La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/02/2019 | FRANCE | N°18MA03586

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 28 février 2019, 18MA03586


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2017, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n° 1802181 du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enre

gistrée le 26 juillet 2018, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2017, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n° 1802181 du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2018, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 juillet 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous une astreinte de 150 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire de procéder à une nouvelle instruction de sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous une astreinte de 150 euros par jour de retard, et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à son conseil qui renonce dans ce cas à percevoir la part contributive de l'Etat due au titre de l'aide juridictionnelle ;

Elle soutient que :

- le refus de séjour est insuffisamment motivé au regard de la loi du 11 juillet 1979 ;

- il a été pris à la suite d'une procédure irrégulière, à défaut de saisine de la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnait l'article 6-1 alinéa 1 de l'accord franco-algérien ;

- il méconnait également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée au regard de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;

- elle est illégale, par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour ;

- elle méconnait également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus d'accorder un délai d'exécution de la mesure d'éloignement supérieur à trente jours est insuffisamment motivé en fait et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit d'observations en défense.

La demande d'aide juridictionnelle déposée par Mme C... a été rejetée par décision du 26 octobre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Gougot a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 4 octobre 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de titre de séjour que lui avait présentée le 10 mars 2017 Mme C..., ressortissante algérienne, sur le fondement de sa vie privée et familiale et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Mme C...interjette appel du jugement du 5 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule: " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... entretient une relation avec un compatriote titulaire d'une carte de résident algérien, qu'ils ont eu ensemble un enfant né le 2 septembre 2014 et que l'intéressée attendait leur second enfant à la date de l'arrêté attaqué. Eu égard à la stabilité et à l'ancienneté de cette union, la requérante est fondée à soutenir que le refus de séjour a porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au regard des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En conséquence, l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 4 octobre 2017 et le jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 juillet 2018 doivent être annulés.

Sur les conclusions en injonction :

4. Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative: " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ". Aux termes de l'article L. 911-3: " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. ".

5. Eu égard aux motifs du présent arrêt, son exécution entraîne nécessairement la délivrance à l'intéressée d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à Mme C... ce titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 juillet 2018 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 4 octobre 2017 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à Mme C... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et suivant les modalités précisées dans les motifs sus indiqués.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à Mme C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille.

Délibéré après l'audience du 14 février 2019, où siégeaient :

- M. Poujade, président,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme Gougot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 février 2019.

N° 18MA03586 2

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA03586
Date de la décision : 28/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : BRACCINI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-02-28;18ma03586 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award