Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 à 2011.
Par un jugement n° 1506559 du 12 décembre 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 10 février 2017 et le 3 septembre 2018, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 décembre 2016 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des frais liés au litige.
Elle soutient que :
- les éléments constitutifs d'une opposition à contrôle fiscal n'étaient pas réunis ;
- elle peut se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales de la doctrine référencée BOI-CF-IOR-40 du 12 septembre 2012 ;
- contrairement à ce que soutient l'administration fiscale, elle établit avoir transféré son activité et cédé sa clientèle du département de l'Aude, en fin d'année 2011, pour s'établir dans les Landes ;
- les circonstances particulières de sa situation, et notamment son état de santé et ses charges de famille, n'ont pas été prises en considération ;
- les dispositions de l'article L. 45-0A du livre des procédures fiscales permettaient aux services fiscaux de son nouveau lieu de résidence de procéder au contrôle, les fonctionnaires des deux départements de l'Aude et des Landes étant concurremment compétents ;
- la proposition de rectification n'est pas motivée sur le point de savoir pourquoi la vérification de comptabilité ne pouvait avoir lieu dans les Landes.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour de rejeter la requête de Mme C....
Il soutient que les moyens invoqués par Mme C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Paix,
- les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., substituant Me A..., pour Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... relève appel du jugement du 12 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande de décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les revenus auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 à 2011.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. D'une part, l'article 11 du code général des impôts prévoit que : " Lorsqu'un contribuable a déplacé soit sa résidence, soit le lieu de son principal établissement, les cotisations dont il est redevable au titre de l'impôt sur le revenu, tant pour l'année au cours de laquelle s'est produit le changement que pour les années antérieures non atteintes par la prescription, peuvent valablement être établies au lieu d'imposition qui correspond à sa nouvelle situation. ". Et l'article L. 45-0 A du livre de procédures fiscales prévoit que : " Sans préjudice des dispositions de l'article 11 du code général des impôts, lorsque le lieu de déclaration ou d'imposition d'un contribuable a été ou aurait dû être modifié, les agents des impôts compétents à l'issue de ce changement peuvent également assurer l'assiette et le contrôle de l'ensemble des impôts ou taxes non atteints par la prescription. ".
3. D'autre part, l'article L. 13 du livre des procédures fiscales prévoit que : " I. Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables (...) " et l'article L. 74 du même livre : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers. (...) ".
4. Mme C..., qui exerçait l'activité de mandataire en assurances à Leucate dans le département de l'Aude depuis 2007, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité de son activité professionnelle, dont elle a été avisée le 11 juin 2012, par un courrier dont elle a accusé réception le 16 juin suivant. L'intéressée a alors informé l'administration fiscale, par lettre du 19 juin 2012, qu'ayant déménagé dans les Landes, elle ne pourrait être présente le 27 juin sur le lieu de son ancienne activité professionnelle. La vérificatrice, après avoir adressé un courrier le 22 juin 2012 à Mme C... que celle-ci n'a pas retiré, lui a adressé une première mise en garde le 20 juillet 2012 retirée par la contribuable le 30 juillet suivant, lui fixant une entrevue au 16 août, par laquelle elle l'a informée que la vérification devait se dérouler dans le département de l'Aude, qu'elle avait la possibilité de se faire représenter, et que son absence serait susceptible d'être considérée comme une opposition à contrôle fiscal. En réponse, Mme C... a, par lettre du 1er août suivant, fait part de son impossibilité de se rendre au nouveau rendez-vous proposé, compte tenu de ce qu'elle était en charge de deux jeunes enfants, exposé la raison pour laquelle elle n'avait pas retiré le précédent courrier de l'administration fiscale, et demandé le transfert de son dossier au centre des impôts de Mont-de-Marsan (Landes). Entre temps, Mme C..., avait informé le 3 juillet 2012, l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Mont-de-Marsan de son transfert dans ce département avec effet rétroactif au 1er novembre 2011, et, le 13 août 2012, le service des impôts des entreprises de Mont-de-Marsan avait donné acte à Mme C... de son transfert d'activité professionnelle et l'avait informée de sa compétence. Par une seconde mise en garde, adressée le 27 août 2012 en réponse à la lettre de la contribuable du 1er août, la vérificatrice a informé Mme C... que le changement d'adresse n'ayant pas été fait avant le début de la vérification de comptabilité, le contrôle devait se dérouler dans l'Aude et qu'à défaut de se présenter le 7 septembre suivant, elle serait considérée comme en situation d'opposition à contrôle fiscal.
5. Il résulte du déroulement des faits tel qu'exposé ci-dessus que si Mme C... n'a informé que tardivement l'administration fiscale de son transfert d'activité professionnelle, elle ne s'est pas opposée au déroulement du contrôle fiscal, qui n'a pas été rendu impossible par son attitude hostile ou dilatoire. En application de l'article L. 45-0 A du livre de procédures fiscales, les agents des services des impôts de Mont-de-Marsan étaient compétents concurremment avec ceux de l'Aude pour assurer la vérification de comptabilité de l'activité professionnelle de la contribuable. Celle-ci a proposé le 1er août 2012 que le contrôle se déroule dans les Landes, ce qui était possible contrairement à ce qu'a répondu la vérificatrice dans son courrier du 27 août 2012. Par ailleurs, Mme C... avait informé l'administration fiscale de ses problèmes familiaux, car elle assumait seule la charge de deux enfants en bas âge, et de son état de santé, qui a, par la suite, nécessité son hospitalisation le 22 septembre 2012 puis au cours du dernier semestre 2012. Dans ces conditions, le refus de se rendre aux rendez-vous proposés par la vérificatrice et le défaut de mandat donné à un conseil pour la représenter ne suffisent pas à considérer que le contrôle a été rendu impossible du fait de son attitude. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que les impositions qui lui ont été réclamées, suivant la procédure d'opposition à contrôle fiscal, au titre de ses bénéfices non commerciaux, l'ont été suivant une procédure irrégulière, et, par voie de conséquence, à en demander la décharge.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande de décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 à 2011.
Sur les frais liés au litige :
7. Aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Il est accordé à Mme C... la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 à 2011.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 3 : L'Etat versera à Mme C... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2019, où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente,
- Mme Paix, présidente assesseure,
- M. Haïli, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 février 2019.
N°17MA00566 5