Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 21 juin 2017 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par un jugement n° 1702190 du 3 octobre 2017, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 18 octobre 2017, Mme B... C..., représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 juin 2017 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;
3°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
Sur la décision de refus de séjour :
- la commission du titre de séjour n'a pas été consultée ;
- la décision est entachée d'une erreur de droit sur la portée de sa demande ;
- elle réside habituellement en France depuis dix ans au moins ;
- les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;
- les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code précité ont également été méconnues, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :
- les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code précité ont été méconnues, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur l'interdiction de retour :
- le préfet ne justifie pas d'une menace à l'ordre public.
Par un mémoire enregistré le 16 février 2018, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. d'Izarn de Villefort pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Coutel a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 1er décembre 2014, le préfet du Gard a rejeté la demande de titre de séjour de Mme C..., de nationalité brésilienne, et l'a obligée à quitter le territoire français. L'intéressée, qui a exécuté cette mesure d'éloignement avant de revenir en France, a de nouveau fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise le 5 avril 2016 par le préfet de l'Ain. Après avoir exécuté cette dernière décision, l'intéressée a sollicité la délivrance d'un titre de séjour au cours du mois de juillet 2016. Par un arrêté du 21 juin 2017, le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Mme C... a demandé l'annulation de cet arrêté. Le tribunal administratif, par le jugement dont il est fait appel, a rejeté sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
2. Ainsi qu'elle le soutient, il ressort des pièces du dossier que Mme C... a présenté le 5 juillet 2016 une demande d'admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort cependant des mentions de la décision en litige que le préfet du Gard s'est livré à une appréciation précise de la vie privée et familiale de la requérante, en analysant notamment tant les liens qu'elle aurait développés en France que la persistance des liens avec son pays d'origine. L'administration s'est ainsi livrée à une appréciation des droits de Mme C... au respect de sa vie familiale et privée, conforme aux exigences tant des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que des dispositions du 7°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'ensuit que, pour malencontreuse que soit la mention relative à une demande d'admission exceptionnelle, le moyen tiré de ce que l'administration se serait mépris sur la portée de la demande ne peut qu'être écarté.
3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
4. Si Mme C... soutient qu'elle réside au domicile de sa soeur en compagnie de ses deux enfants respectivement nés en 2003 et en 2017 en France, qu'elle a participé activement à l'éducation de l'enfant de sa soeur tout en suivant une formation, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée, qui est âgée de trente-six ans à la date de la décision attaquée, et dont le séjour en France a été précédemment interrompue à deux reprises par l'exécution de mesures d'éloignement, n'établit pas, alors même que ses grands-parents seraient décédés au Brésil, qu'elle a fixé le centre de ses intérêts privés et familiaux en France de telle sorte que sa vie familiale ne pourrait se reconstituer dans son pays d'origine.
Il s'ensuit qu'en prenant la décision de refus de séjour en litige, le préfet du Gard n'a pas porté une atteinte disproportionnée au respect de la vie familiale et privée de Mme C.... Ainsi, tant les dispositions du 7) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues.
5. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) ".
6. Si Mme C... soutient qu'elle réside en France depuis le mois de juin 2007, sans le démontrer, et s'est vu confier la garde de son fils né en 2003 au Brésil en vertu d'une décision d'une juridiction des affaires familiales brésilienne en date du 2 octobre 2015 homologuant un accord parental, qui a reçu exequatur par jugement du tribunal de grande instance de Nîmes du 7 juin 2017, ces éléments ne constituent pas, en tout état de cause, des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. Aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) ".
8. Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 notamment et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Dès lors que la requérante ne justifie pas de l'attribution d'un titre de plein droit sur ce fondement, l'administration n'était pas tenue de consulter la commission du titre de séjour sur ce fondement.
9. Aux termes de l'article L. 313-14 du code précité : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. ".
10. Mme C... se borne à alléguer qu'elle réside habituellement en France depuis 2007 mais n'apporte, au soutien de ces allégations, que des avis d'imposition qui font mention d'aucun revenu et des immatriculations à l'assurance maladie voire à l'aide médicale d'Etat, ces documents ne présentant pas un caractère de continuité sur la période en cause. En tout état de cause, l'intéressée, ainsi qu'elle le soutient, a exécuté les mesures d'éloignement antérieures en juillet 2015 et en avril 2016. Au vu de ces éléments, les attestations de présence, rédigées en termes imprécis, ne sont pas de nature à établir la présence habituelle de la requérante depuis 2007. Il s'ensuit que le préfet du Gard n'était pas davantage tenu de consulter la commission du titre de séjour en application des dispositions citées de l'article L. 313-14 du code.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
11. Compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision portant obligation de quitter le territoire, du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour sera écarté.
12. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 4.
13. Enfin, au regard de l'ensemble des motifs précédemment retenus, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prenant la décision d'obligation de quitter le territoire en litige, le préfet du Gard aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de
MmeC....
En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour :
14. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti (...). / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence des cas prévus au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
15. Il est constant que Mme C...s'est maintenue irrégulièrement en France en dépit des deux précédentes mesures d'éloignement. Eu égard au motif retenu au point 4, alors même que l'intéressée ne constituerait pas une menace pour l'ordre public, c'est sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation que le préfet du Gard a prononcé à l'encontre de l'intéressée une interdiction de retour d'une durée de deux ans.
16. Il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à se plaindre du rejet par le tribunal administratif de Nîmes de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 juin 2017 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction assorties d'une astreinte ainsi que ses conclusions présentées à fin d'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
Délibéré après l'audience du 8 janvier 2019, où siégeaient :
- M. d'Izarn de Villefort, président,
- M. Jorda, premier conseiller,
- M. Coutel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 janvier 2019.
N° 17MA04106 2