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20/05/2019 | FRANCE | N°17MA00286

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 20 mai 2019, 17MA00286


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Siblu France a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 29 août 2014 du préfet de l'Hérault portant fixation des " périodes d'ouverture obligatoire imposable au camping " Le Lac des Rêves ", situé sur le territoire de la commune de Lattes ".

Par un jugement n° 1500221 du 22 novembre 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de la SAS Siblu France.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés r

espectivement les 23 janvier 2017 et 5 avril 2019, la SAS Siblu France, représentée par Me A......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Siblu France a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 29 août 2014 du préfet de l'Hérault portant fixation des " périodes d'ouverture obligatoire imposable au camping " Le Lac des Rêves ", situé sur le territoire de la commune de Lattes ".

Par un jugement n° 1500221 du 22 novembre 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de la SAS Siblu France.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 23 janvier 2017 et 5 avril 2019, la SAS Siblu France, représentée par Me A... de la SELARL A...B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 novembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 août 2014 du préfet de l'Hérault portant fixation des " périodes d'ouverture obligatoire imposable au camping " Le Lac des Rêves ", situé sur le territoire de la commune de Lattes " ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté en litige a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- les circonstances de fait entre la date butoir du dépôt des observations et la date de prise de l'arrêté en litige ont changé suite à la mise en place d'un système de veille hydro-météorologique ;

- cet arrêté est entaché d'erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société appelante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code du tourisme ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pecchioli,

- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,

- et les observations de Me B... de la SELARL A...B..., représentant la SAS Siblu France.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Siblu France est propriétaire exploitant du camping " Le Lac des Rêves ", situé sur le territoire de la commune de Lattes. Le préfet de l'Hérault a pris un arrêté le 29 août 2014 portant fixation des dates d'ouverture de cet établissement entre le samedi inclus qui précède le 14 mars, au samedi inclus qui suit le 14 octobre. Par jugement du 22 novembre 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de cette société tendant à l'annulation de cet arrêté. La SAS Siblu France relève appel du jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, désormais codifiées aux articles L. 121-1 et L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. (...) Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; (...) 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière (...°)". Aux termes des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, désormais codifiées à l'article L. 211-2 de ce même code : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) - Retirent ou abrogent une décision créatrice de droit ; (...) ".

3. La société persiste à soutenir en cause d'appel que l'arrêté en litige méconnaît les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et le principe du contradictoire, dès lors qu'il a été pris plus de quatre années après la procédure contradictoire organisée en 2010. Mais, le préfet de l'Hérault, qui a mis à même la société Siblu France de faire valoir ses observations, l'ayant informée, par courrier du 13 avril 2010 de la possible restriction des dates d'ouverture du camping, eu égard au risque d'inondation l'affectant, et l'invitant à présenter ses observations n'avait pas l'obligation de prendre son arrêté dans un délai déterminé. En effet, aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe, n'impose dans le cadre des mesures de police qu'un préfet peut prendre, qu'une telle décision intervienne dans un délai déterminé. Par ailleurs, eu égard à l'importance du risque d'inondation sur le terrain d'assiette du camping, la société requérante, qui n'a pas présenté d'observations, ne pouvait ignorer alors que le plan de prévention des risques d'inondations était en cours d'élaboration (PPRI) que le préfet pouvait à tout moment prendre des mesures destinées à conjurer ce risque, tout en ayant soin de concilier la décision à prendre avec le principe de la liberté du commerce et de l'industrie.

4. La société soutient encore qu'une nouvelle procédure contradictoire était, en tout état de cause, nécessaire dès lors qu'elle a réalisé des travaux dans son établissement de nature à prévenir ses occupants des inondations en cas d'alerte. Or, les travaux dont il s'agit consistent à la mise en place d'un système de veille hydrométéorologique. Ce système permet à une société privée, Hydrologik, d'informer immédiatement les responsables de la sécurité du camping de toute atteinte de niveaux d'alerte préalablement définis. Toutefois pour utile qu'il soit, ce système, qui permet seulement de gérer le risque et non de le maîtriser, ne constitue pas, eu égard à la nature et à l'intensité du risque pris en considération par l'arrêté litigieux, un changement de circonstance de fait qui aurait justifié que soit engagée une nouvelle procédure contradictoire.

5. Il s'ensuit que l'arrêté en litige n'a pas été pris au terme d'une procédure irrégulière et en méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, alors en vigueur. Les moyens ainsi soulevés doivent être écartés.

6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que le PPRI de la commune de Lattes, approuvé le 6 juin 2013, situe le camping " Le Lac des Rêves " en raison de sa situation dans la plaine d'inondation du ruisseau des Moulières, pour partie en zone rouge Rn, qui est une zone inondable soumise à un aléa fort, pour partie en zone rouge Rp qui est une zone naturelle inondable soumise à un aléa modéré et enfin pour partie en zone blanche, hors d'eau pour l'aléa de référence du PPRI. Le camping en cause est également soumis à un risque de submersion marine du fait de sa proximité immédiate avec l'étang de Pérols et ainsi classé en risque modéré pour cette raison, la côte des plus hautes eaux s'établissant à 2 mètres nivellement général de la France (NGF) dans ce secteur. Par ailleurs, les deux phénomènes de débordement, celui du ruisseau des Moulières et celui de l'étang de Pérols peuvent se combiner. L'analyse du modèle numérique du secteur fait ainsi apparaître des côtes altimétriques des terrains pouvant être inférieurs à 1 mètre NGF et en cas d'évènement centennal de références des hauteurs d'eau supérieures à 1 mètre. La situation du camping l'expose également à devenir un îlot en cas d'inondation, sans possibilité d'évacuation aisée par les deux entrées qu'il possède. Ces différents constats inscrits dans le PPRI ne font que confirmer, avec un degré de précision supplémentaire, l'appréhension de la réalité du danger telle qu'elle ressortait des études antérieures à l'organisation de la procédure contradictoire, lesquelles situaient déjà le camping " Le Lac des Rêves " dans une zone à risque cinétique modéré. La circonstance que la société Siblu France ait mis en place un dispositif d'alerte en cas d'inondation, mobilisant moyens matériels et humains, ne saurait remettre en cause cette appréciation, dès lors qu'il n'est établi, ni en première instance ni en cause d'appel, qu'il serait de nature à garantir la sécurité des occupants, eu égard à l'ampleur du risque d'inondation non sérieusement contesté. Ainsi, comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation et de disproportion que le préfet de l'Hérault a pu restreindre les dates d'ouverture de cet établissement.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Siblu France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais de l'instance :

8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées par la SAS Siblu France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Siblu France est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Siblu France et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie pour information en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 29 avril 2019, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- M. Pecchioli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 mai 2019.

2

N° 17MA00286


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00286
Date de la décision : 20/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-03-01-04 Police. Police générale. Sécurité publique. Police des lieux dangereux. Terrains inondables.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Jean-Laurent PECCHIOLI
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : ROCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-05-20;17ma00286 ?
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