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29/03/2019 | FRANCE | N°18MA01981

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 29 mars 2019, 18MA01981


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision de l'inspecteur du travail du Vaucluse du 20 avril 2016 autorisant la société La Flèche à procéder à son licenciement pour motif disciplinaire.

Par un jugement n° 1601927 du 27 février 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 avril 2018, M. E..., représenté par la SCP Breuillot et Varo, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 27 février 2018 ;

2°) d'annuler la décis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision de l'inspecteur du travail du Vaucluse du 20 avril 2016 autorisant la société La Flèche à procéder à son licenciement pour motif disciplinaire.

Par un jugement n° 1601927 du 27 février 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 avril 2018, M. E..., représenté par la SCP Breuillot et Varo, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 27 février 2018 ;

2°) d'annuler la décision de l'inspecteur du travail du 20 avril 2016 autorisant son licenciement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision du 20 avril 2016 n'est pas suffisamment motivée faute de mentionner les considérations de droit et de fait qui la fondent, faute de répondre aux moyens tirés de l'irrecevabilité de la nouvelle demande de licenciement et de son irrégularité en l'état du changement dans les circonstances de droit et de fait qui auraient justifié un nouvel entretien préalable et en l'absence de référence à l'absence de lien de la demande d'autorisation de licenciement avec le mandat de délégué du personnel suppléant ;

- l'inspecteur du travail n'a pas procédé à un nouvel examen de la demande de licenciement ;

- la procédure de licenciement est irrégulière compte tenu de l'absence de tenue d'un nouvel entretien préalable et d'une nouvelle consultation du comité d'entreprise dès lors que les motifs invoqués dans la nouvelle demande d'autorisation ne sont pas identiques et que les circonstances de fait ont changé ;

- les griefs qui lui sont reprochés ne revêtent pas un caractère disciplinaire dans la mesure où les faits se sont produits hors de l'enceinte de l'entreprise, à l'occasion d'une réunion des délégués du personnel, dans le cadre de l'exercice du mandat représentatif et alors qu'il était placé en dispense d'activité ;

- la réalité et la gravité des faits reprochés ne sont pas matériellement établis et ne justifient pas la mesure de licenciement prise à son encontre ;

- l'inspecteur du travail n'a pas exercé son contrôle sur l'absence de lien entre la demande de licenciement et le mandat du salarié.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2018, la société La Flèche conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 6 000 euros soit mise à la charge du requérant sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. E... a présenté le 29 novembre 2018 un mémoire en réplique qui n'a pas été communiqué en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. B...,

- les observations de Me C... substituant la SCP Breuillot et Varo représentant M. E....

Considérant ce qui suit :

1. La société La Flèche a sollicité le 10 octobre 2012 auprès de l'inspection du travail, l'autorisation de licencier pour motif économique M. E..., employé en contrat à durée indéterminée depuis le 11 décembre 2006 en qualité de chauffeur routier et exerçant le mandat de délégué du personnel suppléant. Par décision du 8 novembre 2012, l'inspecteur du travail de Vaucluse a autorisé le licenciement. Le recours hiérarchique de M. E... contre cette décision a été rejeté le 15 mai 2013 par la ministre du travail. Par un jugement n° 1301888 du 19 juin 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la requête de M. E... tendant à l'annulation de ces deux décisions. Par un arrêt n° 14MA03401 du 10 novembre 2015, la Cour de céans a annulé ce jugement ainsi que les deux décisions précitées. Sur demande du salarié, la société La Flèche a alors procédé à la réintégration de M. E... le 28 décembre 2015. Après avoir confirmé à l'inspecteur du travail, par courrier du 1er février 2016, la poursuite du licenciement pour faute grave de M. E..., la société La Flèche a sollicité, par courrier du 26 février 2016, une nouvelle demande d'autorisation de licenciement pour les faits à l'origine de la procédure de 2012. A la suite d'une nouvelle enquête contradictoire, par une décision du 20 avril 2016, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement sollicité. M. E... relève appel du jugement du 27 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision de l'inspecteur du travail du 20 avril 2016.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec leur appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.

3. Aux termes de l'article R. 2421-12 du code du travail : " La décision de l'inspecteur du travail est motivée. ".

4. Pour motiver l'autorisation contestée, l'inspecteur du travail fait référence aux décisions d'autorisation de licenciement du 8 novembre 2012 de l'inspectrice du travail et du 15 mai 2013 du ministre du travail ainsi qu'à l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Marseille qui a annulé ces décisions. Il a également précisé que la demande d'autorisation de licenciement est intervenue dans le délai de deux mois après la réintégration du salarié, que les éléments apportés lors de l'enquête ont été portés à la connaissance des parties qui ont pu faire valoir leurs éléments de réponse, qu'aucun de ces éléments ne constitue un élément nouveau, que les motifs et les circonstances de la demande sont identiques, qu'il n'y avait pas lieu d'entamer une nouvelle procédure d'entretien préalable et de consultation du comité d'entreprise dès lors que l'annulation des précédentes décisions administratives ne porte pas préjudice à la procédure préalable au licenciement et que la réalité du motif initialement invoqué ainsi que sa gravité étaient établis. Il relève également que l'acquisition du mandat de conseiller de salarié, postérieure à la décision du ministre, est sans effet sur la procédure en cours. Toutefois, cette décision, qui ne mentionne pas le motif de légalité externe d'annulation retenu par la Cour, tenant au non-respect du caractère contradictoire de l'enquête de l'inspecteur du travail, ne peut être regardée comme suffisamment motivée au regard des prescriptions de l'article R. 2421-12 du code du travail dès lors qu'elle ne précise ni la nature des faits reprochés à l'intéressé, ni si ces derniers revêtent le caractère de fautes suffisamment graves pour justifier un licenciement, ni enfin si la procédure de licenciement est en rapport avec le mandat exercé.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 avril 2016 par laquelle l'inspecteur du travail du Vaucluse a autorisé la société La Flèche à procéder à son licenciement pour motif disciplinaire.

Sur les frais liés au litige :

6. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. E..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la société La Flèche au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société La Flèche la somme demandée par M. E... en application de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 27 février 2018 et la décision de l'inspecteur du travail du 20 avril 2016 sont annulés.

Article 2 : Les conclusions de M. E... et de la société La flèche tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E..., à la société La Flèche et à la ministre du travail.

Copie en sera adressée à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2019, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président-assesseur,

- Mme D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 29 mars 2019.

2

N° 18MA01981

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA01981
Date de la décision : 29/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jeannette FEMENIA
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : CABINET BREUILLOT et VARO

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-03-29;18ma01981 ?
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