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28/12/2018 | FRANCE | N°18MA01122

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 28 décembre 2018, 18MA01122


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2017 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1703481 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requêt

e, enregistrée le 9 mars 2018, Mme D..., représentée par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2017 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1703481 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2018, Mme D..., représentée par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 février 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2017 du préfet du Gard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- cet arrêté méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 août 2018, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Coutier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., de nationalité libanaise, relève appel du jugement du 6 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 octobre 2017 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ". L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Enfin, L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dernières dispositions prévoit que " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

4. Par un avis rendu le 12 juillet 2017 dans le cadre de l'instruction de la demande d'admission au séjour présentée par Mme D... sur le fondement des dispositions citées au point précédent, le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration désigné a estimé que l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale, que le défaut de prise en charge était susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle pouvait bénéficier d'un traitement approprié et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers ce pays.

5. En se bornant à produire dans l'instance, au soutien de son allégation selon laquelle elle ne pourrait être correctement prise en charge par le système de santé au Liban, une courte publication qui fait état, de manière très générale sans mention particulière des pathologies dont elle est affectée, de ce que les soins médicaux dans ce pays sont chers et inaccessibles pour une grande partie de la population, Mme D... ne contredit pas sérieusement l'avis précité rendu par le collège de médecins ni les éléments apportés par le préfet dans ses écritures en défense devant la Cour, soit la fiche pays issue de la banque de données médicales MedCOI et la liste des médicaments commercialisés au Liban. Il y a lieu, par suite, d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Mme D... est entrée en France le 26 janvier 2014 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa Schengen d'une durée de validité de 90 jours. La carte de séjour temporaire qui lui a été délivrée en qualité d'étranger malade, valable jusqu'au 27 avril 2017, ne lui donnait aucun droit à séjourner durablement en France. Elle ne démontre pas, en se bornant à affirmer que son fils qui réside en France et qui a la nationalité française subvient à ces besoins et est sa seule véritable attache, l'ancienneté et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France et n'établit pas, par la seule production d'une correspondance de celui de ses fils qui résidait au Liban lorsqu'elle est elle-même entrée en France à l'adresse de son frère dans laquelle il l'informe de son intention de s'installer en Turquie, qu'elle serait totalement dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de soixante-sept ans. Dans ces conditions, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté contesté, au regard des buts poursuivis par l'administration, aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Par suite, cet arrêté ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme B..., première conseillère,

- M. Coutier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 décembre 2018.

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N° 18MA01122

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA01122
Date de la décision : 28/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. GUIDAL
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : ABESSOLO

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-28;18ma01122 ?
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