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14/03/2019 | FRANCE | N°17MA02448

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 3ème chambre - formation à 3, 14 mars 2019, 17MA02448


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Bastia de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009.



Par un jugement n° 1600526 du 13 avril 2017, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le

12 juin 2017, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :



1°) d'annuler ce jugement du 13 avril 2017 du t...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Bastia de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009.

Par un jugement n° 1600526 du 13 avril 2017, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2017, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 13 avril 2017 du tribunal administratif de Bastia ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais engagés tant en première instance qu'en appel, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement contesté est entaché d'erreur de fait, d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la lettre d'accueil du 18 août 2006 envoyée par l'administration fiscale à la SCI Monte Grosso et le " post-it " qui l'accompagnait, qui mentionnent que la SCI Monte Grosso relève de l'impôt sur les sociétés constituent une prise de position formelle opposable à l'administration ;

- il fait l'objet d'une double imposition sur les réserves existant au premier jour de l'exercice considéré, à l'impôt sur le revenu et au titre de la plus-value de cession, dont le prix a été déterminé en considération de ces réserves ;

- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées, dès lors qu'il n'a fait que suivre les indications de l'administration et eu égard à son état de santé, qui ne lui a pas permis de préparer dans de bonnes conditions ses déclarations de revenus et de plus-value au titre de l'année 2009.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné Mme Paix, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de Mme Mosser, présidente de la 3ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Courbon,

- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de comptabilité de la société civile immobilière (SCI) Monte Grosso dont il était associé, M. B... a fait l'objet d'un rehaussement de ses bases imposables à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre de l'année 2009, assorti de pénalités, en raison de la remise en cause, par l'administration, du régime d'imposition de la SCI à l'impôt sur les sociétés. M. B... relève appel du jugement du 13 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'imposition auxquels il a ainsi été assujetti.

Sur le bien-fondé de l'imposition en litige :

2. Aux termes de l'article 239 ter du code général des impôts: " I. Les dispositions du 2 de l'article 206 ne sont pas applicables aux sociétés civiles créées après l'entrée en vigueur de la loi n° 64-1278 du 23 décembre 1964 et qui ont pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente, à la condition que ces sociétés ne soient pas constituées sous la forme de sociétés par actions ou à responsabilité limitée et que leurs statuts prévoient la responsabilité indéfinie des associés en ce qui concerne le passif social. Les sociétés civiles visées au premier alinéa sont soumises au même régime que les sociétés en nom collectif effectuant les mêmes opérations ; leurs associés sont imposés dans les mêmes conditions que les membres de ces dernières sociétés. ". Aux termes de l'article 111 bis du même code : " Lorsqu'une personne morale soumise à l'impôt sur les sociétés cesse d'y être assujettie, ses bénéfices et réserves, capitalisés ou non, sont réputés distribués aux associés en proportion de leurs droits. (...) ".

3. Pour remettre en cause le régime d'imposition à l'impôt sur les sociétés de la SCI Monte Grosso, l'administration fiscale s'est fondée sur le fait que cette société a pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente, qu'elle n'est pas constituée sous la forme de société par action ou à responsabilité limitée et que ses statuts prévoient la responsabilité indéfinie des associés concernant le passif social. Ces circonstances faisant effectivement obstacle, en application des dispositions précitées de l'article 239 ter du code général des impôts, à son assujettissement à l'impôt sur les sociétés, c'est à bon droit que l'administration a pu, sur le terrain de la loi fiscale, mettre en oeuvre les dispositions précitées de l'article 111 bis du code général des impôts et imposer ce dernier, au titre de l'année 2009, à partir de laquelle la SCI a cessé d'être imposée à l'impôt sur les sociétés sur la part des bénéfices non distribués correspondant à ses droits dans cette société, et figurant au bilan d'ouverture de l'exercice 2009.

4. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. ". L'article L. 80 B du même code dispose : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi. / Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent 1°, notamment le contenu, le lieu ainsi que les modalités de dépôt de cette demande ; (...) ".

5. M. B... soutient que l'administration aurait formellement pris position sur l'assujettissement de l'activité de la SCI Monte Grosso à l'impôt sur les sociétés dans une lettre, complétée par un " post-it " manuscrit, adressée à cette dernière le 18 août 2006, en réponse à un courrier du 16 décembre 2014. Toutefois, et contrairement à ce qu'allègue le requérant, le courrier adressé au centre des impôts de Bastia le 16 décembre 2014 par la SCI Monte Grosso, qui se borne à solliciter l'envoi de déclarations modèle 2031 au lieu du modèle 2072, ne peut être regardé comme une demande de rescrit, à défaut, d'une part, d'une demande expresse de prise de position et, d'autre part, de " présentation précise, complète et sincère de la situation de fait " telle qu'exigée par les dispositions de l'article R. 80 B-11 du livre des procédures fiscales. Par ailleurs, la correspondance du 18 août 2006 ne constitue pas une réponse à ce courrier, auquel elle ne fait pas référence, mais, comme son intitulé l'indique, une simple " lettre d'accueil ", adressée par l'administration à la suite de la réception d'éléments d'informations sur la SCI de la part du centre de formalités des entreprises, même si elle mentionne le régime d'imposition à l'impôt sur les sociétés. Enfin, s'agissant du " post-it " apposé au bas de la lettre du 18 août 2006, sur lequel figurent le nom et le grade, apposés par tampon, de l'agent des impôts qui a également signé cette lettre, un numéro de téléphone et la mention manuscrite " SCI soumise à l'IS par nos services = 2065 ", ce dument n'identifie pas la société visée par les observations du service et ne précise pas l'année au cours de laquelle il a été écrit. En outre, s'agissant d'un " post-it " volant, rien ne permet de garantir qu'il était bien apposé sur la lettre du 18 août 2006 adressée à la SCI Monte Grosso. Dans ces conditions, ni la lettre du 18 août 2006, ni le " post-it " dont il n'est pas établi qu'il figurait sur cette lettre, ne peuvent être regardés comme une prise de position formelle de l'administration sur l'appréciation de la situation de fait de la SCI Monte Grosso au regard de son régime d'imposition au titre de l'année d'imposition en litige, dont M. B... serait fondé à se prévaloir en application de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.

6. Il résulte de l'instruction que M. B... a également fait l'objet d'une imposition au titre de la plus-value réalisée à l'occasion du rachat, non motivé par des pertes, par la SCI Monte Grosso de ses parts sociales, intervenu par acte du 3 novembre 2009, dans le cadre d'une réduction du capital social. Cette plus-value a été évaluée à 146 920 euros. Si la valeur de rachat des parts a, selon les affirmations du requérant, été déterminée en prenant en compte les réserves de la SCI, au titre desquelles il a été également imposé dans la catégorie des revenus distribués, les deux impositions en litige reposent sur des matières imposables et des faits générateurs distincts ressortissant à deux catégories de revenus. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait fait l'objet d'une double imposition sur ces réserves.

7. Les impositions en litige ayant été légalement établies, ainsi qu'il vient d'être dit ci-dessus, le requérant ne peut utilement invoquer leur caractère inéquitable.

En ce qui concerne les pénalités :

8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré. ".

9. Pour faire application de la pénalité prévue par ces dispositions, l'administration fiscale a relevé, outre l'importance des omissions déclaratives et la qualification professionnelle de M. B..., qu'il ressortait de l'acte notarié du 3 novembre 2009 que le notaire l'avait informé de l'obligation de déclarer les plus-values imposables réalisées, sauf à faire valoir un cas d'exonération, et que tous les actes relatifs à la SCI mentionnaient expressément qu'elle est une société de personnes dont les profits de construction doivent être répartis entre chaque associé au prorata de ses droits. Par ces éléments, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère délibéré du manquement s'agissant de la plus-value de cession réalisée en 2009 par M. B..., qui s'est abstenu de la déclarer et qui ne peut, à cet égard, invoquer la gravité de son état de santé, en elle-même sans incidence sur l'appréciation du caractère délibéré de ce manquement. En revanche, s'agissant des revenus réputés distribués, qui résultent directement de la remise en cause par l'administration, à compter de l'exercice 2009, du régime d'imposition de la SCI Monte Grosso à l'impôt sur les sociétés, M. B... a pu, en toute bonne foi, et dès lors que le résultat de la société avait fait l'objet d'une imposition à l'impôt sur les sociétés, considérer, en dépit des mentions des actes notariés et de sa qualité d'avocat, qu'il n'était pas imposable personnellement à ce titre. Dans ces conditions, l'administration fiscale n'établit pas, pour ce chef de redressement, le caractère délibéré du manquement commis par M. B....

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bastia, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande tendant à la décharge des pénalités pour manquement délibéré dont a été assorti le rehaussement de ses bases imposables à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre de l'année 2009 en matière de revenus distribués.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme en application de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : M. B... est déchargé des pénalités pour manquement délibéré afférentes au rehaussement de ses bases imposables à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales dont il a fait l'objet, au titre de l'année 2009, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

Article 2 : Le jugement n° 1600526 du tribunal administratif de Bastia est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 28 février 2019, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Haïli, premier conseiller,

- Mme Courbon, premier conseiller.

Lu en audience publique le 14 mars 2019.

6

N° 17MA02448


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA02448
Date de la décision : 14/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Audrey COURBON
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : CASTANEA JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2019-03-14;17ma02448 ?
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