Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 11 août 2017 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 1704394 du 26 décembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2018, M. D..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 26 décembre 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 11 août 2017 du préfet de l'Hérault ;
3°) en cas d'annulation de la décision du refus de titre de séjour, d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire, d'enjoindre audit préfet de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois, sous les mêmes conditions d'astreinte ;
4°) en cas d'annulation de la mesure d'éloignement ou de la décision désignant le pays de destination, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement contesté est entaché d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision de refus de titre de séjour a été signée par une autorité incompétente ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas saisi la commission du titre de séjour en violation des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision est irrégulière, à défaut de respect de la procédure contradictoire, en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- elle méconnaît les stipulations des articles 6-2 et 6-4 de l'accord franco-algérien ;
- elle méconnaît l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- cette décision a été signée par une autorité incompétente ;
- elle est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle méconnaît l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juin 2018, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
La clôture de l'instruction a été reportée au 4 juillet 2018 par ordonnance du 6 juin 2018.
M. D... a produit un nouveau mémoire le 21 décembre 2018, qui n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
La président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Courbon.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant algérien, a sollicité le 6 mars 2017 la délivrance d'un titre de séjour. Il relève appel du jugement du 26 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 août 2017 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Sur la régularité du jugement contesté :
2. Les prétendues erreurs de droit et d'appréciation au regard de l'articles 6 de l'accord franco-algérien et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'auraient commises les premiers juges relèvent de l'analyse du bien-fondé de leur décision, et non de sa régularité. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le jugement du 26 décembre 2017 serait entaché d'irrégularité.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
3. La décision contestée a été signée par M. A... C..., sous-préfet hors classe, nommé secrétaire général de la préfecture de l'Hérault par décret du 31 octobre 2016, qui a reçu délégation de signature du préfet de l'Hérault, par arrêté du 3 novembre 2016 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture à l'effet de signer notamment tous les actes administratifs et correspondances relatifs au séjour et à la police des étrangers en France. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.
4. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1°) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...). ". Aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
5. La décision contestée, qui vise notamment l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et fait état des éléments relatifs à la situation personnelle et familiale du requérant, comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle est ainsi suffisamment motivée.
6. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ".
7. M. D..., qui invoque l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, abrogé depuis le 1er janvier 2016, doit être regardé comme se prévalant des articles L. 121-1 et L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, la procédure contradictoire prévue par ces dispositions n'est pas applicable aux décisions statuant sur une demande, ce qui est le cas en l'espèce, s'agissant du rejet d'une demande de titre de séjour en qualité de parent d'enfant français.
8. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...)2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, àcondition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit
préalablement sur les registres de l'état civil français (...) 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an. / (...) ".
9. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a reconnu, le 2 janvier 2017, une enfant de nationalité française, Kataleya, née le 29 décembre 2016. Cette enfant ayant été reconnue postérieurement à sa naissance, la délivrance du certificat de résidence prévu par les dispositions précitées est subordonnée à la condition qu'il subvienne à ses besoins depuis sa naissance. A cet égard, si M. D... justifie avoir versé à la mère de l'enfant, avec laquelle il n'a jamais vécu, une somme de 100 euros par mois entre janvier et avril 2017, les versements ont ensuite cessé, sans qu'il justifie ne plus être en capacité d'émettre des mandats du fait de la péremption de son passeport. Il a par ailleurs indiqué, lors de l'enquête administrative diligentée par le préfet en juillet 2017, ne voir qu'occasionnellement son enfant et ne pas verser de pension alimentaire, contredisant ainsi les déclarations de celle-ci au cours de cette même enquête et la teneur de l'attestation non datée et peu circonstanciée qu'elle a établie, aux termes de laquelle M. D... aurait continué à lui verser la somme de 100 euros par mois en espèces. Dans ces conditions, le requérant, qui n'établit pas subvenir effectivement aux besoins de son enfant, âgée de sept mois à la date de la décision contestée, n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, le préfet de l'Hérault aurait méconnu les stipulations du 4) de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Il ne peut pas par ailleurs se prévaloir du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, sur le fondement duquel il n'a pas sollicité de certificat de résidence.
10. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
11. M. D..., qui vit en France depuis seulement trois ans et demi à la date de la décision contestée, est séparé de son épouse de nationalité française, ainsi que de la mère de son enfant. S'il se prévaut de la présence de sa fille sur le territoire national, il ne vit pas avec elle et ne justifie pas subvenir effectivement à ses besoins. Il ne démontre pas davantage une insertion professionnelle en France par la seule production d'une promesse d'embauche et n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Algérie, où il a vécu jusqu'à l'âge vingt-six ans et où résident ses parents et ses quatre soeurs. Dans ces conditions, eu égard notamment à la durée et aux conditions du séjour en France de M. D..., la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des articles 6-5 de l'accord franco-algérien et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.
12. Aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) ".
13. Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3, ou aux articles équivalents de l'accord franco-algérien, et auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Pour les motifs indiqués ci-dessus, M. D... ne remplit pas les conditions de délivrance de plein droit d'un titre de séjour. Le préfet de l'Hérault n'était donc pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure à raison du défaut de saisine de cette commission préalablement à l'édiction de la décision contestée ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
14. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 ci-dessus, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
15. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) ".
16. Il résulte de ces dispositions que lorsque l'obligation de quitter le territoire fait suite à une décision de refus de titre de séjour, comme c'est le cas en l'espèce, sa motivation se confond avec celle du refus de titre de séjour. Dans ces conditions, et dès lors qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5 ci-dessus que la décision refusant un titre de séjour à M. D... comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui la fondent, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire serait insuffisamment motivée doit être écarté.
17. La décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
18. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 11 ci-dessus, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que celui tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, doivent être écartés.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
19. Il résulte de ce qui a été exposé aux points précédents que M. D... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement.
20. Les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont inopérants à l'encontre de la décision désignant le pays de renvoi.
21. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a, par le jugement attaqué, rejeté sa requête tendant l'annulation de l'arrêté du 11 août 2017 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2019, où siégeaient :
- Mme Mosser, présidente,
- M. Haïli, premier conseiller,
- Mme Courbon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 janvier 2019.
N° 18MA00437 7