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04/02/2019 | FRANCE | N°17MA01604

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 04 février 2019, 17MA01604


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Objectif Résidence Sud Corse a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler une décision du 29 avril 2015 par laquelle le ministre de la défense a refusé de faire usage de ses pouvoirs de police afin de rétablir la circulation sur le chemin militaire d'accès de la casemate de Santa Giulia.

Par un jugement n° 1500997 du 23 février 2017, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 avril 2017,

sous le n° 17MA01604, complétée par un mémoire enregistré le 2 janvier 2019, la SARL Objectif...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Objectif Résidence Sud Corse a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler une décision du 29 avril 2015 par laquelle le ministre de la défense a refusé de faire usage de ses pouvoirs de police afin de rétablir la circulation sur le chemin militaire d'accès de la casemate de Santa Giulia.

Par un jugement n° 1500997 du 23 février 2017, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 avril 2017, sous le n° 17MA01604, complétée par un mémoire enregistré le 2 janvier 2019, la SARL Objectif Résidence Sud Corse, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 février 2017 du tribunal administratif de Bastia ;

2°) d'annuler la décision du 29 avril 2015 ;

3°) d'ordonner au ministre de la défense de faire usage de ses pouvoirs de police de la conservation du domaine public militaire afin de rétablir la circulation sur le chemin militaire d'accès de la casemate de Santa Giulia ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le mémoire en défense devra être écarté en l'absence de preuve de délégation du ministre ;

- au surplus, les dispositions de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative ont été méconnues ;

- les juges de première instance ont jugé à tort qu'il existait un motif d'intérêt général de nature à justifier le non-usage des pouvoirs de police du ministre de la défense.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2018, le ministre des armées conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la SARL Objectif Résidence Sud Corse la somme de 3 000 euros ramenée à 2 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la juridiction administrative est incompétente pour connaître de ce litige relatif à la gestion du domaine public de l'Etat ;

- la décision du 29 avril 2015 ne dispose pas d'un caractère décisoire et la requête est donc irrecevable ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne lui donnant compétence pour exercer un pouvoir de police sur ce chemin appartenant au domaine privé de l'Etat, l'autorité militaire était en situation de compétence liée pour rejeter la demande qui lui été adressée.

Le mémoire du ministre des armées, enregistré le 17 janvier 2019, n'a pas été communiqué.

Une note en délibéré produite par la SARL Objectif Résidence Sud Corse a été enregistrée le 21 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de la défense ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marcovici,

- les conclusions de M. Revert, rapporteur public .

- et les observations de Me A...représentant la SARL Objectif Résidence Sud Corse.

Considérant ce qui suit :

1. Le 9 mars 2015, la SARL Objectif Résidence Sud Corse, qui exploite une résidence hôtelière dénommée " Résidence Santa Giulia Palace ", située sur le territoire de la commune de Porto-Vecchio, a demandé au ministre de la défense de faire usage de ses pouvoirs de police afin de rétablir la circulation sur le chemin militaire d'accès à la casemate de Santa Giulia. Le 29 avril 2015, le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande. La SARL fait appel du jugement n° 1500997 du 23 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.

Sur les mémoires en défense du ministère :

2. D'une part, aux termes de l'article 2 d'une décision du 5 octobre 2018, publiée au Journal officiel du 7 octobre 2018, et accessible aux parties comme au juge, Mme C... B... a reçu délégation " à l'effet de signer, au nom du ministre, tous actes, décisions, correspondances courantes, recours et mémoires devant les juridictions ... ". La signataire était donc compétente. D'autre part, conformément aux dispositions de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative, le ministre de la défense a transmis un fichier unique comprenant plusieurs pièces à l'appui de son mémoire, chacune des pièces étant référencées par le biais d'un signet dont l'intitulé est conforme au bordereau de pièces. Il s'ensuit qu'il y a lieu de rejeter la demande de la SARL Objectif Résidence Sud Corse tendant à ce que le mémoire enregistré le 7 décembre 2018 soit écarté des débats. Par ailleurs, le mémoire du ministre du 17 janvier 2019 n'a pas été communiqué, dès lors qu'il ne contenait aucun élément utile à la décision de la Cour.

Sur la compétence de la juridiction administrative :

3. Il résulte de l'instruction que l'acte du 21 juin 2001 a procédé au déclassement de la parcelle section AX n° 3 supportant la casemate de Santa Giulia, déclassant ainsi " le domaine public (...) devenu inutile aux besoins des armées ". La superficie totale mentionnée est de 6 778 m2, laquelle doit être regardée comme comprenant le chemin militaire d'accès à la casemate qui est, par ailleurs, également devenu inutile aux besoins des armées. Ainsi, l'ensemble, composé de la casemate et du chemin militaire d'accès, a été déclassé par l'acte du 21 juin 2001 et appartient, désormais, au domaine privé de l'Etat.

4. Il résulte de l'instruction que le litige trouve son origine dans le refus opposé par le ministre de la défense à faire usage de son pouvoir de police afin de rétablir l'assiette d'un chemin dont il est propriétaire sur la commune de Porto-Vecchio. Il s'ensuit que l'objet du litige se détachant de la gestion du domaine privé du ministère des armées, dont fait partie le chemin concerné, et mettant en cause l'inexécution par le ministre de sa mission d'intérêt public de maintenir l'assiette d'une voie qui a été partiellement abandonnée aux riverains, la juridiction administrative demeure compétente pour connaître de ce litige.

Sur le fond :

5. Aux termes de l'article L. 2221-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Ainsi que le prévoient les dispositions du second alinéa de l'article 537 du code civil, les personnes publiques mentionnées à l'article L. 1 gèrent librement leur domaine privé selon les règles qui leur sont applicables. ".

6. Il ressort des pièces du dossier que l'emprise du chemin militaire d'accès à la casemate a fait l'objet d'une appropriation par des tiers. Comme l'a relevé le tribunal, le chemin en cause n'a jamais eu pour objet la desserte de la baie de Santa Giulia mais uniquement celle de l'installation militaire, aujourd'hui désaffectée. Le ministre soutient, sans être contredit, que 1'accès à la plage de Santa Giulia est possible par d'autres chemins. La décision attaquée est motivée par un motif d'intérêt général, tiré de l'incertitude de l'emprise du chemin militaire originel, qui aurait été approprié de longue date par des propriétaires privés et aurait été remplacé par un autre chemin, et d'une procédure en cours de cession de l'ensemble du site de la casemate, alors même il est vrai, que cette procédure ne paraît pas être en voie d'achèvement. Le ministre exprime, par ailleurs, sa volonté de lever les incertitudes tenant à la délimitation de ce chemin, en procédant à des opérations de bornage du chemin. Ainsi, et compte tenu de l'ensemble de ces considérations, le ministre n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation en refusant de faire droit à la demande de la SARL Objectif Résidence Sud Corse.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Objectif Résidence Sud Corse n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 avril 2015 du ministre de la défense.

Sur les frais liés au litige :

8. L'Etat n'ayant pas la qualité de partie perdante à la présente instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la SARL Objectif Résidence Sud Corse fondées sur ces dispositions. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Objectif Résidence Sud Corse une somme à ce titre.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Objectif Résidence Sud Corse est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'Etat tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Objectif Résidence Sud Corse et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2019, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- M. Pecchioli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 février 2019.

2

N° 17MA01604


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA01604
Date de la décision : 04/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Domaine - Domaine public - Protection du domaine.

Police - Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : SELARL PERES PIERRE-ANTOINE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-02-04;17ma01604 ?
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