Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Nice de mettre à la charge de la commune de Bouyon la somme de 456 085 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de la construction et du défaut d'entretien d'ouvrages publics.
Par un jugement n° 1500858 du 18 avril 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 27 juin 2017, M.B..., représenté par la SELARL Judicial, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 18 avril 2017 ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Bouyon la somme de 456 085 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ;
3°) d'ordonner une expertise avant dire droit.
Il soutient que :
- l'expertise présente une utilité afin de déterminer l'origine des désordres qui affectaient la maison démolie ;
- les désordres ne sont pas imputables à la vétusté de l'habitation, à son mode constructif ou à une absence d'entretien ;
- les arrivées d'eaux dans le sous-sol de sa propriété ont pour origine un défaut de conception ou d'entretien d'un canal communal et un vice de conception de l'aire de jeu de la commune ;
- les désordres affectant le bâtiment détruit sont aussi imputables aux usagers du terrain de sport.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2018, la commune de Bouyon, représentée par la SELARL Neveu, Charles et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'expertise ne présente pas d'utilité dès lors que le bâtiment objet des désordres a été démoli ;
- aucun défaut d'entretien normal du canal ni aucune erreur de conception de l'aire de jeu ne peuvent lui être reprochés ;
- le lien de causalité entre les ouvrages publics et le dommage n'est pas établi ;
- en démolissant la maison avant toute mesure d'instruction, la victime a été négligente ;
- la créance indemnitaire alléguée est prescrite.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la Cour a désigné Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas,
- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la commune de Bouyon.
Considérant ce qui suit :
1. M. B...relève appel du jugement du 18 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la mise à la charge de la commune de Bouyon d'une indemnisation au titre des désordres affectant son habitation, désordres qu'il impute à la réalisation d'une aire de jeux et à un vice de conception ainsi qu'à l'absence d'entretien d'un canal. Il sollicite, en outre, la réalisation d'une expertise avant dire droit.
2. D'une part, la mise en jeu de la responsabilité sans faute d'une collectivité publique pour dommages de travaux publics à l'égard d'un justiciable qui est tiers par rapport à un ouvrage public ou une opération de travaux publics est subordonnée à la démonstration par cet administré de l'existence d'un dommage anormal et spécial directement en lien avec cet ouvrage ou cette opération. Les personnes mises en cause doivent alors, pour dégager leur responsabilité, établir que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure, sans que puisse utilement être invoqué le fait du tiers.
3. D'autre part, la prescription d'une mesure d'expertise en application de
l'article R. 621-1 du code de justice administrative est subordonnée au caractère utile de cette mesure. Il appartient au juge, saisi d'une demande d'expertise, d'apprécier son utilité au vu des pièces du dossier, notamment, le cas échéant, des rapports des expertises prescrites antérieurement s'ils existent, et au regard des motifs de droit et de fait qui justifient, selon le demandeur, la mesure sollicitée.
4. M. B...est propriétaire de la parcelle cadastrée section F n° 73 qui supporte une maison ayant été édifiée à la suite de la démolition d'une précédente habitation datant de 1921. Il résulte de l'instruction, et notamment de la demande de permis de construire déposée en 2008, que le bâtiment initial avait été construit sans fondation et avec des matériaux de mauvaise qualité, et était vétuste et en mauvais état d'entretien. Si les procès-verbaux de constat d'huissier dressés le 3 juin 2008 et le 27 mai 2009 à la demande du requérant font état de nombreuses fissures de l'immeuble et de ses tassement et basculement vers l'aval, sa démolition ainsi que l'excavation de la totalité de la surface de la parcelle pour réaliser les fouilles des fondations de la nouvelle construction empêchent désormais toute recherche de l'origine des désordres qui touchaient l'ancienne maison. Dès lors, une mesure d'expertise qui aurait pour objet une telle recherche serait dépourvue d'utilité. En outre, aucune des pièces produites tant en première instance qu'en appel ne permet d'imputer ces fissurations ni à des arrivées d'eau en provenance d'un réseau public, ni à un vice de conception ou à un défaut d'entretien du canal longeant la voie publique. Ces pièces ne sont pas davantage susceptibles d'établir que les désordres qui affectaient la toiture et les gouttières de l'ancienne maison auraient eu pour origine le jet de ballons des usagers depuis l'aire de jeux. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que les infiltrations d'eau touchant la nouvelle construction auraient pour cause un vice de conception du terrain de sports de la commune, dès lors, en particulier, que celui-ci est situé en aval du terrain du requérant. Ainsi, M. B...ne rapporte pas la preuve, dont la charge lui incombe, de l'existence d'un lien de causalité entre les travaux ou ouvrages publics mis en cause et les préjudices qu'il invoque. Il n'est, par suite, pas fondé à rechercher la responsabilité de la commune de Bouyon pour dommages de travaux publics.
5. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise avant dire droit, M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Bouyon et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : M. B...versera à la commune de Bouyon une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et à la commune de Bouyon.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2018 où siégeaient :
- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère,
- M. Merenne, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 décembre 2018.
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N° 17MA002693