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17/06/2019 | FRANCE | N°19MA00866-19MA00868

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 17 juin 2019, 19MA00866-19MA00868


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 février 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'expiration de ce délai et, d'autre part, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre

de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à in...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 février 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'expiration de ce délai et, d'autre part, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois sous astreinte de 50 euros par jour de retard, sur le fondement des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1807912 du 7 février 2019, le tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté du 20 février 2018 et enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer la situation de Mme D... dans un délai de trois mois à compter de la notification de ce jugement.

Procédure devant la Cour :

I. - Par une requête enregistrée le 22 février 2019 sous le n° 19MA00866, le préfet des Bouches-du-Rhône demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme D... devant le Tribunal.

Il soutient que le médicament dont Mme D... a besoin est disponible en Algérie et qu'elle peut bénéficier d'une prise en charge du système de sécurité sociale algérien, de telle sorte qu'il n'a pas fait une inexacte application du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 mai 2019, Mme D... représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que les moyens soulevés par le préfet des Bouches-du-Rhône ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 3 mai 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 mai 2019.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 avril 2019.

II. - Par une requête enregistrée le 22 février 2019 sous le n° 19MA00868, le préfet des Bouches-du-Rhône demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1807912 du 7 février 2019.

Il soutient que ses moyens d'appel, visés ci-dessus, sont sérieux.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 mai 2019, Mme D... représentée par Me E... conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que les moyens soulevés par le préfet des Bouches-du-Rhône ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 3 mai 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 mai 2019.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 avril 2019.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... Grimaud, rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Entrée pour la première fois en France en mai 2016, Mme D..., ressortissante algérienne née le 19 septembre 1963, a obtenu le 7 décembre 2016 un certificat de résidence d'une durée d'un an pour raisons de santé, sur le fondement des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Elle a demandé le renouvellement de ce titre le 31 octobre 2017. Par un arrêté du 20 février 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté cette demande et prescrit l'éloignement de l'intéressée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Selon l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme D..., qui souffre d'une spondylarthrite ankylosante depuis plusieurs années, a obtenu à partir du mois de mai 2016 plusieurs autorisations provisoires de séjour afin de recevoir un traitement adapté en France, puis s'est vu délivrer à cette fin, le 7 décembre 2016, un certificat de résidence d'une durée d'un an, après que le médecin inspecteur de santé publique de l'agence régionale de santé a considéré que ce traitement n'était pas disponible en Algérie. Si l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 23 janvier 2018 a estimé que les médicaments nécessaires à Mme D... étaient désormais effectivement accessibles dans ce pays, il ressort des pièces produites par celle-ci, et notamment d'un certificat rédigé par le DrB..., rhumatologue y exerçant, que le Métoject, dont il ressort des pièces du dossier qu'il est prescrit à la requérante sous forme d'injection de 15 mg, n'est pas disponible en pharmacie en Algérie et ne l'est que de manière discontinue et aléatoire dans les hôpitaux publics, au surplus uniquement sous forme d'injection dosée à 20 mg. Si le préfet des Bouches-du-Rhône produit devant la Cour un article du 14 juin 2010 indiquant que le méthotrexate, molécule entrant dans la composition du médicament Métoject, " sera disponible en Algérie le mois prochain ", cette pièce n'est pas de nature à établir la disponibilité effective de cette molécule ni du médicament nécessaire à Mme D... au cours des années suivantes, ce d'autant que le médecin de l'agence régionale de santé avait considéré en 2016, donc six ans plus tard, que ce traitement n'existait toujours pas en Algérie. Dès lors, les premiers juges ont à bon droit estimé que l'arrêté en litige procédait d'une inexacte application des stipulations précitées.

4. Il résulte de ce qui précède que le préfet des Bouches-du-Rhône, qui ne conteste d'ailleurs pas le second motif d'annulation retenu par les premiers juges, tenant au constat d'un vice de procédure, n'est en tout état de cause pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a annulé l'arrêté du 20 février 2018 refusant à Mme D... le renouvellement de son certificat de résidence et l'obligeant à quitter le territoire français.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

5. Le présent arrêt statue sur les conclusions à fin d'annulation du jugement attaqué. Dès lors, les conclusions du préfet des Bouches-du-Rhône tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet. Il n'y a donc pas lieu d'y statuer.

Sur les frais liés au litige :

6. Mme D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me E... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cet avocat de la somme de 1 500 euros.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution de la requête n° 19MA00868.

Article 2 : Le surplus des conclusions du préfet des Bouches-du-Rhône est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à Me E... en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D..., à Me E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 3 juin 2019, où siégeaient :

- M. David Zupan, président,

- M. C... Grimaud, premier conseiller,

- M. Allan Gautron, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 juin 2019.

5

Nos 19MA00866-19MA00868


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 19MA00866-19MA00868
Date de la décision : 17/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. ZUPAN
Rapporteur ?: M. Philippe GRIMAUD
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : VINCENSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-06-17;19ma00866.19ma00868 ?
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