Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. H... A...a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner le centre hospitalier universitaire de Nice à lui verser la somme de 113 196,42 euros en réparation des dommages causés à sa propriété à l'occasion de la construction d'un centre de recherches, de soins et d'enseignement sur la maladie d'Alzheimer.
Par un jugement n° 1202600 du 6 juin 2017, le tribunal administratif de Nice a condamné le centre hospitalier universitaire de Nice à verser la somme de 12 150 euros à M.A..., déduction faite de la somme de 30 000 euros accordée à titre de provision par une ordonnance du 16 novembre 2012 du juge des référés du même tribunal, et condamné les sociétés Fayat Bâtiment et Pro Fond à garantir le centre hospitalier à hauteur de 80 % de sa condamnation, les sociétés Artelia Bâtiment et Industrie, Atelier F...et M. C...F...à garantir le centre hospitalier à hauteur de 10 % et la société Dekra Industrial à hauteur de 10 % également.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 juillet 2017 et le 14 décembre 2017, M. A..., représenté par le cabinet Stemmer-E... -Four, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 6 juin 2017 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a limité à la somme de 42 150 euros le montant de l'indemnité au versement de laquelle le centre hospitalier universitaire de Nice a été condamné ;
2°) de porter ce montant à la somme de 112 248,33 euros ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Nice la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que le préjudice financier résultant de la perte de loyers est établi.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 7 novembre et 27 décembre 2017, les 18 janvier, 30 mars et 28 mai 2018 et le 3 janvier 2019, le centre hospitalier universitaire de Nice, représenté par la SELARL Job-Ricouart et associés, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête présentée par M.A... ;
2°) à titre subsidiaire, de condamner les sociétés Fayat Bâtiment, Pro Fond, Artelia Bâtiment et Industrie, Atelier F...et Dekra Industrial et M. C...F...à le garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par M. A...et par les entreprises appelées en garantie ne sont pas fondés ;
- ces dernières ont commis des fautes justifiant qu'elles supportent la charge finale de la condamnation.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 24 octobre et le 2 novembre 2017, la société Atelier F...et M. F..., représentés par MeL..., demandent à la cour :
1°) de rejeter les conclusions du centre hospitalier universitaire de Nice dirigées à leur encontre ;
2°) de réformer le jugement du 6 juin 2017 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il les a condamnés à garantir le centre hospitalier universitaire de Nice à hauteur de 10 % de la condamnation prononcée à son encontre et de rejeter ces conclusions présentées par le centre hospitalier devant le tribunal administratif de Nice ;
3°) à titre subsidiaire, de condamner solidairement le centre hospitalier universitaire de Nice, les sociétés Fayat Bâtiment, Pro Fond, Artelia Bâtiment et Industrie, Fondasol et Sol Essais à les garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à leur encontre ;
4°) de mettre à la charge solidaire de M. A...et de toute partie perdante la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils n'ont pas commis de faute de nature à engager leur responsabilité ;
- les désordres résultent de l'exécution des missions relevant de la société Artelia Bâtiment et Industrie au sein de la maîtrise d'oeuvre.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 décembre 2017, la société Fondasol, représentée par MeM..., demande à la cour :
1°) de rejeter tout appel en garantie dirigé à son encontre ;
2°) de condamner les sociétés Fayat Bâtiment, Pro Fond, AtelierF..., Artelia Bâtiment et Industrie, Dekra Industrial, et Sol Essais et M. F...à la garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.
Elle soutient que :
- les appels en garantie dirigés à son encontre sont irrecevables, dès lors qu'ils portent sur un litige distinct de celui soulevé par la requête de M.A... ;
- elle n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 4 janvier et le 7 juin 2018, la société Artelia Bâtiment et Industrie, représentés par la SCP Raffin et associés, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête présentée par M. A...et les conclusions du centre hospitalier universitaire de Nice dirigées à son encontre ;
2°) de réformer le jugement du 6 juin 2017 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il l'a condamnée à garantir le centre hospitalier universitaire de Nice à hauteur de 10 % de la condamnation prononcée à son encontre et de rejeter ces conclusions présentées par le centre hospitalier devant le tribunal administratif de Nice ;
3°) à titre subsidiaire, de condamner les sociétés Fayat Bâtiment, Pro Fond, Dekra Industrial, AtelierF..., Fondasol et Sol Essais et M. F...à la garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à leur encontre ;
4°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par M. A... et par le centre hospitalier universitaire de Nice ne sont pas fondés ;
- sa responsabilité doit être limitée à 5 % de la charge finale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2018, la société Fayat Bâtiment, représentée par MeJ..., demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête présentée par M. A... et les conclusions du centre hospitalier universitaire de Nice dirigées à son encontre ;
2°) à titre subsidiaire, de réduire le montant des sommes accordées à M. A... ;
3°) de mettre à la charge de M. A... et du centre hospitalier universitaire de Nice la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par M. A...et par le centre hospitalier universitaire de Nice ne sont pas fondés ;
- les conclusions de la société Artelia Bâtiment et Industrie sont irrecevables, dès lors qu'elles portent sur un litige distinct de celui soulevé par la requête de M.A... ;
- sa part de responsabilité doit être limitée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 avril 2018, la société Dekra Industrial, représentée par la SCP Sanguinede di Frenna et associés, demande à la cour :
1°) à titre principal, de réformer le jugement du 6 juin 2017 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il l'a condamnée à garantir le centre hospitalier universitaire de Nice à hauteur de 10% de la condamnation prononcée à son encontre et de rejeter ces conclusions présentées par le centre hospitalier devant le tribunal administratif de Nice ;
2°) à titre subsidiaire, de rejeter la requête présentée par M.A... ;
3°) de faire droit à ses conclusions d'appel en garantie présentées en première instance ;
4°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ;
- le moyen soulevé par M. A...n'est pas fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 décembre 2018, la société Sol Essais, représentée par la SCP Assus-Juttner et associés, demande à la cour :
1°) de rejeter les conclusions de la société Artelia Bâtiment et Industrie dirigées à son encontre ;
2°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.
Elle soutient qu'elle n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité.
La clôture de l'instruction a été fixée au 6 mars 2019 par une ordonnance du même jour.
Un mémoire présenté par la société Pro-Fond a été enregistré le 5 avril 2019.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur trois moyens relevés d'office, tirés de l'incompétence de la justice administrative pour connaître des conclusions de la société Artelia Bâtiment et Industrie dirigées contre la société Sol Essais, de l'irrégularité du jugement attaqué du fait que le magistrat ayant statué sur le référé-provision a siégé dans la formation de jugement au fond et de ce que la minute du jugement est signée par un magistrat n'appartenant pas à cette formation de jugement.
Un mémoire a été enregistré pour M. A...en réponse à cette mesure d'information le 18 mars 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code des marchés publics ;
- la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ;
- le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Merenne,
- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
- et les observations de MeE..., représentant M. A..., de MeG..., représentant le centre hospitalier universitaire de Nice, de Me B..., substituant MeJ..., représentant la société Fayat Bâtiment, de MeO..., substituant Me D..., représentant la société Pro-Fond, de MeI..., représentant la société Atelier F...et de M.F..., de MeN..., représentant la société Dekra Industrial, et de MeM..., représentant la société Fondasol.
Considérant ce qui suit :
1. M. A...était propriétaire d'un ensemble immobilier situé 11 rue Parmentier à Nice, qu'il a vendu le 8 juillet 2015. Le centre hospitalier universitaire de Nice a fait construire sur une parcelle voisine un centre de recherches, de soins et d'enseignement sur la maladie d'Alzheimer. Il a confié la maîtrise d'oeuvre des travaux à un groupement solidaire constitué par la société Coteba, devenue Artelia Bâtiment et Industrie, la société Atelier F...et M. F..., le contrôle technique à la société Dekra Inspection, devenue Dekra Industrial, une mission de supervision géotechnique de type G4 à la société Fondasol, et le lot " terrassement, fondations spéciales, gros oeuvre, maçonnerie " à un groupement solidaire constitué par la société Cari, devenue Fayat Bâtiment, et par la société Pro Fond. La société Coteba a en outre sous-traité une étude géotechnique de type G2 à la société Sol Essais. Les travaux de pompage ont démarré le 23 mars 2011. Après le début des travaux sont apparues des fissures affectant les deux appartements et le studio de l'un des bâtiments de l'ensemble immobilier dont M. A...était propriétaire.
2. Par une ordonnance du 16 novembre 2012, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a condamné le centre hospitalier universitaire de Nice à verser à M. A...une provision de 30 000 euros.
3. Par le jugement attaqué du 6 juin 2017, le tribunal administratif de Nice a retenu que la responsabilité sans faute du centre hospitalier universitaire de Nice était engagée à l'égard de M. A... en sa qualité de tiers à une opération de travaux publics et a condamné celui-ci à verser la somme de 12 150 euros à M. A..., déduction faite de la somme de 30 000 euros accordée à titre de provision, en réparation des préjudices matériels et des frais de relogement de la locataire du studio. Le tribunal administratif a en outre condamné les sociétés Fayat Bâtiment et Pro Fond à garantir le centre hospitalier à hauteur de 80 % de sa condamnation, les sociétés Artelia Bâtiment et Industrie, Atelier F...et M. C...F...à garantir le centre hospitalier à hauteur de 10 % et la société Dekra Industrial à hauteur de 10 % également.
4. M. A...fait appel de ce jugement en tant que le tribunal administratif a rejeté sa demande concernant l'indemnisation des pertes de loyer des deux autres appartements. Les sociétés Artelia Bâtiment et Industrie, Atelier F...et Dekral Industrial et M. F...présentent en outre des conclusions incidentes par lesquelles ils contestent le jugement attaqué en tant qu'il a fait droit aux appels en garantie dirigés par le centre hospitalier universitaire de Nice à leur encontre, d'une part, et qu'il a rejeté leurs appels en garantie dirigés contre les autres intervenants, d'autre part. En l'absence au dossier de première instance des accusés de réception de la notification du jugement attaqué à ces parties, qui auraient permis de faire courir le délai de recours, ces conclusions doivent être regardés comme ayant le caractère d'un appel principal.
Sur la régularité du jugement attaqué :
5. D'une part, le premier alinéa de l'article L. 10 du code de justice administrative dispose que : " Les jugements sont publics. Ils mentionnent le nom des juges qui les ont rendus. ". L'article R. 741-7 du code de justice administrative prévoit ensuite que : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ".
6. D'autre part, l'article R. 541-1 du code de justice administrative dispose que : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. "
7. La minute du jugement attaqué est signée par un président, P. Blanc, qui n'est pas celui désigné plus haut comme ayant présidé la formation de jugement, soit M.K.... Or, ce dernier a statué en qualité de juge des référés sur la demande de provision qui avait été précédemment présentée par M. A...et a, à cette occasion, considéré que l'obligation dont se prévalait ce dernier à l'égard du centre hospitalier n'était pas sérieusement contestable. Le principe d'impartialité faisait, en conséquence, obstacle à ce qu'il siège dans la formation de jugement appelée à se prononcer au fond sur cette question. Les mentions contradictoires du jugement ne permettant pas de s'assurer que M. K...n'a pas effectivement présidé cette formation de jugement, il convient d'annuler le jugement attaqué dans la limite des conclusions d'appel recevables des parties définies au point 4 et de statuer immédiatement sur ces conclusions par la voie de l'évocation.
Sur les conclusions de M.A... :
8. Il résulte de l'instruction que les désordres provoqués par la construction du centre de recherches ont conduit le maire de la commune de Nice à ordonner l'évacuation du bâtiment en fond de cour le 16 avril 2011, puis à prendre un arrêté de péril imminent le 26 mai 2011. Cet arrêté a été abrogé le 1er octobre 2011 suite à l'intervention de l'expert nommé par le juge des référés du tribunal administratif. Il résulte en outre de l'instruction que les deux appartements de ce bâtiment présentaient un état très dégradé indépendamment de ces désordres. L'alimentation en gaz et en eau et l'électricité ne répondaient pas aux normes de sécurité en vigueur et les appartements n'étaient ni thermiquement isolés, ni correctement ventilés, ce qui faisait obstacle à ce que les appartements respectent le critère de décence prévu à l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs. Aussi, si l'arrêté de péril consécutif aux travaux publics a été l'élément déclencheur de l'évacuation des locataires de M. A..., celui-ci n'est pas pour autant fondé à demander l'indemnisation des loyers qu'il a ainsi perdus dès lors que les appartements en cause n'étaient pas en état d'être régulièrement loués, indépendamment des désordres provoqués par la construction du centre de recherches. Les conclusions de M. A... relatives à l'indemnisation de ces pertes de loyers doivent en conséquence être rejetées.
Sur les conclusions des sociétés Dekra Industrial, Artelia Bâtiment et Industrie, Atelier F...et de M. F... :
En ce qui concerne les appels en garantie formés par le centre hospitalier universitaire de Nice à leur encontre :
9. La société Artelia Bâtiment et Industrie soutient que les désordres provoqués par la construction du centre de recherches ne sont pas imputables à la maîtrise d'oeuvre dès lors qu'elle n'a pas été mise en mesure d'intervenir, en l'absence de transmission de tout document exploitable par les entreprises responsables de l'exécution des travaux au géotechnicien en charge de la mission de type G4, la société Fondasol, en particulier avant le 5 avril 2011, date du compte rendu de cette dernière alertant la maîtrise d'oeuvre de l'apparition de signes avant-coureurs de désordres (premiers mouvements sur mitoyens C10 et C11, tassements respectifs de 8 et 9 mm). Il résulte toutefois de l'instruction que la maîtrise d'oeuvre, chargée de la direction et de la surveillance du chantier, disposait, dès le 1er avril 2011, de certains éléments, comme un tableau de suivi de la cible C11, lui permettant d'anticiper l'apparition des premiers désordres causés par le chantier. Ainsi, si les entreprises en charge de l'exécution des travaux n'ont pas transmis de façon optimale au groupement de maîtrise d'oeuvre les informations sur les éléments annonciateurs de l'apparition des désordres, la maîtrise d'oeuvre a fait preuve d'un manque de réactivité face aux signes avant-coureurs des désordres, ce qui constitue une faute de nature à engager sa responsabilité.
10. En l'absence de stipulations contraires, les entreprises qui s'engagent conjointement et solidairement envers le maître de l'ouvrage à réaliser une opération de construction, s'engagent conjointement et solidairement non seulement à exécuter les travaux, mais encore à réparer le préjudice subi par le maître de l'ouvrage du fait de manquements dans l'exécution de leurs obligations contractuelles. Un constructeur ne peut échapper à sa responsabilité conjointe et solidaire avec les autres entreprises co-contractantes, au motif qu'il n'a pas réellement participé aux travaux révélant un tel manquement, que si une convention, à laquelle le maître de l'ouvrage est partie, fixe la part qui lui revient dans l'exécution des travaux.
11. L'acte d'engagement du marché de maîtrise d'oeuvre conclu entre le centre hospitalier et le groupement solidaire formé entre les sociétés Coteba, Atelier F...et M.F..., signé le 14 septembre 2007, renvoie à une annexe précisant la répartition des missions entre les cocontractants. Cette annexe précise que la responsabilité de l'exécution des prestations en ce qui concerne les terrassements, les fondations et le cuvelage relève de l'ingénierie, c'est-à-dire de la société Coteba, devenue la société Artelia Bâtiment et Industrie. Le document intitulé " répartition des tâches Atelier F.../Artelia " daté du 31 juillet 2013 n'a pas, quant à lui, été annexé à l'acte d'engagement. Il en résulte que la faute du groupement de maîtrise d'oeuvre ayant contribué à la réalisation des désordres est imputable à la société Artelia Bâtiment et Industrie. Cette dernière doit en conséquence être condamnée seule à garantir le maître d'ouvrage à hauteur de 10 % de sa condamnation.
12. La société Dekra Industrial, chargée du contrôle technique par un marché comprenant une mission AV relative à la stabilité des avoisinants et participant au suivi du chantier, s'est bornée par un courrier du 6 avril 2011 à indiquer souhaiter recevoir les résultats topographiques du suivi de l'évolution des cibles, sans, au regard de la situation, alerter le maître d'ouvrage et la maîtrise d'oeuvre sur les risques que faisaient peser les travaux litigieux sur la stabilité des avoisinants. Ainsi, la société Dekra Industrial a commis une faute dans l'exécution de sa mission de contrôleur technique qui justifie de la condamner également à garantir le maître d'ouvrage à hauteur de 10 % de sa condamnation.
En ce qui concerne l'appel en garantie de la société Artelia Bâtiment et Industrie dirigé contre la société Sol Essais :
13. Lorsque le juge administratif est saisi d'un litige né de l'exécution d'un marché de travaux publics opposant le maître d'ouvrage à des constructeurs qui ont constitué un groupement pour exécuter le marché, il est compétent pour connaître des actions en garantie engagées par les constructeurs les uns envers les autres si le marché indique la répartition des prestations entre les membres du groupement. Si tel n'est pas le cas, le juge administratif est également compétent pour connaître des actions en garantie entre les constructeurs, quand bien même la répartition des prestations résulterait d'un contrat de droit privé conclu entre eux, hormis le cas où la validité ou l'interprétation de ce contrat soulèverait une difficulté sérieuse.
14. En revanche, la compétence de la juridiction administrative, pour connaître des litiges nés de l'exécution d'un marché de travaux publics et opposant des participants à l'exécution de ces travaux ne s'étend pas à l'action en garantie du titulaire du marché contre son sous-traitant avec lequel il est lié par un contrat de droit privé.
15. Il suit de là que les conclusions présentées par la société Artelia Bâtiment et Industrie, venant aux droits de la société Coteba, à l'encontre de la société Sol Essais, sous-traitante de cette dernière, relèvent de la compétence des juridictions judiciaires et doivent être rejetées pour ce motif.
En ce qui concerne les autres appels en garantie de la société Artelia Bâtiment et Industrie et les appels en garantie de la société Dekra Industrial :
16. Les sociétés Dekra Industrial et Artelia Bâtiment et Industrie sont condamnées à garantir le centre hospitalier universitaire de Nice à concurrence de leurs fautes propres. Leurs appels en garantie à l'encontre des autres intervenants doivent en conséquence être rejetés.
17. Il résulte de tout ce qui précède que le jugement attaqué du tribunal administratif est définitif en ce qu'il a condamné le centre hospitalier à verser la somme de 42 150 euros à M. A... en réparation de ses préjudices matériels et des frais de relogement de la locataire du studio, mis à la charge de celui-ci les frais d'expertise, condamné les sociétés Fayat Bâtiment et Pro Fond à garantir le centre hospitalier universitaire de Nice à hauteur de 80 % de sa condamnation, rejeté les appels en garantie formés par ce dernier à l'encontre des sociétés Sol Essais et Fondasol et ceux présentés par les sociétés Fayat Bâtiment et Pro Fond. En revanche, il est annulé en tant qu'il s'est prononcé, d'une part, sur la demande de M. A...portant sur l'indemnisation des pertes de loyers, d'autre part, sur les appels en garantie formés par le centre hospitalier universitaire de Nice à l'encontre des sociétés Artelia Bâtiment et Industrie, Atelier F...et Dekral Industrial et M. F..., et, enfin, sur les appels en garantie présentés par ces derniers. En outre, les sociétés Artelia Bâtiment et Industrie et Dekra Industrial sont chacune condamnées à garantir le centre hospitalier universitaire de Nice à hauteur de 10 % des sommes mises à sa charge. Enfin, les conclusions de M. A... ainsi que le surplus des conclusions des autres parties sont rejetées.
Sur les frais liés au litige :
18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les autres parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais qu'elles ont exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 6 juin 2017 du tribunal administratif de Nice est annulé en tant qu'il s'est prononcé sur la demande de M. A...portant sur l'indemnisation des pertes de loyers, sur les appels en garantie formés par le centre hospitalier universitaire de Nice à l'encontre des sociétés Artelia Bâtiment et Industrie, Atelier F...et Dekral Industrial et M.F..., et sur les appels en garantie présentés par ces derniers.
Article 2 : Les sociétés Artelia Bâtiment et Industrie et Dekra Industrial sont chacune condamnées à garantir le centre hospitalier universitaire de Nice à hauteur de 10 % des sommes mises à sa charge.
Article 3 : Les conclusions présentées par la société Artelia Bâtiment et Industrie à l'encontre de la société Sol Essais devant le tribunal administratif de Nice sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 4 : Les conclusions de M. A...ainsi que le surplus des conclusions présentées par les autres parties sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... A..., au centre hospitalier universitaire de Nice, aux sociétés Fayat, Pro-Fond, Artelia Bâtiment et Industrie, Dekra Industrial, Sol Essais, Fondasol, Atelier F...et à M. C...F....
Copie en sera adressée pour information à l'expert judiciaire.
Délibéré après l'audience du 11 avril 2019, où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente de la cour,
- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,
- M. Merenne, premier conseiller.
Lu en audience publique le 2 mai 2019.
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N° 17MA03248
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