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05/03/2019 | FRANCE | N°18MA03871

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 05 mars 2019, 18MA03871


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 12 mai 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a prononcé sa mise à la retraite d'office par mesure disciplinaire ainsi que la décision du 19 août 2016 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1604165 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 août 2018, M. B..., représenté par Me C..., demande à l

a Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 29 juin 2018 ;

2°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 12 mai 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a prononcé sa mise à la retraite d'office par mesure disciplinaire ainsi que la décision du 19 août 2016 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1604165 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 août 2018, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 29 juin 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 mai 2016 par lequel le ministre de l'intérieur lui a infligé la sanction disciplinaire de mise à la retraite d'office ainsi que la décision du 19 août 2016 rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros à verser à son conseil au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

* la compétence du signataire des décisions en litige n'est pas établie ;

* l'arrêté du 12 mai 2016 ne mentionne pas la possibilité d'un recours gracieux ni la juridiction compétente ;

* il ne lui a pas été notifié dans le mois suivant la tenue du conseil de discipline, en méconnaissance du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

* la procédure disciplinaire n'a pas été respectée, en méconnaissance du code de la fonction publique et de la loi de 1984 ; elle méconnaît également le principe de sécurité juridique ;

* l'arrêté du 12 mai 2016 est entaché de détournement de pouvoir ;

* la sanction en litige est disproportionnée ; la note DCRPN n° 3812017 n'a pas été respectée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

* la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

* la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

* le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

* le rapport de Mme Tahiri,

* et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 12 mai 2016, le ministre de l'intérieur a prononcé à l'encontre de M. B..., gardien de la paix, la sanction de mise à la retraite d'office. M. B... fait appel du jugement du 29 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision du 19 août 2016 rejetant son recours gracieux.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'arrêté du 12 mai 2016 :

2. En premier lieu, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 12 mai 2016, d'une mention incomplète des voies et délais de recours ainsi que les moyens tirés du non-respect des délais en matière de procédure disciplinaire doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges. En outre, M. B... ne peut utilement soutenir que les délais au terme desquels a été réuni le conseil de discipline et a été signé et notifié l'arrêté du 12 mai 2016 méconnaissent le principe de sécurité juridique, ce principe s'opposant uniquement à l'instabilité des situations juridiques sans fixer de délai maximum dans le déroulement de la procédure disciplinaire.

3. L'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 prévoit que toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice, ou à l'occasion de l'exercice, de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire. L'article 66 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 dispose par ailleurs que : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe :

- l'avertissement ; - le blâme. Deuxième groupe : - la radiation du tableau d'avancement ;

- l'abaissement d'échelon ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; - le déplacement d'office. Troisième groupe : - la rétrogradation ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. Quatrième groupe : - la mise à la retraite d'office ; - la révocation. (...). ".

4. D'une part, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes, en tenant compte de la manière de servir de l'intéressé et de ses antécédents disciplinaires.

5. D'autre part, en l'absence de disposition législative contraire, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, à laquelle il incombe d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction à un agent public, peut apporter la preuve de ces faits devant le juge administratif par tout moyen.

6. Pour prononcer la mise à la retraite d'office de M. B..., né en 1963 et titularisé dans la police en 1984, le ministre de l'intérieur a retenu que celui-ci, malgré de précédentes sanctions, avait adopté le lundi 2 février 2015 un comportement contraire à ses obligations statutaires et déontologiques, notamment d'exemplarité et de dignité, en présentant des signes manifestes d'ébriété alors qu'il se trouvait en mission de sécurisation et de lutte contre l'immigration clandestine à Calais. Afin d'établir que M. B... était en état d'ébriété alors qu'il se trouvait en service, l'administration verse le rapport établi le 5 février 2015 par son chef de service mentionnant que le 2 février 2015, vers 1h40, lors d'un contrôle des effectifs effectuant la vacation de 1 heure à 7 heures positionnés dans des véhicules de reconnaissance sur des points correspondant à des itinéraires de passage des migrants, le capitaine de police assurant l'encadrement de terrain était alerté par le comportement de l'intéressé qui n'assurait pas sa fonction habituelle de conducteur du véhicule et qui, invité à en descendre, n'y parvenait qu'avec difficulté et présentait les signes d'une personne sous l'emprise de l'alcool, ce que confirmait un dépistage par éthylotest. Raccompagné au commissariat, M. B... était soumis à un contrôle par éthylomètre, révélant un taux d'imprégnation alcoolique de 0,77 milligrammes d'alcool par litre d'air expiré à 2h05 puis 0,76 milligrammes à 2h10. Lors de son audition administrative, l'intéressé reconnaissait avoir consommé la veille, au foyer bar de l'unité, 5 ou 6 cannettes de bière de 25 cl avant la prise du repas méridien, 2 verres de vin blanc pendant le repas, une bière avant le dîner suivie de deux verres de vin pendant le repas. M. B... n'est pas fondé à se prévaloir de la note de service DCRPN n° 3812017, cette note étant dépourvue de caractère réglementaire. La circonstance que l'intéressé n'aurait pas donné librement son consentement en vue de son dépistage alcoolique et que le test n'aurait pas été effectué par des agents de police extérieurs à son unité est également sans influence sur la valeur probante du rapport établi le 5 février 2015 et des mesures d'alcoolémie qu'il retrace et, partant, sur la matérialité des faits, laquelle doit être regardée comme établie. Il ressort en outre des pièces du dossier que M. B... a déjà été sanctionné à plusieurs reprises pour des faits d'intempérance commis hors service avec notamment en 1997 l'infliction d'une sanction du troisième groupe d'exclusion temporaire de fonctions pendant 18 mois dont 16 avec sursis pour conduite sous l'empire d'un état alcoolique et menace de mort à un gendarme durant sa garde à vue, en 2005 d'une sanction du deuxième groupe d'exclusion temporaire de fonction pour une durée de 15 jours pour état d'ivresse publique et manifeste, en 2007 d'une sanction du troisième groupe d'exclusion temporaire de fonction pour une durée de 24 mois dont 21 avec sursis pour avoir provoqué un accident matériel de la circulation sous l'empire d'un état alcoolique. La circonstance qu'il est atteint d'une neuropathie par hypersensibilité à la pression et que son état de santé physique et psychique s'est dégradé en janvier 2015 n'est pas de nature à atténuer la gravité de la faute commise. Par suite, nonobstant l'ancienneté de l'intéressé et les appréciations favorables antérieures sur sa manière de servir, la sanction de mise à la retraite d'office prononcée à son encontre ne présente pas, dans les circonstances de l'espèce, un caractère disproportionné. Pour les mêmes motifs, les décisions en litige ne sont pas davantage entachées de détournement de pouvoir.

7. Enfin, dès lors que le ministre de l'intérieur n'a pas eu à se prononcer au vu de circonstances de fait ou de droit nouvelles et que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision initiale du 12 mai 2016, ses conclusions tendant à l'annulation de la décision rejetant son recours gracieux doivent être également rejetées, sans qu'il puisse utilement se prévaloir des vices propres, au nombre desquels figure l'incompétence de son signataire, dont cette seconde décision serait entachée.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de M. B..., partie perdante à l'instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 5 février 2019, où siégeaient :

* M. Gonzales, président,

* M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

* Mme Tahiri, premier conseiller.

Lu en audience publique le 5 mars 2019.

N° 18MA03871 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA03871
Date de la décision : 05/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09 Fonctionnaires et agents publics. Discipline.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Samira TAHIRI
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : FARRUGIA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-03-05;18ma03871 ?
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