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26/10/2018 | FRANCE | N°18MA00711

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 26 octobre 2018, 18MA00711


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2017 par lequel le préfet de la Corse-du-Sud a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1701205 du 18 janvier 2018, le tribunal administratif de Bastia a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le

15 février 2018, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2017 par lequel le préfet de la Corse-du-Sud a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1701205 du 18 janvier 2018, le tribunal administratif de Bastia a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 février 2018, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 janvier 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2017 du préfet de la Corse-du-Sud ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Corse-du-Sud de lui délivrer un titre de séjour provisoire dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 250 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;

- en vertu de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, cette décision doit faire l'objet d'une motivation spécifique en fait et en droit portant sur le principe même de l'obligation de quitter le territoire français ;

- les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile méconnaissent les prescriptions communautaires issues de la directive du 16 décembre 2008 ;

- à défaut de mentionner dans cette décision d'éloignement les termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet ne pouvait retenir une motivation confondue avec celle relative au refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- il établit sa présence en France depuis de nombreuses années ;

- la décision querellée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 avril 2018, le préfet de la Corse-du-Sud conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Coutier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 18 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 septembre 2017 par lequel le préfet de la Corse-du-Sud a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 : " 1. Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ; Aux termes de l'article 3 de la même directive : " Aux fins de la présente directive, on entend par : / (...) 4) " décision de retour " : une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d'un ressortissant d'un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour (...) ".

4. M. A... ne peut d'abord utilement se prévaloir directement de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 au soutien de son moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 29 septembre 2017 dès lors qu'à la date de cette décision, ladite directive avait été transposée en droit interne.

5. Par ailleurs, lorsqu'une obligation de quitter le territoire français assortit un refus de séjour, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de mention spécifique. Par suite, les dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne dispense pas de toute motivation la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne sont pas incompatibles avec celles de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008.

6. En l'espèce, le préfet vise, dans l'arrêté querellé, les textes applicables à la situation de M. A..., particulièrement l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui fonde les obligations de quitter le territoire français, la date et les conditions dans lesquelles ce dernier est entré en France, enfin l'examen qu'il a fait de l'ensemble de la situation personnelle et familiale de l'intéressé. L'autorité préfectorale n'est pas tenue de préciser de manière exhaustive le détail de l'ensemble des éléments considérés. Ainsi, cet arrêté ne présente pas un caractère stéréotypé et est suffisamment motivé au regard des exigences de motivation prévues par les articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 désormais codifiés respectivement aux articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. M. A... n'établit pas, par les pièces éparses qu'il produit dans l'instance, sa présence continue et habituelle en France depuis le 17 novembre 2006, date à laquelle il y est entré sous couvert d'un visa " travailleur saisonnier " afin d'exécuter un contrat de travail de deux mois en qualité d'aide saisonnier agricole. Le document qui lui a été délivré par le consulat du Maroc à Bastia le 7 janvier 2010, valable cinq ans, qui mentionne une date d'entrée en France le 17 novembre 2006 et qui précise qu'il doit être retourné au consulat lorsque son détenteur rentre définitivement au Maroc ne saurait constituer un élément probant d'une résidence continue et habituelle sur le territoire français. M. A... ne démontre pas une insertion particulière dans la société française. Alors même qu'il serait hébergé par son frère à Bonifacio, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident ses parents et deux membres de sa fratrie et où il a vécu lui-même au moins jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans. Dans ces conditions, M. A..., célibataire et sans enfant, n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée, au regard des buts poursuivis par l'administration, porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Par suite, cette décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Corse-du-Sud.

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président-assesseur,

- M. Coutier, premier conseiller.

Lu en audience publique le 26 octobre 2018.

2

N° 18MA00711

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA00711
Date de la décision : 26/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : PAOLINI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-10-26;18ma00711 ?
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