler des conditions d'exécution du marché. La communauté de communes lui a notifié en réponse, le 2 décembre 2016, le décompte de résiliation du marché, mentionnant un solde négatif de 46 516,85 euros hors taxes.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. En vertu des stipulations de l'article 13.3.2 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 8 septembre 2009, auquel se réfère le marché en cause : " Le titulaire transmet son projet de décompte final, simultanément au maître d'oeuvre et au représentant du pouvoir adjudicateur (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 13.3.3 du même cahier : " Le maître d'oeuvre accepte ou rectifie le projet de décompte final établi par le titulaire. Le projet accepté ou rectifié devient alors le décompte final. (...) ". En vertu des stipulations de l'article 13.3.4 de ce cahier : " En cas de retard dans la transmission du projet de décompte final et après mise en demeure restée sans effet, le maître d'oeuvre établit d'office le décompte final aux frais du titulaire. Ce décompte final est alors notifié au titulaire avec le décompte général tel que défini à l'article 13.4 ". L'article 13.4.1 de ce cahier stipule : " Le maître d'oeuvre établit le projet de décompte général, qui comprend : / -le décompte final ; /-l'état du solde, (...) ; / -la récapitulation des acomptes mensuels et du solde. / Le montant du projet de décompte général est égal au résultat de cette dernière récapitulation (...) ". En vertu de l'article 13.4.2 de ce cahier, " Le projet de décompte général est signé par le représentant du pouvoir adjudicateur et devient alors le décompte général. (...) ". L'article 45 de ce cahier stipule quant à lui : " (...) La décision de résiliation du marché est notifiée au titulaire. Sous réserve des dispositions particulières mentionnées à l'article 47, la résiliation prend effet à la date fixée dans la décision de résiliation ou, à défaut, à la date de sa notification. / Le règlement du marché est effectué alors selon les modalités prévues aux articles 13.3 et 13.4, sous réserve des stipulations de l'article 47. (...) ". L'article 47.1.1 du cahier des clauses administratives générales stipule : " En cas de résiliation, il est procédé (...) aux constatations relatives aux ouvrages et parties d'ouvrages exécutés (...). Il est dressé procès-verbal de ces opérations dans les conditions prévues à l'article 12. (...) / Ce procès-verbal est signé par le maître de l'ouvrage. Il emporte réception des ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, avec effet de la date d'effet de la résiliation, tant pour le point de départ du délai de garantie défini à l'article 44 que pour le point de départ du délai prévu pour le règlement final du marché à l'article 13.3.2 ". Selon l'article 47.2.1 de ce cahier : " 47.2.1. En cas de résiliation du marché, une liquidation des comptes est effectuée. Le décompte de liquidation du marché, qui se substitue au décompte général prévu à l'article 13.4.2, est arrêté par décision du représentant du pouvoir adjudicateur et notifié au titulaire ". Enfin, l'article 47.2.2 de ce cahier stipule : " Le décompte de liquidation comprend : / (...) b) Au crédit du titulaire : - la valeur contractuelle des travaux exécutés (...) ". En vertu de l'article 50.1.1 de ce document : " (...) Si la réclamation porte sur le décompte général du marché, ce mémoire est transmis dans le délai de trente jours à compter de la notification du décompte général. (...) ". L'article 50.3.2 de ce cahier prévoit enfin : " Pour les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, le titulaire dispose d'un délai de six mois, à compter de la notification de la décision prise par le représentant du pouvoir adjudicateur en application de l'article 50.1.2, ou de la décision implicite de rejet conformément à l'article 50.1.3, pour porter ses réclamations devant le tribunal administratif compétent ".
3. Il résulte des stipulations de l'article 45 du cahier des clauses administratives générales que la procédure d'établissement du décompte général d'un marché résilié est régie par les règles posées, pour l'ensemble des marchés de travaux, par les stipulations des articles 13.3 et 13.4 de ce cahier, à l'exception des règles spécifiques fixées par les stipulations de son article 47. Celles-ci, qui n'excluent pas l'établissement, par l'entreprise, d'un projet de décompte final, renvoient au contraire explicitement à l'article 13.3.2 du même cahier des clauses administratives générales, lesquelles imposent à l'entreprise de dresser ce projet de décompte et de l'adresser au maître d'oeuvre et au représentant du pouvoir adjudicateur, afin notamment qu'elle puisse faire valoir le montant des travaux qu'elle estime avoir exécutés et qu'elle présente, le cas échéant, ses réclamations.
4. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la société Gamba n'a pas établi son projet de décompte final et n'a pas davantage été mise en demeure de le faire par le maître d'oeuvre, ainsi que l'imposent les stipulations de l'article 13.3.4 du cahier des clauses administratives générales. Par ailleurs, eu égard au caractère conflictuel des relations entre les parties et à l'absence de réclamation présentée au maître de l'ouvrage par la société Gamba à l'encontre du décompte général qui lui a été notifié le 2 décembre 2016, cette société ne peut être regardée comme ayant renoncé, d'un commun accord avec le maître d'ouvrage, à l'application des stipulations de l'article 13.4.1 du cahier des clauses administratives générales. La société Gamba est par suite fondée à soutenir que ce décompte général dressé d'office par le maître de l'ouvrage était irrégulier et n'était dès lors pas de nature à faire courir les délais de réclamation prévus par les articles 50.1.1 et 50.3.2 du cahier des clauses administratives générales. Sa demande était dès lors, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, recevable.
Sur les conclusions à fin de condamnation :
En ce qui concerne le bien-fondé de la décision de résiliation du 30 septembre 2014 :
5. Aux termes des stipulations de l'article 46.3.1 du cahier des clauses administratives générales : " Le représentant du pouvoir adjudicateur peut résilier le marché pour faute du titulaire dans les cas suivants : / (...) c) Le titulaire, dans les conditions prévues à l'article 48, ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels, après que le manquement a fait l'objet d'une constatation contradictoire et d'un avis du maître d'oeuvre, et si le titulaire n'a pas été autorisé par ordre de service à reprendre l'exécution des travaux ; dans ce cas, la résiliation du marché décidée peut être soit simple, soit aux frais et risques du titulaire et, dans ce dernier cas, les dispositions des articles 48. 4 à 48. 7 s'appliquent ; / (...) l) Postérieurement à la signature du marché, les renseignements ou documents produits par le titulaire, à l'appui de sa candidature ou exigés préalablement à l'attribution du marché, s'avèrent inexacts. (...) ".
6. Il résulte en l'espèce des termes de la décision de résiliation que celle-ci est fondée sur le retard de l'entreprise dans l'accomplissement de ses missions, le caractère inexact des documents de son offre en ce qui concerne les effectifs affectés au chantier, l'inobservation des ordres de service émis par le maître d'oeuvre et l'abandon du chantier.
7. En premier lieu, en vertu des stipulations de l'article 19.1.1 du cahier des clauses administratives générales : " Le délai d'exécution du marché comprend la période de préparation définie à l'article 28.1 et le délai d'exécution des travaux défini ci-dessous. / (...) Le délai d'exécution des travaux est celui imparti pour la réalisation des travaux incombant au titulaire (...) ". L'article 19.1.2 de ce cahier stipule : " Les dispositions de l'article 19.1.1 s'appliquent aux délais, distincts du délai d'exécution de l'ensemble des travaux, qui peuvent être fixés par le marché pour l'exécution de certaines tranches de travaux, ou de certains ouvrages, parties d'ouvrages ou ensembles de prestations ". Selon l'article 4.1 du cahier des clauses administratives particulières : " Le délai d'exécution de l'ensemble des lots est stipulé à l'article B5 de l'acte d'engagement. / (...) Le délai d'exécution de chaque lot s'insère dans ce délai d'ensemble. (...) / Le calendrier détaillé d'exécution est élaboré par le maître d'oeuvre après consultation auprès des titulaires des différents lots. / Le calendrier détaillé d'exécution distingue les différents ouvrages dont la construction fait l'objet des travaux. Il indique en outre pour chacun des lots : / la durée et la date probable de départ du délai d'exécution qui lui est propre ; / la durée et la date probable de départ des délais particuliers correspondant aux interventions successives du titulaire sur le chantier. (...) / Le délai d'exécution propre à chacun des lots commence à la date d'effet de l'ordre de service prescrivant au titulaire concerné de commencer l'exécution des travaux lui incombant (...) ".
8. Il résulte de l'instruction que le délai d'exécution des travaux du lot confié à la société Gamba était fixé à un an et que ce délai a commencé à courir, en vertu de l'ordre de service n° 4, à compter du 25 novembre 2013, après que le maître de l'ouvrage a reporté le début du chantier afin d'effectuer des travaux de désamiantage. Ainsi, ce délai global d'exécution n'était pas parvenu à son terme lorsque le marché a été résilié, le 29 septembre 2014, et le maître de l'ouvrage ne pouvait alors reprocher à la société Gamba un retard au regard du délai global d'exécution des travaux de son lot. Par ailleurs, il ne résulte pas des stipulations de l'article 4.1 du cahier des clauses administratives particulières, lesquelles se bornent à évoquer des dates " probables " de départ des délais d'exécution de tâches particulières et dont rien n'indique qu'elles auraient ensuite fait l'objet d'un ordre de service leur conférant un caractère impératif, que le maître de l'ouvrage ait imposé des délais partiels à la société Gamba. La communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon ne pouvait ainsi valablement lui reprocher un retard par rapport à un tel délai partiel. La société Gamba est dès lors fondée à soutenir que ce motif de résiliation manque en fait.
9. En deuxième lieu, si la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon n'établit pas que la société Gamba aurait méconnu les engagements qu'elle avait pris dans son offre en ce qui concerne le nombre d'ouvriers affectés sur le chantier durant les premières phases du chantier, il résulte en revanche de l'instruction, et notamment des procès-verbaux des réunions de chantier que, à compter de la fin du mois d'avril 2014, cette société n'a, la plupart du temps, affecté que trois ouvriers sur le chantier, de telle sorte qu'elle a, dans l'exécution du chantier, méconnu son engagement de mobiliser six personnes pour les travaux de maçonnerie. Dans cette mesure, et contrairement à ce que soutient la société Gamba, la décision de résiliation est partiellement fondée sur des faits établis.
10. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 15.4 du cahier des clauses administratives générales : " Le titulaire est tenu d'aviser le maître d'oeuvre, un mois au moins à l'avance, de la date probable à laquelle le montant des travaux atteindra leur montant contractuel ". En vertu de l'article 15.4.1 du cahier des clauses administratives générales, " Si le titulaire n'avise pas le maître d'oeuvre dans le délai fixé à l'alinéa précédent, il est tenu d'arrêter les travaux à la date où le montant exécuté atteint le montant contractuel. Les travaux qui sont exécutés au-delà du montant contractuel ne sont pas payés ".
11. Il résulte de l'instruction, et notamment des corrections effectuées par le maître d'oeuvre sur la situation n° 8 de la société Gamba, émise le 29 juillet 2014 et qui n'a été suivie d'aucune avancée significative du chantier, que le montant des travaux réalisés par cette entreprise au titre du marché pouvait alors être évalué à la somme de 126 000 euros environ, montant qu'elle ne conteste pas sérieusement et qui est confirmé par l'état des travaux réalisés et non réalisés, établi contradictoirement par les parties le 22 septembre 2014. Dès lors, à supposer même que le prix des travaux supplémentaires induits par les sujétions rencontrées puisse être valablement arrêté à la somme de 82 652 euros que réclamait la société Gamba, le montant total des travaux exécutés s'élevait au plus à la somme de 209 000 euros hors taxes et était même en tout état de cause plus réduit, dès lors que les travaux supplémentaires n'avaient pas tous été réalisés. Il en résulte que, à la date du 5 septembre 2014, le montant contractuel des travaux prévus par le marché, qui s'élevait à 216 961,59 euros hors taxes, n'avait pas été atteint et que la société Gamba ne pouvait se prétendre en droit d'arrêter l'exécution du chantier à cette date.
12. Il résulte par ailleurs de l'instruction que la société Gamba a, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, affecté au chantier un nombre insuffisant d'ouvriers par rapport à l'effectif qu'elle s'était engagée à mobiliser afin de se conformer au délai d'exécution qui s'imposait à elle et que ses préposés ne se sont présentés que deux jours au cours du mois de juillet 2014, pour ne plus ensuite y apparaître que de manière épisodique, alors que les travaux n'étaient pas achevés ni même en voie de l'être. Dès lors, le maître de l'ouvrage était fondé à estimer, en prenant en compte l'ensemble du comportement de la société Gamba et notamment sa volonté affirmée de cesser les travaux à compter du 5 septembre 2014, qu'elle avait abandonné le chantier.
13. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que la société Gamba a tardé à de nombreuses reprises à exécuter les ordres de service émis par le maître d'oeuvre qui lui enjoignaient de fournir des plans ou d'achever certaines tâches nécessaires au bon avancement du chantier, notamment en ce qui concerne les ordres de service nos 6, 7, 10, 11, 12 et 13.
14. Il résulte de tout ce qui précède que si certains des motifs de la mesure de résiliation pour faute adoptée à l'encontre de l'entreprise sont infondés ou seulement partiellement fondés, le maître de l'ouvrage a pu valablement, eu égard à la répétition des fautes et insuffisances de l'entreprise ainsi qu'à l'abandon de chantier constaté à compter du mois de juillet 2014 et caractérisé à compter du 5 septembre 2014, résilier le marché aux frais et risques de la société Gamba.
En ce qui concerne les comptes du marché :
15. En premier lieu, si la société Gamba soutient que le montant de travaux qu'elle avait exécutés au titre du marché litigieux à la date du 29 septembre 2014 s'élevait à la somme de 137 431,05 euros hors taxes, il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que le montant des travaux exécutés à la date de la résiliation était, ainsi qu'il vient d'être dit au point 11, de l'ordre de 126 000 euros. La réclamation de la société n'étant appuyée que d'un état d'avancement des travaux réalisés par ses soins qui n'est pas de nature à établir l'inexactitude, notamment, de l'état des travaux réalisés et non réalisés établi contradictoirement par les parties le 22 septembre 2014, elle n'est fondée à demander que l'inscription d'un montant de 126 000 euros au crédit du décompte.
16. Il résulte en deuxième lieu de l'instruction que, l'entreprise Gamba ayant été confrontée à des sujétions techniques imprévues découlant de la nature du sol et de la présence de venues d'eau souterraine, elle s'est trouvée dans l'obligation de réaliser des travaux supplémentaires dont le maître de l'ouvrage ne conteste pas le caractère indispensable à l'achèvement de l'ouvrage dans les règles de l'art, au demeurant admis par le maître de l'oeuvre. Si, au cours de l'exécution du marché, l'entreprise et le maître d'oeuvre ne sont pas parvenus à s'accorder sur le prix de ces travaux, le maître de l'ouvrage en a toutefois estimé le coût à la somme de 70 238,49 euros hors taxes dans le décompte de liquidation. Par ailleurs, alors que la société Gamba réclame dans le cadre de l'instance une somme de 82 652,26 euros pour ces mêmes travaux, ni ce montant en lui-même, ni la différence de 12 414,07 euros avec l'évaluation acceptée par le maître d'oeuvre ne sont efficacement contestés par la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon. Au demeurant, il résulte de l'instruction que cette somme constitue un prix adéquat pour ces travaux supplémentaires. Elle doit donc être portée au décompte au bénéfice de la société Gamba.
17. En troisième lieu, si la société Gamba soutient que le décalage du chantier pendant cinq mois à la suite de la découverte d'amiante lui a causé un préjudice tenant à l'immobilisation improductive de ses salariés et de l'installation de chantier, il résulte de l'instruction que ce report a été décidé dès la notification du marché et avant toute installation ou début d'exécution, de telle sorte que la société a été mise en mesure de prendre des mesures de réaffectation de son personnel et de son matériel et que le préjudice qu'elle allègue, qui n'est au demeurant étayé que par un tableau dépourvu de toute précision et non accompagné de pièces justificatives probantes, ne peut être regardé comme établi.
18. En quatrième lieu, si la société Gamba invoque un préjudice constitué de la perte de de marge sur les travaux qu'elle n'a pas réalisés, celui-ci, qui résulte au demeurant de la résiliation et non du report du chantier comme elle le soutient, ne saurait être indemnisé dès lors que, comme il a été dit ci-dessus, la décision de résiliation était fondée sur des faits fautifs de nature à la justifier.
19. En cinquième lieu, la société requérante n'établit ni l'existence ni la consistance du préjudice moral dont elle réclame la réparation. Il n'y a pas lieu, dès lors, d'inscrire au décompte la somme de 10 000 euros qu'elle réclame sur ce point.
20. En sixième lieu, il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté par la société Gamba que ses représentants ont été absents à quatre réunions de chantier. Il y a lieu dès lors d'inscrire en déduction de sa créance, ainsi que le demande le maître d'ouvrage, une somme de 800 euros à titre de pénalité, en application du dernier alinéa de l'article 4.3 du cahier des clauses administratives particulières.
21. En septième lieu, aux termes des stipulations de l'article 48.4 du cahier des clauses administratives générales : " En cas de résiliation aux frais et risques du titulaire, les mesures prises en application de l'article 48.3 sont à la charge de celui-ci. Pour l'achèvement des travaux conformément à la réglementation en vigueur, il est passé un marché avec un autre entrepreneur. Ce marché de substitution est transmis pour information au titulaire défaillant. (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 48.5 de ce cahier : " Le titulaire, dont les travaux font l'objet des stipulations des articles 48.2 et 48.3, est autorisé à en suivre l'exécution sans pouvoir entraver les ordres du maître d'oeuvre et de ses représentants. / Il en est de même en cas de nouveau marché passé à ses frais et risques ". Enfin, en vertu des stipulations de l'article 48.6 du même cahier : " Les excédents de dépenses qui résultent du nouveau marché, passé après la décision de résiliation prévue aux articles 48.2 ou 48.3, sont à la charge du titulaire. Ils sont prélevés sur les sommes qui peuvent lui être dues ou, à défaut, sur ses sûretés éventuelles, sans préjudice des droits à exercer contre lui en cas d'insuffisance. / Dans le cas d'une diminution des dépenses, le titulaire ne peut en bénéficier, même partiellement ".
22. La société Gamba soutient sans être contredite qu'elle n'a pas été mise à même de suivre l'exécution du marché de substitution et, de fait, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle l'ait été. Elle est dès lors fondée à soutenir qu'aucune somme ne peut être mise à sa charge à ce titre.
23. En huitième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 8 qu'à la date de la résiliation, le délai contractuel d'exécution des travaux d'un an n'était pas expiré. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction, comme il a été dit, que des délais partiels aient été institués par le marché dans les conditions prévues à l'article 19.1.2 du cahier des clauses administratives générales. Dès lors, le maître de l'ouvrage, qui n'apporte d'ailleurs, pas plus devant la Cour qu'en première instance ou au cours de l'exécution du contrat, de précision sur le décompte des cent soixante-neuf jours de pénalités de retard qu'il entend infliger à la société Gamba, n'est pas fondé à demander l'inscription au décompte de la somme de 50 700 euros revendiquée au titre des pénalités de retard.
24. En neuvième lieu, la société Gamba conteste le bien-fondé de la déduction des montants de 8 850 euros hors taxes et 4 300 euros hors taxes que le maître de l'ouvrage entend opérer au titre des paiements directs effectués à la société Fora, sous-traitante, et de sommes à verser au titre d'une " plus-value " à la société Borg. Faute de précision sur ces montants et de pièce susceptible d'en établir le bien-fondé et l'imputabilité à la société requérante, celle-ci est fondée à demander qu'elles ne soient pas mises à sa charge.
25. En dernier lieu, il résulte des certificats de paiement nos 1 à 8 que le total des sommes réglées à la société Gamba au cours de l'exécution du marché s'élève à 148 531,04 euros hors taxes. Compte tenu des créances respectives ci-dessus énumérées aux points 15 à 24, il y a lieu de fixer le solde du marché à la somme de 59 321,22 euros hors taxes en faveur de la société Gamba et de condamner la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon à lui verser cette somme.
26. La société Gamba est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande et que leur jugement doit en conséquence être annulé.
Sur les intérêts :
27. En vertu de l'article 1153 du code civil, la société Gamba a droit aux intérêts au taux légal sur la somme mentionnée au point 25 ci-dessus à compter du 27 septembre 2016, date à laquelle la communauté de communes a reçu sa réclamation emportant demande de paiement des sommes ici en litige.
Sur les frais liés au litige :
28. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée par la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon sur leur fondement soit mise à la charge de la société Gamba, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu au contraire de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon, à verser à la société Gamba sur le fondement de ces mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1609907 du tribunal administratif de Marseille du 6 février 2018 est annulé.
Article 2 : La communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon est condamnée à verser la somme de 59 321,22 euros hors taxes à la société Gamba au titre du solde du marché. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 27 septembre 2016.
Article 3 : La communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon versera une somme de 2 000 euros à la société Gamba en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes de Haute-Provence et du pays de Banon et à la société Gamba.
Délibéré après l'audience du 1er juillet 2019, où siégeaient :
- M. David Zupan, président,
- M. D... Grimaud, premier conseiller,
- M. Allan Gautron, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 juillet 2019.
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N° 18MA00824