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31/10/2018 | FRANCE | N°16MA03147

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 31 octobre 2018, 16MA03147


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 3 décembre 2014 par lequel le maire de la commune de Berre l'Etang a refusé de lui délivrer un permis de construire portant changement de destination d'une remise agricole en habitation avec surélévation d'un étage et édification d'une terrasse sur une parcelle cadastrée section BY n° 203 située hameau de Mauran, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1502977 du 23 juin 2016, l

e tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 3 décembre 2014 par lequel le maire de la commune de Berre l'Etang a refusé de lui délivrer un permis de construire portant changement de destination d'une remise agricole en habitation avec surélévation d'un étage et édification d'une terrasse sur une parcelle cadastrée section BY n° 203 située hameau de Mauran, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1502977 du 23 juin 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 29 juillet 2016, le 20 décembre 2016 et le 8 février 2018, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 23 juin 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité et la décision de rejet de son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Berre l'Etang la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme était opérant ; ce moyen est également fondé.

- l'avis défavorable du préfet du 2 décembre 2014 qui se fonde sur la méconnaissance de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme est également illégal ; il est recevable à invoquer un tel moyen pour la première fois en appel qui ne relève pas d'une nouvelle cause juridique.

- le motif fondé sur l'existence d'un risque d'inondation en application du III-A du plan de prévention des risques d'inondation, qui est illégal, ne peut être substitué au motif initial de la décision contestée.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 27 septembre 2016, le 18 janvier 2017 et le 15 février 2018, la commune de Berre l'Etang conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge du requérant la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir, à titre principal qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé et, à titre subsidiaire, que le refus pouvait se fonder sur l'existence d'un risque d'inondation en application du III-A du plan de prévention des risques d'inondation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gougot,

- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant M. B....

Une note en délibéré présentée par M. B... a été enregistrée le 12 octobre 2018.

1. Le maire de la commune de Berre l'Etang a, par arrêté du 3 décembre 2014, refusé d'accorder à M. A... B...un permis de construire portant changement de destination d'une remise agricole en habitation avec surélévation d'un étage et édification d'une terrasse sur une parcelle cadastrée section BY n° 203 située hameau de Mauran, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux. M. A... B...interjette appel du jugement du 23 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. L'article L. 422-1 du code de l'urbanisme dispose que : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est :/ a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu... ". L'article L. 422-5 du même code alors en vigueur précise que : " Lorsque le maire [...] est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé :/ a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu ". En application de ces dispositions, le préfet des Bouches-du-Rhône a émis un avis défavorable au projet le 2 décembre 2014 en se fondant sur le fait qu'" eu égard à l'importance du projet, soit la transformation d'une remise agricole en logement, les caractéristiques et le gabarit des voies du hameau de Mauran, sur lesquelles l'opération prend accès, ne permettent pas de supporter la circulation et le stationnement de véhicules supplémentaires. Le projet ne respecte pas les dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme . " Le maire de Berre l'Etang était dès lors tenu, en application des dispositions précitées de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme, de se conformer à cet avis, dont la légalité n'était pas contestée en première instance par M. B.... Le tribunal a dès lors pu à bon droit écarter le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué méconnaissait l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme.

3. Le requérant excipe en appel de l'illégalité de l'avis du préfet du 2 décembre 2014 qui méconnaît l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme qui disposait, à la date de la décision attaquée : " Le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie... ". D'une part, lorsque la délivrance d'une autorisation administrative est subordonnée à l'avis conforme d'une autre autorité, le refus d'un tel accord, qui s'impose à l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, ne constitue pas une décision susceptible de recours, mais des moyens tirés de sa régularité et de son bien-fondé peuvent, quel que soit le sens de la décision prise par l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, être invoqués devant le juge saisi de cette décision. D'autre part, l'administration et le juge administratif doivent, pour l'application des règles d'urbanisme relatives à la desserte et à l'accès des engins d'incendie et de secours, s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie.

4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que l'accès au projet est prévu par la rue de l'Ecole qui est à sens unique, et débouche soit au Nord sur la route départementale 21b, d'une largeur selon la commune d'environ 4 mètres avec un étranglement sur les cinquante premiers mètres à 3,80 mètres, soit à l'Ouest sur l'ex-chemin départemental n° 54, d'une largeur comprise selon la commune entre 4 mètres et 4,50 mètres, avec un rétrécissement à 3,70 mètres, ces deux dernières voies étant à double sens. Cette largeur de la voie publique qui, en l'absence de précision contraire, correspond à la partie de la chaussée ouverte à la circulation des véhicules et aussi à la partie de l'emprise réservée au passage des piétons apparaît suffisante, eu égard à la modestie du projet décrit au point 1. Si la commune soutient que ces voies desserviraient déjà soixante-dix logements, elle ne le démontre pas. En tout état de cause, elle ne peut se fonder, pour refuser le permis de construire sollicité, sur les difficultés générales de la circulation dans le secteur où devait être implantée la construction, mais seulement sur les conditions dans lesquelles cette construction sera directement desservie. Enfin l'éventuel stationnement irrégulier des véhicules sur cette voie est sans incidence sur cette appréciation. L'avis défavorable du préfet est donc entaché d'erreur d'appréciation. Par suite, l'arrêté du maire qui se fonde sur un tel avis est également illégal.

5. Toutefois l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

6. La commune de Berre l'Etang soutient que le refus en litige pouvait également se fonder sur l'article III-A du plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) qui interdit le changement de destination conduisant à augmenter la population exposée dans les zones bleues à risques modérés comme en l'espèce. Le requérant ne conteste pas que sa parcelle se situe en zone bleue du PPRI. Et l'article III-A du PPRI interdit, pour les constructions existantes à la date du PPRI, notamment le changement de destination conduisant à augmenter la population exposée. M. B... excipe de l'illégalité de ce règlement en soutenant que les constructions nouvelles avec prescriptions ne sont pas interdites, ce qui constituerait selon lui une rupture d'égalité. Mais un règlement peut réglementer de manière différente des situations différentes. Or un changement de destination d'une construction existante ne saurait être assimilé à une construction nouvelle, dont l'édification est soumise à diverses prescriptions de nature à limiter l'exposition au risque en cause. Le projet décrit au point 1 doit être regardé comme un changement de destination au sens de l'article III-A du PPRI. Et le requérant ne peut utilement se prévaloir d'un porter à connaissance du risque communiqué aux communes le 25 août 2016, soit postérieurement à la décision attaquée, dont la légalité s'apprécie à la date de son édiction. Dans ces conditions, le motif tiré de la méconnaissance de l'article III-A du PPRI pouvait légalement fonder la décision de refus attaquée.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de M. B... dirigées contre la commune de Berre l'Etang qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Et il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme que réclame la commune de Berre l'Etang en application de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Berre l'Etang formées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et à la commune de Berre l'Etang.

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2018, où siégeaient :

- M. Poujade, président de chambre,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme Gougot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 octobre 2018.

3

N° 16MA03147


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA03147
Date de la décision : 31/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Procédure d'attribution.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation nationale - Règlement national d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : SELARL ANDREANI-HUMBERT-COLLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-10-31;16ma03147 ?
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