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13/06/2019 | FRANCE | N°18MA03069

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 13 juin 2019, 18MA03069


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M.A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les arrêtés du 24 mai 2018 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 1804266 du 5 juin 2018, le magistrat désigné par le prési

dent du tribunal administratif de Marseille a annulé le refus d'octroyer un délai de dépar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M.A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les arrêtés du 24 mai 2018 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 1804266 du 5 juin 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a annulé le refus d'octroyer un délai de départ volontaire et l'interdiction de retour sur le territoire français et a rejeté le surplus de la demande de M.C....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juin 2018, M. C..., représenté par Me Haddad, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 4 du jugement du 5 juin 2018 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler les arrêtés du 24 mai 2018 du préfet du Var en tant qu'ils lui refusent la délivrance d'un titre de séjour, qu'ils l'obligent à quitter le territoire français et qu'ils fixent le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône sous astreinte de 150 euros par jour de retard de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué ne s'est pas prononcé sur la légalité de la décision de refus de séjour ;

- les arrêtés contestés méconnaissent les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 et celles du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- ils méconnaissent également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- ils méconnaissent enfin le premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

La requête a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Merenne,

- et les observations de MeB..., substituant Me Haddad, avocat de M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C...fait appel du jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 juin 2018 en tant que celui-ci a rejeté ses conclusions dirigées contre le refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.

2. Le jugement attaqué s'est prononcé sur la légalité de la décision de refus de séjour aux points 3 et 4. Le moyen tiré de ce qu'il aurait omis de le faire manque en fait.

3. Les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoient la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sauf en cas de menace à l'ordre public, " A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ". Celles du 6° de l'article L. 511-4 du même code prévoient en outre que celui-ci ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.

4. M.C..., ressortissant tunisien né en 1991, est le père d'une enfant née le 25 octobre 2014 de l'union avec une ressortissante française. Par une ordonnance du 2 mars 2017, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Draguignan a prévu une pension alimentaire de 180 euros par mois, que M. C...a payée d'avril à août 2017. M. C... n'établit pas, par les pièces produites, avoir effectivement contribué à l'entretien et à l'éducation de son enfant ni avant le mois de mars 2017, ni à compter du mois de septembre 2017, date à partir de laquelle son ex-concubine perçoit une prestation destinée à compenser l'absence de versement de cette pension alimentaire. En conséquence, M. C...ne justifie avoir effectivement contribué à l'entretien et à l'éducation de son enfant de nationalité française depuis au moins deux ans.

5. L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoit que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

6. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. C...est l'auteur de violences répétées sur son ex-concubine, en présence de son enfant. Celles-ci ont justifié l'octroi d'une mesure de protection par l'ordonnance du 2 mars 2017 citée au point 3, qui retient que ces faits mettent en danger son ex-concubine et son enfant. Elles ont en outre conduit le tribunal correctionnel de Draguignan, par un jugement du 30 août 2017, à condamner M. C...à une peine d'emprisonnement pour violences conjugales, appels téléphoniques malveillants réitérés et méconnaissance des obligations imposées par le juge aux affaires familiales. En outre, et ainsi que l'a indiqué la commission du titre de séjour par son avis défavorable du 12 juillet 2017, aucun élément ne révèle une évolution comportementale de l'intéressé. D'autre part, et ainsi qu'il a été dit, M. C... ne justifie pas participer à l'entretien et à l'éducation de son enfant. Les rencontres organisées avec son enfant se sont déroulées dans un contexte conflictuel, facteur de stress pour celle-ci, qui bénéficie désormais d'un suivi psychologique en raison des troubles liés aux violences conjugales dont sa mère a été victime. Ainsi, compte tenu de la menace pour l'ordre public que constitue la présence en France de M. C...et des caractéristiques propres de sa vie privée et familiale, le préfet du Var n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de celle-ci une atteinte disproportionnée au regard des buts au vu desquels il a pris les arrêtés contestés. Il n'a par suite pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales citées au point précédent.

7. Si l'intérêt de l'enfant est en principe de vivre dans le même Etat que ses parents, il en va cependant différemment lorsque l'un d'eux ne participe pas effectivement à son entretien et à son éducation et que sa présence est à l'origine de troubles dans l'épanouissement de l'enfant. Pour ces motifs et ceux figurant au paragraphe précédent, le préfet du Var n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, méconnu l'intérêt supérieur de l'enfant en obligeant M. C...à quitter le territoire français. Le moyen tiré de la méconnaissance du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit en conséquence être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en tant qu'elle était dirigée contre le refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.

9. L'Etat, qui n'est pas tenu aux dépens, n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en conséquence obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. C... au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 29 mai 2019, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,

- M. Merenne, premier conseiller.

Lu en audience publique le 13 juin 2019.

4

N° 18MA03069

kp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA03069
Date de la décision : 13/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : CABINET HADDAD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-06-13;18ma03069 ?
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