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13/12/2018 | FRANCE | N°18MA02028

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 13 décembre 2018, 18MA02028


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 31 juillet 2017 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement n° 1704049 du 13 décembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requê

te, enregistrée le 26 avril 2018, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 31 juillet 2017 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement n° 1704049 du 13 décembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 avril 2018, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier n° 1704049 du 13 décembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 31 juillet 2017 du préfet de l'Hérault portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourra être éloigné ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour à compter de la date de notification de cette décision, sous astreinte de cent euros par jour de retard.

Il soutient que :

- la décision portant refus d'admission au séjour a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que la commission du titre de séjour n'a pas été préalablement consultée ;

- la décision portant refus d'admission au séjour est insuffisamment motivée ;

- la décision portant refus d'admission au séjour est entachée d'erreur de droit pour l'application des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en droit et en fait ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale dès lors qu'il pouvait bénéficier d'un titre de séjour de plein droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2018, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés et renvoie à ses écritures de première instance.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 mars 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;

- le code du travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Silvy a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1985, relève appel du jugement du 13 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 31 juillet 2017 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français, en fixant le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Et qu'aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

3. Il ressort des termes de la décision de refus d'admission au séjour attaquée que celle-ci comporte l'indication des textes dont il a été fait application, et notamment les articles 3, 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les stipulations des articles 3 et 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, les articles L. 5221-1 et suivants et R. 52221-1 et suivants du code du travail et les articles L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il fait également état de la date d'entrée alléguée de M. C... sur le territoire français en février 2008, de ses attaches personnelles et familiales en France et au Maroc, du caractère limité des pièces produites pour établir sa résidence habituelle en France avant 2013 et du contrat de travail à durée indéterminée en qualité de carreleur dont il se prévaut à l'appui de sa demande de régularisation. Par suite, la décision attaquée du préfet de l'Hérault portant refus de titre de séjour comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent et doit être regardée comme suffisamment motivée. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit dès lors, être écarté comme manquant en fait.

4. Aux termes de l'article de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) ". L'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié "(...) ".

5. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...). L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. (...) ". Et aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ".

6. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié.

7. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. C... ne produit que des éléments limités pour établir sa présence continue sur le territoire français au cours des dix années précédant sa demande de régularisation formée le 25 avril 2017 et que le justificatif probant le plus ancien porte sur la facturation de soins prodigués au centre hospitalier de Béziers Montimaran le 31 octobre 2014 et les lettres de relances adressées par la suite pour le recouvrement de ces sommes. Il n'établit, dès lors, sa résidence habituelle en France qu'à compter de la fin de l'année 2014 au plus tôt, soit une durée de séjour de moins de trois années à la date de la décision de refus de titre de séjour en litige. M. C... n'est, par suite et en tout état de cause, pas fondé à se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la saisine pour avis de la commission du titre de séjour.

8. En troisième lieu, M. C... fait valoir son insertion professionnelle, attestée par un contrat de travail et une demande d'autorisation de travail, et la continuité de sa présence depuis près de neuf années à l'appui de sa demande de régularisation en qualité de salarié. Il ressort toutefois des pièces du dossier que celui-ci ne justifiait que d'une durée de séjour de près de trois années, qu'il ne justifiait pas détenir le visa de long séjour prescrit par l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que les éléments relatifs à son intégration professionnelle se limitaient à un emploi en tant que carreleur depuis le mois de juin 2016. Le préfet de l'Hérault a, par suite, rejeté à bon droit la demande d'admission du requérant en qualité de salarié au motif que celui-ci ne disposait pas du visa de long séjour prescrit par l'article L. 313-2 et applicable aux ressortissants marocains. Enfin, le préfet de l'Hérault pouvait légalement retenir, pour prendre la décision attaquée en tant qu'elle se prononce sur l'opportunité d'une mesure de régularisation et trouve un fondement légal dans l'exercice du pouvoir de régularisation discrétionnaire dont dispose l'autorité préfectorale, ainsi qu'il a été dit au point 6 ci-dessus, que le contrat de travail dont se prévaut M. C...ne saurait constituer un motif exceptionnel d'admission au séjour sans entacher ce refus d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation. Ces moyens doivent, par suite, être rejetés.

9. En dernier lieu, en vertu de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour " est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) ". Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions.

10. Il résulte des pièces du dossier qu'en raison de la faible durée de son séjour en France, de son intégration limitée à la société française et du maintien de l'essentiel de ses attaches familiales au Maroc, M. C... n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

11. En premier lieu, il résulte des motifs exposés aux points 2 à 10 que le refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à M. C... n'est pas entaché d'illégalité. Par suite, l'exception d'illégalité du refus de titre soulevée à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire doit être écartée.

12. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...). ". Et aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". Et aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III.. (...) ".

13. Il résulte de l'arrêté attaqué que le préfet de l'Hérault a fait application du 3° du I de l'article L. 511-1 et il ressort des pièces du dossier et de ce qui vient d'être dit que la décision relative au séjour est suffisamment motivée en droit et en fait. Le moyen tenant à l'insuffisance de motivation de la décision faisant obligation de quitter le territoire français à M. C... doit, par suite, être écarté.

14. En dernier lieu, si M. C... fait valoir qu'un ressortissant étranger qui doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour par application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut faire l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français. Il ressort toutefois de ce qui précède que M. C... ne satisfait pas aux conditions de délivrance de plein droit d'un titre de séjour. Le moyen doit, par suite, être écarté.

15. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. L'ensemble de ses conclusions, en ce y compris ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doit, par suite, être rejeté.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Me D...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2018, où siégeaient :

- M. Poujade, président de chambre,

- M. Portail, président assesseur,

- M. Silvy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 décembre 2018.

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N° 18MA02028

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA02028
Date de la décision : 13/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: M. Jean-Alexandre SILVY
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : BAUDARD

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-13;18ma02028 ?
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