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13/11/2018 | FRANCE | N°18MA00241

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 13 novembre 2018, 18MA00241


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2017 du préfet de l'Aude portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1704004 du 14 décembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2018, M. B...C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1

°) d'annuler ce jugement du 14 décembre 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2017 du préfet de l'Aude portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1704004 du 14 décembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2018, M. B...C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 décembre 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil de la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté attaqué concernant sa demande en qualité de retraité ;

- l'arrêté a été signé par une autorité incompétente en l'absence de justification d'une délégation de signature ;

- l'arrêté est entaché d'un défaut de motivation ;

- il est entaché d'un vice de procédure dès lors que c'est la même autorité qui a donné son avis et a signé l'arrêté en litige ;

- le préfet n'a pas instruit sa demande en tenant compte de sa situation de retraité ;

- les dispositions des articles L. 317-1 et R. 317-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues dès lors qu'il est retraité ;

- les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ont été méconnues en l'absence de procédure contradictoire ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur de droit, le préfet s'étant estimé lié par l'analyse de sa précédente demande de titre de séjour sur le terrain de la profession commerciale alors que sa demande l'a été sur le terrain de sa qualité de retraité ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il vit sur le territoire national depuis l'année 2011 et que sa fille et son petit-fils résident en France ;

- qu'il est dans l'attente d'une décision de justice en appel à fin d'indemnisation de son préjudice concernant son accident de la circulation et que sa présence en France est indispensable afin de comparaître devant la Cour d'appel de Montpellier ;

- au-delà de sa retraite, la liquidation de ses autres prestations sociales est suspendue dans l'attente de l'obtention d'un titre de séjour ;

- les juges de première instance lui ont reproché à tort que sa fille ne portait pas son nom de famille.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mars 2018, le préfet de l'Aude conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La demande d'aide juridictionnelle de M. C...a été rejetée par une décision du 26 mars 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Slimani a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.C..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1949, relève appel du jugement rendu le 14 décembre 2017 par le tribunal administratif de Montpellier, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juillet 2017 par lequel le préfet de l'Aude lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que le requérant soutient que le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté attaqué concernant sa demande en qualité de retraité ; que, toutefois, en estimant que l'arrêté attaqué qui vise, par ailleurs, les textes dont il fait application et mentionne les circonstances de faits propres à la situation du requérant, et notamment le fondement de sa demande d'admission exceptionnelle et le fait qu'il n'apportait aucun élément permettant d'apprécier ses liens personnels et familiaux sur le territoire français, le tribunal administratif qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments présentés par M. C...au soutien de ce moyen, a ainsi répondu par une motivation suffisante à ce dernier et n'a pas, ce faisant, entaché son jugement d'irrégularité ;

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 20 mars 2017, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Aude, le préfet de l'Aude a donné délégation à Mme Bernard, secrétaire générale, à l'effet de signer, notamment, les refus de séjour, obligations de quitter le territoire français et décisions fixant le pays de destination des mesures d'éloignement ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait et doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré du défaut de motivation ne comporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de Montpellier par M.C... ; que, par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté en litige par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort d'aucun principe ni d'aucune disposition applicable qu'une même personne ne pourrait instruire une demande de titre de séjour et signer la décision rejetant cette demande ; que, dès lors, le moyen ainsi soulevé par l'intéressé doit être écarté ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable " ; qu'aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Les dispositions de l'article L. 121-1 ne sont pas applicables : (...) 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière " ;

7. Considérant, d'une part, que la procédure contradictoire prévue par ces dispositions n'est pas applicable aux décisions statuant sur une demande ; que, dès lors, M. C...ne peut utilement les invoquer à l'encontre de la décision rejetant sa demande de titre de séjour pour soutenir qu'elle serait irrégulière faute d'avoir été précédée d'une procédure contradictoire ;

8. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que, dès lors, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ne peut être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire ;

9. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne ressort ni de la mention dans la motivation de l'arrêté contesté ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de l'Aude se serait estimé en situation de compétence liée pour rejeter la demande de titre de séjour dont il était saisi et obliger le requérant à quitter le territoire français ;

10. Considérant, en sixième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas instruit la demande de l'intéressé en tenant compte de sa situation sociale ;

11. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article L. 317-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui, après avoir résidé en France sous couvert d'une carte de résident a établi ou établit sa résidence habituelle hors de France et qui est titulaire d'une pension contributive de vieillesse, de droit propre ou de droit dérivé, liquidée au titre d'un régime de base français de sécurité sociale, bénéficie, à sa demande, d'une carte de séjour portant la mention " retraité " (...) " ; que selon les dispositions de l'article R. 317-1 du même code : " Pour l'application du premier alinéa de l'article L. 317-1, l'étranger présente à l'appui de sa demande de délivrance d'une carte de séjour portant la mention " retraité " : (...) / 3o La justification qu'il établit ou a établi sa résidence habituelle hors de France " ;

12. Considérant que si l'intéressé soutient qu'il a cotisé pour différentes assurances sociales en France et perçoit de ce fait une retraite de source française depuis le 1er juin 2016, il n'est pas contesté que M. C...n'a cependant jamais bénéficié d'une carte de résident, condition prévue par l'article L. 317-1 du code précité ; que c'est, par suite, à bon droit que le préfet n'a pas donné suite à sa demande subsidiaire de délivrance d'une carte de séjour portant la mention " retraité " ;

13. Considérant, enfin, selon les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) " ;

14. Considérant que si l'intéressé soutient qu'il vit en France depuis l'année 2011, que sa fille et son petit-fils résident sur le territoire national, qu'il serait privé de son droit à comparaître à fin d'expertise judiciaire devant la Cour d'appel de Montpellier dans le cadre d'un litige indemnitaire le concernant et que la liquidation d'une partie de ses prestations sociales est suspendue dans l'attente de l'obtention d'un titre de séjour, il ressort des pièces du dossier que M.C..., sans emploi, qui ne justifie pas être dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu la plus grande partie de sa vie, n'établit pas avoir fixé en France le centre de ses intérêts privés et familiaux ; que la circonstance qu'il soit dans l'attente d'une convocation devant le juge judiciaire et qu'il ne perçoive pas encore l'ensemble de ses prestations sociales est sans incidence sur la légalité de l'arrêté en cause ; que, dès lors, alors même que les premiers juges ont indiqué que le nom de famille de la fille du requérant n'était pas strictement identique au sien, différence qui tient à une erreur des services de l'état civil marocain, l'arrêté attaqué ne porte pas atteinte de manière disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que garanti par les stipulations précitées ; qu'eu égard à ce qui vient d'être dit, l'arrêté en cause n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions accessoires aux fins d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., au ministre de l'intérieur et à Me A....

Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Aude.

Délibéré après l'audience du 23 octobre 2018 où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- Mme Simon, président-assesseur,

- M. Slimani, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 novembre 2018.

4

N° 18MA00241


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA00241
Date de la décision : 13/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: M. Ahmed SLIMANI
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : BIDOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-11-13;18ma00241 ?
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