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06/12/2018 | FRANCE | N°17MA00339

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 06 décembre 2018, 17MA00339


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL La Fare Contrôle Auto a demandé au tribunal administratif de Marseille de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009, et des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2010.

Par un jugement n° 1402556 du 16 décembre 2016, le tribunal administratif

de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL La Fare Contrôle Auto a demandé au tribunal administratif de Marseille de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009, et des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2010.

Par un jugement n° 1402556 du 16 décembre 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 janvier 2017, la SARL La Fare Contrôle Auto, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 décembre 2016 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les redressements ne sont pas suffisamment motivés ;

- les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ont été méconnues ;

- l'interlocuteur départemental n'a pas examiné le mémoire qui lui a été remis le 22 août 2012 ;

- les redressements sur factures fictives sont infondés ;

- les pertes sur créances irrécouvrables de 10 915 euros sont justifiées ;

- elle produira des justificatifs de nature à justifier le passif injustifié de 49 159,26 euros au 1er janvier 2007.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2017, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour de rejeter la requête de la SARL La Fare Contrôle Auto.

Il soutient que les moyens invoqués par la SARL La Fare Contrôle Auto ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Paix,

- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL La Fare Contrôle Auto interjette appel du jugement du 16 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009, et des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2010.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". L'article R. 57-1 du même livre prévoit que : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article. " Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations.

3. La proposition de rectification adressée le 17 décembre 2010 à la SARL La Fare Contrôle Auto mentionne, s'agissant du redressement sur charges du fournisseur Toul'Embal que, bien que les charges passées par la société contribuable soient appuyées de justificatifs constitués par des factures, le droit de communication auprès de ce fournisseur a permis d'établir que les dépenses mentionnées ne correspondent pas à une charge effective. Les dépenses rejetées sont citées et chiffrées. Ce chef de redressement est, contrairement à ce que soutient la société contribuable, suffisamment motivé.

4. En deuxième lieu, l'article L. 64 du livre des procédures fiscales prévoit que : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : a) Qui donnent ouverture à des droits d'enregistrement ou à une taxe de publicité foncière moins élevés ; b) Ou qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; c) Ou qui permettent d'éviter, en totalité ou en partie, le paiement des taxes sur le chiffre d'affaires correspondant aux opérations effectuées en exécution d'un contrat ou d'une convention. / L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel. / Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification. ".

5. L'administration fiscale n'a pas écarté une situation juridique comme fictive, mais s'est bornée à tirer les conséquences des constatations qu'elle a effectuées lors des opérations de contrôle qui ont revelé que la réalité des prestations réalisées par le fournisseur Publi Com Distribution n'était pas établie . En cela, le vérificateur ne s'est pas placé, même implicitement, sur le terrain de l'abus de droit. Le moyen tiré par la SARL La Fare Contrôle Auto de ce qu'elle aurait été privée des garanties afférentes à cette procédure doit être écarté.

6. En troisième lieu, la SARL La Fare Contrôle Auto soutient qu'elle aurait été privée des garanties liées à la possibilité de saisir l'interlocuteur départemental. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de la demande de la société contribuable de rencontrer l'interlocuteur départemental, l'administration lui a proposé un rendez-vous le 31 juillet 2012, auquel elle ne s'est pas rendue, indiquant qu'elle avait reçu le courrier de convocation le jour même de l'entretien. Elle a toutefois précisé qu'elle produirait des informations écrites. Ces dernières ont été formulées le 22 août suivant, la société précisant expressément qu'elle ne sollicitait aucun entretien. Compte tenu du caractère oral de l'entretien avec l'interlocuteur départemental, celui-ci, qui a écrit le 17 octobre 2012 à la SARL La Fare Contrôle Auto qu'il considérait qu'elle se désistait de sa demande, n'était pas tenu de répondre aux observations écrites de la société. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée de la garantie de faire appel à l'interlocuteur départemental.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les redressements sur factures fictives :

7. S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts et de l'article 230 de l'annexe II à ce code, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services. Dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance. Si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération.

8. S'agissant des charges déductibles, l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code prévoit que : " (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation (...) ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Lorsque le contribuable apporte cette justification, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

9. Plusieurs redressements ont été notifiés à la société contribuable, par deux propositions de rectification, du 17 décembre 2010, au titre de l'exercice 2007 et du 1er septembre 2011, au titre des exercices clos en 2008 et 2009 et se clôturant au 1er septembre 2010 en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Les rehaussements issus de plusieurs factures émanant des fournisseurs ASE, Calipub 13 ainsi que des factures correspondant au crédit bail Lixxbail CA n° 903876, ont été motivés par la circonstance que la réalité des prestations n'était pas établie, que la preuve du paiement des prestations par la société contribuable n'était pas apportée, ou que les factures étaient irrégulières. La SARL La Fare Contrôle Auto ne fournit pas davantage de justificatifs en appel que devant les premiers juges, pour justifier de la réalité des prestations effectuées par ces différents fournisseurs, mais se borne à indiquer que les anomalies constatées ne sont pas de sa responsabilité, mais concernent les fournisseurs. Cependant, elle n'établit pas la réalité des prestations ou des dépenses correspondantes. C'est, par suite, à bon droit que lesdites factures ont été rejetées par l'administration fiscale, justifiant en cela les redressements correspondants en matière de charges déductible et de taxe sur la valeur ajoutée.

En ce qui concerne les pertes sur créances irrécouvrables :

10. La SARL La Fare Contrôle Auto a comptabilisé au 31 décembre 2009 une somme de 10 915 euros au compte 65400000, au titre des pertes irrécouvrables sur clients douteux. Elle a également comptabilisé une somme de 2 139,40 euros au débit du compte 44571100 " taxe sur la valeur ajoutée collectée ". Cette constatation faisait suite à une provision pour dépréciation des comptes clients, comptabilisée pour un montant de 22 195,99 euros au 31 décembre 2008. Toutefois, la société contribuable n'a pas été en mesure d'identifier les clients n'ayant pas acquitté leur facture de contrôle technique, pas davantage qu'elle n'a justifié des diligences qu'elle aurait entreprises pour tenter de récupérer les sommes dues. Elle n'apporte, par ailleurs, aucun élément permettant d'établir que ces discordances correspondraient à des impayés. Dans ces conditions, elle n'était pas en droit de déduire la somme de 10 915 euros au titre des créances irrécouvrables. Elle n'est pas non plus fondée à solliciter la récupération de la taxe sur la valeur ajoutée constatée au débit du compte " taxe sur la valeur ajoutée collectée " pour un montant de 2 139,40 euros. Le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne le passif injustifié :

11. L'administration a réintégré dans les résultats imposables de l'exercice clos au 31 décembre 2007 la somme de 49 159 euros correspondant au montant du report à nouveau comptabilisé au crédit du compte-courant d'associé sous le libellé " compte courant ". Le titulaire de ce compte est M. B... C..., gérant de la SARL La Fare Contrôle Auto. La SARL La Fare Contrôle Auto qui a indiqué, au cours de la procédure, que cette somme correspondait pour partie à des paiements de carburant, pour un montant de 5 510 euros, de frais kilométriques, pour un montant de 6 463 euros et d'un loyer, pour un montant de 90 000 euros, engagés par M. B... pour le compte de la société, a annoncé des justificatifs des charges ainsi supportées par son gérant, mais ne les a pas davantage produits devant la Cour. C'est par suite à bon droit que la déduction de ce passif a été rejetée.

12. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SARL la Fare Contrôle Auto n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Ses conclusions devront être rejetées, en ce y compris celles tendant à l'allocation des frais liés au litige.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL La Fare Contrôle Auto est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL La Fare Contrôle Auto et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-Mer.

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2018, où siégeaient :

- Mme Mosser, présidente

- Mme Paix, présidente assesseur,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 décembre 2018.

N°17MA00339 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00339
Date de la décision : 06/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-08-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : Mme MOSSER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : CABINET JOURDAN et CRUDO

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-06;17ma00339 ?
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