Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme J... F...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 20 mars 2015 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement, ainsi que la décision du 26 octobre 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a confirmé la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique née le 20 septembre 2015.
Par un jugement n° 1510160 du 19 septembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 15 novembre 2017, sous le n° 17MA04370, Mme F..., représentée par Me B... demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 septembre 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 20 mars 2015 de l'inspecteur du travail et la décision du 26 octobre 2015 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;
3°) de mettre à la charge de l'association Saint-Martin la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le climat délétère existant au sein de l'association ne procédait pas exclusivement de son comportement ;
- elle n'est pas à l'origine des relations conflictuelles avec la nouvelle directrice ni de la dégradation de l'état de santé de M. H... ;
- elle a accompli l'ensemble des tâches qui lui étaient confiées ;
- les tentatives de déstabilisation des autres salariés ne sont pas démontrées ;
- les éléments produits par l'association Saint-Martin ne sont pas de nature à fonder l'autorisation de licenciement contestée ;
- le fait qu'elle a été maintenue à son poste durant trois mois laisse planer un doute sur la sincérité des griefs qui lui sont reprochés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2018, l'association Saint-Martin conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de Mme F... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme F... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2018, la ministre du travail conclut au rejet de la requête de Mme F....
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme F... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme K...,
- les conclusions de M. A...,
- et les observations de Me D... représentant l'association Saint-Martin.
Considérant ce qui suit :
1. Mme F... relève appel du jugement du 19 septembre 2017 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 mars 2015 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement, ainsi que la décision du 26 octobre 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a confirmé la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique née le 20 septembre 2015.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 2411-3 du code du travail : " Le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. ". Aux termes de l'article L. 2411-8 de même code : " Le licenciement d'un membre élu du comité d'entreprise, titulaire ou suppléant, ou d'un représentant syndical au comité d'entreprise, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. ".
3. En vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables à son contrat de travail et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.
4. Pour demander l'autorisation de licencier Mme F..., l'association Saint-Martin s'est fondée sur quatre griefs tirés de ce que la requérante a créé un climat délétère nuisible à l'équilibre et à l'intérêt des services, a refusé l'autorité de la nouvelle directrice l'ayant conduit à des tentatives de déstabilisation graves et nuisibles à son état de santé, a adopté une attitude d'opposition vis à vis du directeur adjoint, n'a pas exécuté les taches demandées et a commis une tentative de déstabilisation d'autres salariés qui n'arrivaient plus à travailler avec elle. Par la décision contestée du 20 mars 2015, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de M. F... en estimant que seuls les deuxième et quatrièmes griefs tirés de la déstabilisation de la nouvelle directrice et des salariés de son service étaient établis et constitutifs d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement. Cette décision a été confirmée par la décision du 26 octobre 2015 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social portant rejet du recours hiérarchique de Mme F....
5. S'agissant du grief tiré du refus de l'autorité la nouvelle directrice l'ayant conduit à des tentatives de déstabilisation graves et nuisibles à son état de santé, il ressort des pièces du dossier que la relation entre Mme F... et Mme E... est devenue très conflictuelle à la suite de la réorganisation des astreintes puis de la plainte pour harcèlement déposée par la requérante contre elle. Dans une lettre du 24 mars 2014, Mme E... fait état de l'attitude agressive de Mme F... envers elle, de ce qu'elle ne supporte aucune remarque de sa part, se rebelle, lui manque de respect notamment en réunion des cadres et la menace par le dépôt d'une main courante à tel point que Mme E... a saisi le médecin du travail. Par un courrier du 16 février 2015, ce dernier a constaté qu'elle était en très grande difficulté, psychologiquement et physiquement au bord de l'épuisement et qu'elle n'avait plus aucune ressource émotionnelle et énergétique pour se battre. La requérante ne peut utilement soutenir que le médecin du travail a violé le secret professionnel dès lors qu'il ne s'applique qu'à Mme E... qui l'a saisi. Elle ne conteste pas ces difficultés relationnelles lesquelles sont établies par diverses attestations produites au dossier et peuvent être prises en compte alors même qu'elles seraient favorables à Mme E.... Le témoignage de Mme C... n'est pas incomplet et suffisamment circonstancié pour être retenu. En outre, il ne ressort pas de l'attestation de Mme I... que celle-ci serait subjective.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. H... a été recruté en 2009 pour palier la baisse du temps de travail de Mme F.... Selon son courrier du 16 février 2015, le médecin de travail a constaté une dégradation très importante de la santé de M. H... liée à des conditions de travail difficiles, Mme F... lui déléguant de nombreuses tâches y compris celle de devoir présenter le bilan au commissaire aux comptes sans toutefois lui donner les éléments comptables qu'elle détenait. M. H... atteste que Mme F... ne l'a pas aidé et n'a pas manqué de relever ses erreurs sans lui proposer de solution, qu'elle a transféré une grande partie de son travail sur lui et lui adressait des mails déstabilisants. Mme I... témoigne de ce que sa charge de travail n'a fait qu'augmenter et qu'elle devait aller " travailler la boule au ventre ". La circonstance que cet agent n'ait jamais formulé d'observation sur les réunions hebdomadaires instaurées par Mme F... ainsi que sur la mise en place de temps de transmission est sans incidence. Si la requérante produit seize témoignages de salariés de l'association qui attestent de son professionnalisme et de ses qualités humaines, il s'agit de personnes avec lesquelles elle n'avait pas de lien hiérarchique direct. Ces témoignages ne sont en tout état de cause pas de nature à atténuer la gravité de son comportement. Il s'en suit que le grief tiré du comportement de déstabilisation de Mme F... vis à vis des autres salariés qui n'arrivaient plus à travailler avec elle est établi.
7. Dans ces conditions, les deux griefs mentionnés aux points 5 et 6 sont constitutifs d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement de Mme F....
8. Les décisions en litige n'étant pas fondées sur les griefs tirés du climat délétère et du refus d'exécution de certaines tâches qui n'ont pas été retenus par l'inspecteur du travail, ils ne peuvent être utilement contestés par les parties.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 20 mars et 26 octobre 2015.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'association Saint-Martin, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme F... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de Mme F... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'association Saint-Martin et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.
Article 2 : Mme F... versera à l'association Saint-Martin une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme J...F..., à l'association Saint-Martin et à la ministre du travail.
Délibéré après l'audience du 12 avril 2019, où siégeaient :
- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme G..., première conseillère,
- Mme K..., première conseillère
Lu en audience publique, le 26 avril 2019.
2
N° 17MA04370
ia