Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F...A...a demandé au tribunal administratif de Toulon :
- de dire et juger qu'il aurait dû bénéficier pour son avancement d'une bonification d'ancienneté de deux mois par année de service conformément à l'article 2 du décret n° 95-313 du 21 mars 1995 modifié par le décret n° 2001-48 du 16 janvier 2001,
- de condamner la société Orange à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation des préjudices matériels et moraux qu'il estime avoir subis au cours des années 1995 à 2015,
- et d'enjoindre à la société Orange de le repositionner à l'indice brut 576 à compter du 1er mars 1995 et de lui appliquer le dispositif d'avancement de carrière prévu à l'article 2 du décret n° 95-313 du 21 mars 1995 modifié par le décret n° 2001-48 du 16 janvier 2001.
Par un jugement n° 1500979 du 2 mars 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 14 mars 2017, et un mémoire, enregistré le 14 juin 2018, M.A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 2 mars 2017 du tribunal administratif de Toulon ;
2°) de dire et juger qu'il aurait dû bénéficier pour son avancement d'une bonification d'ancienneté de deux mois par année de service conformément à l'article 2 du décret n° 95-313 du 21 mars 1995 modifié par le décret n° 2001-48 du 16 janvier 2001 ;
3°) de condamner la société Orange à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation des préjudices matériels et moraux qu'il estime avoir subis au cours des années 1995 à 2015 ;
4°) d'enjoindre à la société Orange de le repositionner à l'indice brut 576 à compter du 1er mars 1995 et de lui appliquer le dispositif d'avancement de carrière prévu à l'article 2 du décret n° 95-313 du 21 mars 1995 modifié par le décret n° 2001-48 du 16 janvier 2001 sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du présent arrêt ;
5°) de mettre à la charge de la société Orange la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal administratif a considéré à tort que son lieu d'affectation n'était pas situé dans le périmètre de la zone sensible ;
- la restriction géographique opérée par les premiers juges est contraire à la lettre du décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ;
- le jugement est insuffisamment motivé quant à l'absence de fondement juridique énoncé dans son considérant n° 5 ;
- les conditions d'attribution de l'avantage spécifique d'ancienneté fixées par le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 modifié par le décret n° 2001-48 du 16 janvier 2001 sont réunies dès lors que l'adresse de son lieu de travail est incluse dans la zone urbaine sensible de Toulon Sainte-Musse laquelle est expressément énumérée par le décret n° 96-1156 du 26 décembre 1996 ;
- le site de Toulon Sainte-Musse n'est accessible que par la rue Henri-Sainte-Claire Deville qui constitue par ailleurs l'adresse du site ;
- le quartier de Sainte-Musse est en proie à de nombreuses incivilités, agressions et autres violences urbaines ;
- en lui refusant le bénéfice de l'avantage en litige, la société Orange a porté atteinte au principe d'égalité entre les fonctionnaires d'un même corps d'emploi ;
- il est de fait victime d'une inégalité de traitement par rapport à d'autres agents fonctionnaires placés dans une situation identique ;
- il est victime d'une discrimination relative à son appartenance syndicale ;
- il est fondé à solliciter une indemnisation de 10 000 euros au titre des préjudices matériel et moral qu'il a subis.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 31 mai et 10 juillet 2018, la société Orange, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A...une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le site de ses services, en ce compris ses bâtiments et parking, se situe en dehors de la zone urbaine sensible ;
- la situation de l'intéressé n'entre pas dans le champ d'application du décret n° 2001-48 du 16 janvier 2001 ;
- le moyen tiré de la violation du principe d'égalité n'est pas opérant ;
- les préjudices allégués par l'appelant ne sont pas établis.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 ;
- le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ;
- le décret n° 96-1156 du 26 décembre 1996 ;
- l'arrêté du 11 décembre 1996 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Slimani,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- les observations de MeB..., représentant M.A...,
- et les observations de MeD..., représentant la société Orange.
1. Considérant que M.A..., agent d'exploitation sur le site de Toulon Sainte-Musse sis rue Henri Sainte-Claire Deville, relève appel du jugement rendu le 2 mars 2017 par le tribunal administratif de Toulon qui a rejeté ses conclusions à fin de condamnation de la société Orange, laquelle a refusé de lui accorder le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté prévu par le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 en raison de son affectation sur un site situé dans une zone urbaine sensible, ainsi que ses conclusions à fin d'injonction ;
Sur la régularité du jugement attaqué:
2. Considérant que le principe d'égalité appliqué au traitement de la situation des agents d'un même corps implique que l'administration ne traite pas différemment des agents sauf si cette différence de traitement est justifiée par une différence de situation entre les intéressés ou s'il existe un motif d'intérêt général en rapport avec la mesure ; que si M. A...soutient que le tribunal administratif n'a pas précisé le fondement juridique sur lequel il s'est fondé pour écarter le moyen tiré de l'égalité de traitement des fonctionnaires, le tribunal a toutefois indiqué que le refus d'attribution d'un avantage illégal ne permet pas de caractériser la discrimination alléguée ; que, par suite, le jugement attaqué est, à cet égard, suffisamment motivé ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 portant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " Les fonctionnaires de l'Etat et les militaires de la gendarmerie affectés pendant une durée fixée par décret en Conseil d'Etat dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, ont droit, pour le calcul de l'ancienneté requise au titre de l'avancement d'échelon, à un avantage spécifique d'ancienneté dans des conditions fixées par ce même décret " ; qu'en application de cette disposition, l'article 1er du décret du 21 mars 1995 a prévu que " les quartiers urbains où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, mentionnés (...) à l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 susvisée, doivent correspondre ", s'agissant des fonctionnaires civils de l'Etat, autres que les fonctionnaires de police et les fonctionnaires de l'éducation nationale, " à des secteurs déterminés par arrêté conjoint du ministre chargé de la ville, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget " ; que l'arrêté interministériel du 11 décembre 1996 renvoie, à cet effet aux " grands ensembles et (...) quartiers d'habitat dégradé mentionnés au I de l'article 1466 A du code général des impôts " ; qu'enfin, le décret du 26 décembre 1996 fixe la liste de ces grands ensembles et quartiers d'habitat dégradés parmi lesquels, dans le département du Var, le quartier dit Sainte-Musse à Toulon ;
4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., agent d'exploitation stagiaire du service des lignes de France Telecom, devenu depuis société Orange, a été affecté à la direction opérationnelle Provence-Alpes sur le site de Toulon Sainte-Musse sis rue Henri Sainte-Claire Deville avant d'être titularisé le 25 juillet 1997 ; qu'il ressort des documents réglementaires délimitant la zone urbaine sensible correspondant au quartier Sainte-Musse ainsi que des pièces du dossier que, si l'adresse du site correspond à la rue Henri Sainte-Claire Deville, axe constituant la délimitation ouest de la zone urbaine sensible, il occupe cependant une emprise de terrain située sensiblement à l'écart de cette voie, plus à l'ouest, qui n'est pas incluse dans la délimitation de la zone telle que cartographiée, en application de l'article 1er du décret du 26 décembre 1996 ; que, par suite, le requérant, qui ne remplissait pas les conditions d'octroi de l'avantage spécifique d'ancienneté, ne peut utilement se prévaloir ni de l'esprit du texte, ni de la circonstance qu'il serait obligé de traverser le périmètre de la zone urbaine sensible afin de se rendre sur son lieu de travail, pour soutenir que la société Orange aurait commis une faute en lui refusant illégalement le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté prévu par les dispositions précitées ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que le respect du principe d'égalité ne saurait permettre à un fonctionnaire de bénéficier d'un avantage qui aurait été illégalement attribué à un autre fonctionnaire du même corps, placé dans la même situation ; que, par suite, le requérant ne saurait, en tout état de cause, davantage utilement se prévaloir devant le juge administratif de la circonstance qu'un de ses collègues, affecté sur le site de Toulon Sainte-Musse, aurait, en raison de cette affectation, bénéficié de cet avantage spécifique d'ancienneté ;
6. Considérant, enfin, qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter le moyen renouvelé devant la Cour tiré d'une discrimination syndicale comme obstacle à l'attribution de l'avantage en litige ;
7. Considérant dès lors que la société Orange n'a pas commis de faute susceptible d'engager sa responsabilité, les conclusions indemnitaires présentées par M. A...ne peuvent qu'être rejetées ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation et à fin d'injonction ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu également de rejeter les conclusions présentées à ce titre par la société Orange ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Orange présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et à la société Orange.
Délibéré après l'audience du 11 décembre 2018, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- MmeE..., première conseillère,
- M. Slimani, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 décembre 2018.
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N° 17MA00997