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22/11/2018 | FRANCE | N°17MA02027

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 22 novembre 2018, 17MA02027


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier de La Ciotat à lui verser la somme de 232 300 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de sa prise en charge par cet établissement.

La caisse primaire centrale d'assurance maladie (CPCAM) des Bouches-du-Rhône a demandé au tribunal de condamner le centre hospitalier de La Ciotat à lui verser la somme de 114 867,58 euros au titre des débours et la somme de 1 028 euros au titre d

e l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par un jugement n° 1408698 du 13 mars ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier de La Ciotat à lui verser la somme de 232 300 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de sa prise en charge par cet établissement.

La caisse primaire centrale d'assurance maladie (CPCAM) des Bouches-du-Rhône a demandé au tribunal de condamner le centre hospitalier de La Ciotat à lui verser la somme de 114 867,58 euros au titre des débours et la somme de 1 028 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par un jugement n° 1408698 du 13 mars 2017, le tribunal administratif de Marseille a condamné le centre hospitalier de La Ciotat à verser à Mme B... la somme de 57 600 euros et à la CPCAM des Bouches-du-Rhône la somme de 91 894,06 euros au titre des débours et la somme de 1 055 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 mai 2017 et le 14 septembre 2018, MmeB..., représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du 13 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a limité à la somme de 57 600 euros l'indemnité au versement de laquelle il a condamné le centre hospitalier de La Ciotat en réparation du préjudice subi ;

2°) de porter à la somme de 114 078 euros le montant de l'indemnité due à titre provisionnel ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 4 décembre 2014 ;

3°) d'ordonner une nouvelle expertise ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de La Ciotat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- un complément d'expertise est nécessaire en raison de l'aggravation de son état de santé depuis les précédentes opérations d'expertise et de l'absence de précision sur le besoin en aide par une tierce personne dans le rapport d'expertise ;

- la responsabilité du centre hospitalier de La Ciotat est engagée en raison du retard de diagnostic et de prise en charge ;

- le taux de perte de chance doit être évalué à 100 % ;

- les sommes allouées au titre des préjudices subis sont insuffisantes.

Par un mémoire, enregistré le 20 septembre 2017, la CPCAM des Bouches-du-Rhône, représentée par la SCP BBLM, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du 13 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a limité à la somme de 91 894,06 euros le montant des débours au versement duquel il a condamné le centre hospitalier de La Ciotat ;

2°) de porter à la somme de 114 867,58 euros le montant des débours ainsi que les intérêts au taux légal à compter de l'arrêt ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de La Ciotat la somme de 650 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que si le taux de perte de chance est fixé à 100 %, elle doit être intégralement remboursée des débours.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 août 2018, le centre hospitalier de La Ciotat, représenté par MeC..., demande à la cour de :

1°) de rejeter la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident :

- de réformer le jugement du 13 mars 2017 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il l'a condamné à verser à Mme B...la somme de 57 600 euros ;

- de ramener à la somme de 24 160 euros le montant de l'indemnité due à Mme B....

Il soutient que :

- le complément d'expertise demandé n'est pas utile ;

- le taux de perte de chance a été exactement évalué à 80 % ;

- le déficit fonctionnel permanent ne peut pas être fixé à plus de 20 % ;

- les sommes allouées au titre du déficit fonctionnel permanent, des souffrances endurées, du préjudice esthétique permanent et du préjudice d'agrément sont excessives ;

- la demande d'indemnisation du préjudice professionnel, nouvelle en appel, est irrecevable ;

- l'aide par une tierce personne antérieure au jugement n'est pas justifiée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas,

- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant MmeB....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B...a bénéficié en 2003 de la pose d'un court-circuit gastrique. A la suite de violentes douleurs abdominales, elle a été admise, le 22 décembre 2011, aux services des urgences du centre hospitalier de La Ciotat. En raison d'un retard de diagnostic d'un syndrome occlusif intense, elle a subi le lendemain la résection partielle de l'intestin grêle. Le tribunal administratif de Marseille a condamné l'établissement de soins à verser à la patiente la somme de 57 600 euros dont elle demande en appel la majoration. Le centre hospitalier de La Ciotat, qui ne conteste pas son obligation de réparer les conséquences dommageables du retard de prise en charge appropriée par les urgences, demande par la voie de l'appel incident la réduction du montant de la condamnation prononcée à son encontre.[0]

2. Aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision (...) ".

3. Il résulte de l'instruction que depuis le dépôt du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille le 31 juillet 2012, Mme B... a été hospitalisée à de multiples reprises pour des pathologies digestives et intestinales dont une éventration sus-ombilicale, une lithiase vésiculaire, une hypokaliémie, une infection du cathéter à chambre implantable nécessaire à son alimentation parentérale et la pose d'un nouveau dispositif, des hypoglycémies à répétition et l'ablation de la vésicule biliaire. La requérante fait valoir que l'aggravation de son état de santé et ses hospitalisations sont en lien avec la résection partielle de l'intestin grêle consécutive au retard de diagnostic et de prise en charge imputable au centre hospitalier de La Ciotat. Toutefois, l'état du dossier ne permet à la Cour ni de déterminer la date de consolidation de l'état de santé de Mme B...ni d'évaluer les préjudices en lien avec le retard fautif de prise en charge de l'occlusion intestinale, avec l'intervention chirurgicale du 23 décembre 2011 consécutive à cette faute ni avec ses complications successives. Par suite, il y a lieu, avant de statuer sur les droits à réparation de la victime, d'ordonner une expertise sur ces points dans les conditions précisées dans le dispositif du présent arrêt.

D É C I D E :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les conclusions indemnitaires de MmeB..., procédé par un expert, désigné par la présidente de la Cour, à une expertise avec pour mission de :

1°) se faire communiquer tous documents relatifs à l'état de santé de Mme B...et, notamment, tous documents relatifs au suivi médical, aux actes de soins et aux diagnostics pratiqués sur elle depuis le dépôt du précédent rapport ; convoquer et entendre les parties et tous sachants ; procéder à l'examen sur pièces du dossier médical de Mme B...ainsi qu'éventuellement à son examen clinique ;

2°) donner son avis sur le point de savoir si les hospitalisations de Mme B...à partir de 2013 sont en lien avec la résection partielle de l'intestin grêle ;

3°) décrire l'ensemble des préjudices pouvant être regardés comme directement et exclusivement imputables au retard de prise en charge de l'occlusion intestinale et à la résection partielle de l'intestin grêle ainsi qu'à l'obligation pour la requérante de recourir à une nutrition parentérale totale, à l'exclusion, d'une part, de ceux résultant de l'état antérieur et notamment de la pose d'un court-circuit gastrique, et, d'autre part, de ceux ayant une cause extérieure ;

4°) dire si l'état de santé de Mme B...a entraîné un déficit fonctionnel temporaire et en préciser les dates de début et de fin, ainsi que le ou les taux ;

5°) indiquer à quelle date l'état de Mme B...peut être considéré comme consolidé ; préciser s'il subsiste une incapacité permanente partielle et, dans l'affirmative, en fixer le taux, en distinguant la part imputable à la résection partielle de l'intestin grêle de celle ayant pour origine toute autre cause ou pathologie, eu égard notamment aux antécédents médicaux de l'intéressée ;

6°) dire si l'état de Mme B...est susceptible de modification en amélioration ou en aggravation ; dans l'affirmative, fournir toutes les précisions utiles sur cette évolution, sur son degré de probabilité et dans le cas où un nouvel examen serait nécessaire, en mentionner le délai ;

7°) préciser si l'état de santé de Mme B...a justifié une assistance par une tierce personne et de préciser les dates de début et de fin de cette aide ainsi que sa nature et son importance en nombre d'heures par semaine ou par jour ;

8°) dire si l'état de santé de Mme B...a entraîné des répercussions sur la vie professionnelle de l'intéressée et en préciser la nature et l'importance ;

9°) donner tous éléments utiles permettant d'évaluer les autres postes de préjudices tels que les souffrances endurées, le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément et le préjudice d'impréparation ;

10°) de fournir toutes précisions complémentaires que l'expert jugera utile à la solution du litige et de nature à permettre d'apprécier l'étendue du préjudice.

Article 2 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il prêtera serment par écrit devant le greffier en chef de la Cour. L'expert déposera son rapport au greffe de la Cour en deux exemplaires et en notifiera copie aux parties dans le délai fixé par la présidente de la Cour dans sa décision le désignant.

Article 3 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.

Article 4 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., au centre hospitalier de La Ciotat et à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 8 novembre 2018 où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère,

- M. Merenne, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 novembre 2018.

2

N° 17MA02027


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA02027
Date de la décision : 22/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-04-02-02 Procédure. Instruction. Moyens d'investigation. Expertise.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Agnes BOURJADE
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : BENSADOUN-MANUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-11-22;17ma02027 ?
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