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26/03/2019 | FRANCE | N°18MA02319

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 26 mars 2019, 18MA02319


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Bouches-du-Rhône a déféré au tribunal administratif de Marseille l'arrêté du 8 juillet 2013 par lequel le maire de la commune d'Arles a délivré un permis de construire à M. D... C....

Par un jugement n° 1307451 du 26 mars 2015, le tribunal administratif de Marseille a annulé le permis de construire délivré à M. C....

Procédure devant la Cour avant renvoi :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 21 mai, 30 novembre, 14 décembre 2015 et 14 septembre 201

6, M. C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Bouches-du-Rhône a déféré au tribunal administratif de Marseille l'arrêté du 8 juillet 2013 par lequel le maire de la commune d'Arles a délivré un permis de construire à M. D... C....

Par un jugement n° 1307451 du 26 mars 2015, le tribunal administratif de Marseille a annulé le permis de construire délivré à M. C....

Procédure devant la Cour avant renvoi :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 21 mai, 30 novembre, 14 décembre 2015 et 14 septembre 2016, M. C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 26 mars 2015 ;

2°) de rejeter le déféré du préfet des Bouches-du-Rhône devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le bâtiment projeté à usage de garage d'engins agricoles et de stockage de produits agricoles est nécessaire à la poursuite de son activité agricole au sens de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols ;

- l'avis défavorable du conseil pour l'habitat agricole en Méditerranée Provence (CHAMP) ne lie pas l'administration ;

- l'aspect visuel soigné du bâtiment projeté, conforme à l'article INC 11 du règlement, ne permet pas d'établir l'existence d'une fraude sur la destination réelle du projet.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en observations, enregistré le 29 juin 2016, la commune d'Arles conclut à l'annulation du jugement, au rejet du déféré du préfet des Bouches-du-Rhône et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'existence de l'exploitation agricole, qui peut prendre la forme d'un fermage, du requérant est établie ;

- le projet est indispensable à l'activité agricole du requérant ;

- la suspicion de fraude alléguée par le préfet n'est pas établie à la date de la demande de permis de construire ;

- l'avis défavorable du conseil pour l'habitat agricole en Méditerranée Provence (CHAMP) ne lie pas l'administration.

Par un arrêt n° 15MA02090 du 12 janvier 2017, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. C... contre ce jugement.

Par une décision n° 408895 du 9 mai 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, sur pourvoi présenté par M. C..., a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Marseille.

Procédure devant la Cour après renvoi :

Par un mémoire, enregistré le 12 juillet 2018, M. C..., représenté par Me A..., conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en observations, enregistré le 20 août 2018, la commune d'Arles, représentée par la SCP d'avocats d'Assomption-Hureaux-B..., conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, en outre, que le caractère nécessaire, au sens de l'article NC1 du règlement du plan d'occupation des sols, de la construction projetée doit être analysé uniquement par rapport à l'exploitation agricole en cause.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carassic,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la commune d'Arles et de Me A..., représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a déposé, le 18 décembre 2012, une demande de permis de construire pour édifier un bâtiment, d'une superficie de 109 m², destiné à abriter des véhicules agricoles et de stocker des produits agricoles sur un terrain situé 527 route de Fontvieille classé en zone agricole NC par le plan d'occupation des sols de la commune d'Arles. Par un arrêté du 8 juillet 2013, le maire de la commune d'Arles a délivré ce permis de construire. Sur déféré du préfet des Bouches-du-Rhône, le tribunal administratif de Marseille, par jugement du 26 mars 2015, a annulé cet arrêté du 8 juillet 2013. Par un arrêt du 12 janvier 2017, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. C... contre ce jugement. Sur pourvoi de ce dernier, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, par décision n° 408895 du 9 mai 2018, a annulé cet arrêt au motif que la cour avait entaché son arrêt d'une erreur de droit en déduisant du seul fait que le fermier de M. C... louait un entrepôt sur une autre propriété que la construction projetée n'était pas nécessaire à son exploitation agricole et a renvoyé l'affaire à la Cour.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. Pour annuler le permis de construire délivré à M. C..., le tribunal administratif a estimé que la réalité de l'exploitation agricole du requérant n'était pas établie, et, qu'en tout état de cause, la construction projetée ne pouvait être regardée comme directement liée à cette exploitation agricole ni comme le complément habituel d'une occupation du sol autorisée dans la zone, en méconnaissance des articles NC1 et NC2 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune d'Arles.

3. En premier lieu, l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune d'Arles autorise en zone NC " dans l'intérêt de l'exploitation agricole, la construction de bâtiments nouveaux (...) à caractère fonctionnel, autres qu'à usage d'habitation lorsqu'ils sont directement liés ou nécessaires à l'exploitation agricole (...) " et " les constructions (...) qui sont le complément habituel des occupations des sols autorisées dans la zone ne générant que de la surface hors oeuvre brute". L'article NC2 interdit les occupations et utilisations du sol non mentionnées à l'article NC1.

4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du relevé d'exploitation de l'année 2013, de la déclaration d'impôt de M. C... au titre du bénéfice agricole, du relevé de la mutuelle sociale agricole et de l'avis du l'habitat agricole en Méditerranée Provence (CHAMP) du 23 avril 2013 que M. C... exploite, par un bail consenti à un fermier, ses terres d'une superficie de 3,37 hectares pour la production de Foin de Crau d'origine contrôlée. Contrairement à ce que soutient le préfet, la réalité de cette exploitation agricole, alors même que son mode d'exploitation est un fermage, est ainsi établie.

5. Il ressort de la notice descriptive jointe à la demande de permis de construire que "la future construction servira de garage, stockage, local de service à des fins agricole" et le plan qui est annexé à cette notice montre que le bâtiment servira de stockage de produits phytosanitaires et de garage. La fiche de renseignement préalable au dépôt d'un permis de construire en zone agricole précise comme destination du projet "une remise (hangar fermé) et un garage", indique comme motif de la demande "le matériel est actuellement stocké dehors" et mentionne comme matériel d'exploitation existant un tracteur, une faucheuse, une faneuse et une presse. Le préfet ne conteste pas que le projet servira aussi de lieu de stockage du foin de Crau AOC récolté. Il est constant que l'exploitation agricole de M. C... ne dispose pas sur ses propres terres d'un garage pour les véhicules agricoles et d'un local pour entreposer le foin et les produits phytosanitaires à usage agricole. La circonstance que le fermier du requérant dispose, sur un terrain mitoyen au terrain d'assiette du projet, d'un lieu de stockage de ses équipements agricoles, est sans incidence sur l'appréciation du caractère lié ou nécessaire du projet à l'exploitation agricole du requérant. Il ressort des pièces du dossier que le foin de Crau AOC exige, selon son cahier des charges, une fertilisation azotée nécessitant l'utilisation de produits phytosanitaires. Le préfet, en se bornant à soutenir que le foin de Crau est une "espèce endogène" qui ne nécessiterait ainsi pas l'emploi de tels produits, n'établit pas que le local projeté de stockage de ces produits ne serait pas nécessaire à l'exploitation agricole du requérant. L'administration ne conteste pas que les engins et véhicules agricoles nécessaires à cette exploitation, ainsi que le foin récolté, doivent être remisés dans un local couvert. L'avis du CHAMP ne lie pas l'administration. Par suite, le projet doit être regardé comme un bâtiment nouveau à caractère fonctionnel nécessaire à l'exploitation agricole de M. C... au sens de l'article NC1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune. Dès lors, c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision en litige au motif que le projet ne respectait pas les articles NC1 et NC2 du règlement du plan d'occupation des sols.

6. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par le préfet des Bouches-du-Rhône devant le tribunal administratif et devant la cour.

7. Un permis de construire n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. La circonstance que ces plans pourraient ne pas être respectés ou que ces immeubles risqueraient d'être ultérieurement transformés et affectés à un usage non conforme au plan d'occupation des sols, n'est pas par elle-même, sauf le cas de fraude, de nature à affecter la légalité du permis. En se bornant à soutenir que l'aspect visuel très soigné du bâtiment projeté prévu dans la demande de permis de construire démontrerait par lui-même que ce dernier est en réalité destiné à un usage d'habitation, le préfet n'établit pas que le permis de construire en litige a été obtenu par fraude. Dès lors, le préfet n'est pas fondé à soutenir que le permis de construire délivré à M. C... aurait été obtenu par fraude.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté du 8 juillet 2013 par lequel le maire de la commune d'Arles lui a délivré un permis de construire. Par suite, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué et de rejeter le déféré du préfet des Bouches-du-Rhône présenté devant le tribunal administratif.

Sur les frais liés au litige :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il ne paraît pas inéquitable de laisser à chacune des parties à l'instance la charge des frais qu'elles ont engagés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 26 mars 2015 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : Le déféré présenté par le préfet des Bouches-du-Rhône devant le tribunal administratif de Marseille est rejeté.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à M. D... C...et à la commune d'Arles.

Copie pour information sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au Procureur de la République près du tribunal de grande instance d'Arles.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2019, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- Mme Carassic, première conseillère ;

- M. Slimani, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 mars 2019.

5

N° 18MA02319


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA02319
Date de la décision : 26/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SAVI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-03-26;18ma02319 ?
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