La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/11/2018 | FRANCE | N°18MA01995

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 13 novembre 2018, 18MA01995


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance n° 1600875 du 8 février 2016, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a transmis au tribunal administratif de Nîmes le dossier de la requête, enregistrée le 2 février 2016, présentée pour M. B...C....

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 9 octobre 2015 par lequel le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche l'a licencié, ensemble la décision du 7 décembre 2015

par laquelle cette autorité a rejeté le recours gracieux formé à l'encontre de cet arr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance n° 1600875 du 8 février 2016, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a transmis au tribunal administratif de Nîmes le dossier de la requête, enregistrée le 2 février 2016, présentée pour M. B...C....

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 9 octobre 2015 par lequel le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche l'a licencié, ensemble la décision du 7 décembre 2015 par laquelle cette autorité a rejeté le recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté et d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche de le réintégrer dans son corps d'origine dans un délai d'un mois, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir.

Par un jugement n° 1600407 du 6 mars 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 30 avril 2018, M.C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 6 mars 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 octobre 2015 par lequel le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche l'a licencié, ainsi que la décision du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche du 7 décembre 2015 rejetant son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche de prononcer, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sa réintégration dans son corps d'origine à la date du 1er septembre 2015 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions attaquées méconnaissent les dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, codifiées aux articles L. 211-2 et L.211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la mesure de licenciement méconnaît les dispositions des articles 7 et 29 du décret du 7 octobre 1994 ;

- les décisions attaquées, qui méconnaissent l'article 5 de l'arrêté du 22 août 2014, sont entachées d'une erreur de droit, la suppression, à la demande de l'inspecteur, du rapport du tuteur, de la mention de ses qualités ayant modifié le sens de l'appréciation générale portée par celui-ci sur ses compétences ;

- les modifications de l'évaluation ne sont pas basées sur une observation de sa pratique ;

- en méconnaissance de l'arrêté du 22 août 2014, le dossier du jury était incomplet et comportait une lettre malveillante du chef d'établissement ;

- l'administration a ajouté une condition à la loi, le rapport de son tuteur ayant fait l'objet d'une validation par l'inspecteur ;

- les décisions attaquées sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par lettre du 17 mai 2018, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et indiquant la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.

Une ordonnance du 17 septembre 2018 a prononcé la clôture de l'instruction à la date de son émission, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire, présenté par le ministre de l'éducation nationale, été enregistré le 5 octobre 2018, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 ;

- le décret n° 94-874 du 7 octobre 1994 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- l'arrêté NOR MENH1411675A du 22 août 2014 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lopa Dufrénot,

- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., lauréat du certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré de mathématiques, a été nommé, par arrêté ministériel du 1er octobre 2014, professeur certifié stagiaire à compter du 1er septembre 2014. Il a été affecté au sein du lycée général et technologique Lucie Aubrac à Bollène pour l'année scolaire 2014-2015. A la suite de la proposition de refus définitif de titularisation émise par le jury académique le 2 juillet 2015, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a, par un arrêté du 9 octobre 2015, licencié M.C.... Par le jugement dont il relève appel, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision du ministre du 7 décembre 2015 rejetant son recours gracieux.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, M. C...reprend en appel les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, codifiées aux articles L. 211-2 et L.211-5 du code des relations entre le public et l'administration. En l'absence de tout élément de fait ou de droit nouveau en appel de nature à remettre en cause l'appréciation qui en a été faite par les premiers juges, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif retenu à bon droit par le tribunal administratif au point 5 du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 7 du décret du 7 octobre 1994 fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l'Etat et de ses établissements publics : " Le fonctionnaire stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage. La décision de licenciement est prise après avis de la commission administrative paritaire prévue à l'article 29 du présent décret, sauf dans le cas où l'aptitude professionnelle doit être appréciée par un jury. (...) ". L'article 29 du décret prévoit que les questions d'ordre individuel résultant de l'application des articles 7 et 13 du présent décret sont soumises pour avis à la commission administrative paritaire du corps dans lequel le fonctionnaire stagiaire concerné a vocation à être titularisé. Les dispositions des articles 7 et 29 du décret du 7 octobre 1994, précitées ne sont pas applicables aux professeurs certifiés stagiaires licenciés à l'issue de la durée normale de stage, lorsque leur titularisation a été refusée par le jury académique.

4. Alors même que M.C..., nommé stagiaire à compter du 1er septembre 2014, a été informé, dès le 3 juillet 2015, au terme de l'année scolaire 2014-2015, du refus du recteur d'académie, de l'autoriser à accomplir une seconde année de stage, il ressort des termes même de l'arrêté contesté du 9 octobre 2015, que la mesure de licenciement prononcée par le ministre, seul compétent pour ce faire en application de l'article 9 de l'arrêté du 22 août 2014, n'a pris effet qu'à compter de sa notification, à l'issue du stage effectué. Dès lors, M. C... ne peut utilement soutenir que la mesure contestée, intervenue en cours de stage devait être soumise pour avis à la commission administrative paritaire du corps dont il avait vocation à relever. Par voie de conséquence, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 7 et 29 du décret du 7 octobre 1994 ne peut qu'être écarté.

5. En dernier lieu, en vertu de l'article 24 du décret du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs certifiés, au cours de leur stage d'une durée d'un an, les professeurs stagiaires bénéficient d'une formation organisée, dans le cadre des orientations définies par l'Etat, par un établissement d'enseignement supérieur, visant l'acquisition des compétences nécessaires à l'exercice du métier. Le même article précise que cette formation alterne des périodes de mise en situation professionnelle dans un établissement scolaire et des périodes de formation au sein de l'établissement d'enseignement supérieur et est accompagnée d'un tutorat et peut être adaptée pour tenir compte du parcours antérieur des professeurs stagiaires. Selon l'article 26 du même décret, à l'issue du stage, la titularisation est prononcée par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle le stage est accompli, sur proposition du jury mentionné à l'article 24. Aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré stagiaires : " Le jury se prononce sur le fondement du référentiel de compétences prévu par l'arrêté du 1er juillet 2013 susvisé, après avoir pris connaissance des avis suivants : I. - Pour les stagiaires qui effectuent leur stage dans les établissements publics d'enseignement du second degré :1° L'avis d'un membre des corps d'inspection de la discipline désigné par le recteur, établi sur la base d'une grille d'évaluation et après consultation du rapport du tuteur désigné par le recteur, pour accompagner le fonctionnaire stagiaire pendant sa période de mise en situation professionnelle. L'avis peut également résulter, notamment à la demande du chef d'établissement, d'une inspection ; 2° L'avis du chef de l'établissement dans lequel le fonctionnaire stagiaire a été affecté pour effectuer son stage établi sur la base d'une grille d'évaluation ; 3° L'avis du directeur de l'école supérieure du professorat et de l'éducation responsable de la formation du stagiaire. (...) ". L'article 8 de cet arrêté du 22 août 2014 indique qu'après délibération, le jury établit la liste des fonctionnaires stagiaires qu'il estime aptes à être titularisés. Enfin, aux termes de l'article 9 du même arrêté : " Le recteur prononce la titularisation des stagiaires estimés aptes par le jury. (...) Le recteur arrête par ailleurs la liste de ceux qui sont autorisés à accomplir une seconde année de stage. Il transmet au ministre les dossiers des stagiaires qui n'ont été ni titularisés ni autorisés à accomplir une seconde année de stage et qui sont, selon le cas, licenciés ou réintégrés dans leur corps, cadre d'emplois ou emploi d'origine. ".

6. Un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire. Le jury académique se prononce à l'issue d'une période de formation et de stage. S'agissant non d'un concours ou d'un examen mais d'une procédure tendant à l'appréciation de la manière de servir qui doit être faite en fin de stage, cette appréciation peut être censurée par le juge de l'excès de pouvoir en cas d'erreur manifeste.

6. Comme il a été dit au point 1, le jury académique a, le 2 juin 2015, après avoir pris connaissance, notamment de l'avis du proviseur du lycée Lucie Aubrac où le requérant accomplissait son stage, du 28 avril 2015 et de celui émis par l'inspectrice désignée par le recteur, du 16 avril 2015, après consultation du rapport du tuteur, a proposé de refuser définitivement la titularisation de M.C.... Ces avis étaient défavorables à celle-ci. Quelques modifications ont été apportées par le tuteur l'accompagnant au cours de sa mise en situation, au rapport transmis à l'inspectrice, à la suite d'un entretien avec cette dernière. Cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces modifications auraient été telles qu'elles auraient eu une incidence déterminante sur les conclusions du tuteur qui relève les difficultés rencontrées par M. C...dans la gestion de la classe malgré les efforts et les solutions adoptées, les méthodes d'apprentissage très souvent centrées sur les calculatrices et l'attitude du stagiaire pour prendre du recul sur sa pratique, ni davantage sur l'appréciation portée par l'inspectrice, à l'issue de son inspection, dans son rapport circonstancié dont les conclusions ne sont pas contestées. De plus, M. C... n'établit pas que la circonstance selon laquelle, en raison de congés scolaires et de l'accomplissement d'un stage obligatoire à la charge des élèves, au cours de la période du 17 avril 2015 au 14 mai 2015 où, n'ayant effectué que trois jours de classe, il n'a pas été accompagné par le tuteur, aurait été de nature à remettre en cause le déroulement de son stage et les appréciations portées sur son aptitude professionnelle au cours de sa mise en situation professionnelle. En outre, il ne ressort pas des dispositions de l'arrêté du 22 août 2014, qu'avant de se prononcer sur le fondement du référentiel de compétences prévu par l'arrêté du 1er juillet 2013, le jury devait prendre connaissance de documents étrangers à la liste des avis énumérés à l'article 5 du même arrêté. Par suite, M. C...n'est pas fondé à soutenir que le dossier du jury devait comporter d'autres avis ou notes. Il ne ressort pas des pièces versées aux débats que le dossier soumis au jury académique avant de se prononcer comportait une lettre malveillante du chef d'établissement dont, au demeurant, il n'est pas allégué qu'elle aurait eu une incidence sur l'appréciation portée par le jury sur son aptitude professionnelle. Si le requérant conteste la critique émise par le chef d'établissement sur ses compétences à l'utilisation et à la maîtrise des technologies de l'information " purement techniques ", il ne conteste pas la réalité des conclusions de cette autorité notamment sur l'existence de difficultés dans les relations interpersonnelles tant avec les membres de l'équipe enseignante qu'avec les élèves, ayant des répercussions sur la gestion de la classe jugée trop bruyante et la transmission des connaissances ainsi que sur le défaut manifesté de suivre les conseils de ses pairs, qui confortent celles de l'inspecteur académique. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'arrêté du 22 août 2014 doit être écarté. Dans ces circonstances, le jury académique a pu se prononcer au vu notamment des avis de l'inspectrice désignée par le recteur et du chef de l'établissement d'enseignement, conformément à l'article 5 de l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré stagiaires. M. C...n'est pas donc fondé à soutenir que l'administration a entaché l'arrêté en cause d'une erreur manifeste dans l'appréciation portée sur son aptitude professionnelle.

7. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'avis émis par le tuteur accompagnant M. C...au cours de son stage, qui a, après un entretien avec l'inspectrice, été modifié ainsi qu'il a été exposé précédemment, ait fait l'objet d'une validation irrégulière par l'inspectrice ou le recteur d'académie. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit, en tout état de cause, être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche du 9 octobre 2015 et de la décision du 7 décembre 2015 rejetant son recours gracieux. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie pour information en sera adressée au recteur de l'académie Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Délibéré après l'audience du 23 octobre 2018, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- Mme Simon, présidente-assesseure,

- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère.

Lu en audience publique, le 13 novembre 2018.

2

N° 18MA01995


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA01995
Date de la décision : 13/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-03-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Stage. Fin de stage.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Micheline LOPA-DUFRENOT
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SELARL GAILLARD ROBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-11-13;18ma01995 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award