Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... D...épouse E...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande d'admission au séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours.
Par un jugement n° 1606524 en date du 28 mars 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 27 juillet 2017, Mme D... épouseE..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 mars 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 7 décembre 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " étudiant ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir et subsidiairement, d'ordonner le réexamen de sa demande dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son conseil renonce à la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée ;
- cette décision n'a pas été précédée d'un examen réel et complet de sa situation ;
- le préfet n'a pas fait application de son pouvoir de régularisation ;
- le préfet a commis une erreur de droit en opposant l'absence de visa de long séjour ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et porte une atteinte excessive à son droit au respect de la vie privée et familiale tel que garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant a été méconnu ;
- sa pathologie fait obstacle à toute mesure d'éloignement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 août 2018, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 juin 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-gabonais du 2 décembre 1992 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., née le 5 janvier 1983, de nationalité gabonaise, relève appel du jugement du 28 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 décembre 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...). " ; et qu'aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
3. Le préfet mentionne, dans la décision en litige, les textes applicables à la situation de Mme D..., la date et les conditions dans lesquelles celle-ci est entrée pour la dernière fois en France, le fondement sur lequel l'intéressée a présenté sa demande d'admission au séjour, enfin l'examen qu'il a fait de l'ensemble de sa situation personnelle et familiale. L'autorité préfectorale n'est pas tenue de préciser de manière exhaustive le détail de l'ensemble des éléments considérés, et n'avait pas, notamment, à indiquer le fait qu'un des deux enfants de l'intéressée est né en France d'un père ressortissant gabonais titulaire d'une carte de séjour temporaire en cours de validité mais dont les conditions de ressources sont insuffisantes pour demander le bénéfice du regroupement familial. Par ailleurs, l'omission dans les visas de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant n'est pas par elle-même de nature à affecter la légalité de l'arrêté. Ainsi, cette décision n'est pas entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle au seul motif que le préfet n'aurait pas tenu compte de ces éléments et est suffisamment motivée.
4. Aux termes de l'article 10 de l'accord franco-gabonais du 2 décembre 1992 susvisé : " Pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, les ressortissants gabonais doivent posséder un titre de séjour. (...) Ces titres de séjour sont délivrés conformément à la législation de l'Etat d'accueil " ; Aux termes des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : A l' étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. D'une part, le préfet de l'Hérault pouvait légalement fonder le rejet de la demande de carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " de Mme D... sur le motif tiré de ce qu'elle avait la possibilité de venir légalement en France sous couvert du regroupement familial sans qu'il n'ait l'obligation à ce stade d'apprécier si le demandeur justifiait de ressources suffisantes. Par suite, le préfet de l'Hérault n'a pas entaché sa décision d'erreur de droit.
6. D'autre part, si Mme D..., âgée de trente-trois ans à la date de l'arrêté en litige, fait valoir qu'elle a séjourné régulièrement en France de 2011 à 2014 sous couvert d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", s'est mariée en 2012 à Montpellier avec un ressortissant gabonais titulaire d'une carte de séjour temporaire en cours de validité avec qui elle a eu un fils né le 27 juillet 2014 et qu'après être retournée au Gabon pour présenter son enfant à sa famille est revenue le 5 août 2015 avec son autre fils, né d'un autre père le 19 janvier 2000 à Libreville et poursuivant sa scolarité en France, il ressort des pièces du dossier que Mme D... ne peut se prévaloir d'une présence continue et permanente en France depuis 2011 dès lors qu'elle a séjourné avec son second enfant dans son pays d'origine, sans son époux, presque un an. Par ailleurs, elle ne justifie pas, par les seules pièces qu'elle verse au dossier, que son couple serait en danger en cas de retour dans son pays d'origine, dans la mesure où si elle dit craindre la violence de sa famille, notamment de son oncle, et que l'implication politique de son époux lui fait redouter les réactions à son égard des autorités gabonaises, il est constat qu'elle est retournée en 2014 et 2015 pendant presque un an dans sa famille pour leur présenter son dernier enfant, période au cours de laquelle son mari les a même rejoints. Ainsi, alors que son époux séjourne sous couvert d'une carte de séjour temporaire, aucune circonstance ne s'oppose à ce que l'intéressée retourne avec son époux et leurs enfants dans leur pays d'origine où vivent sa mère, ses trois frères et ses deux soeurs. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et eu égard notamment au caractère récent de la vie familiale en France dont se prévaut l'intéressée, l'arrêté du préfet de l'Hérault n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. Aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. ". Aux termes de l'article L. 313- 7 du même code : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France. ".
8. Il ressort des pièces du dossier que Mme D..., qui par ailleurs n'a pas engagé d'études suivies, n'était pas titulaire d'un visa de long séjour alors qu'aucune convention internationale régulièrement publiée ne la dispensait de cette obligation. Dès lors, le préfet de l'Hérault pouvait légalement lui refuser la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant au motif que son passeport était dépourvu de visa long séjour.
9. Si Mme D... a déjà résidé en France de 2011 à 2014 en qualité d'étudiante inscrite en master I de psychologie à l'université de Poitiers, ce n'est que sous couvert de titres de séjour ne lui donnant pas vocation à s'installer de manière durable sur le territoire français. En outre, comme il a été dit précédemment, à l'expiration de son titre de séjour, le 15 octobre 2014, elle n'a pas sollicité son renouvellement et est repartie dans son pays d'origine avec son enfant pendant presque un an. Ainsi la durée de son séjour en France ne saurait constituer un motif humanitaire ou exceptionnel. Par suite, le préfet de l'Hérault en refusant de faire usage de son pouvoir de régularisation n'a pas commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de Mme D....
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable au litige : " I- L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...) ; / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) " .
11. Il résulte de ces dispositions législatives que la mesure d'éloignement opposée à Mme D..., qui se trouvait dans le cas prévu par les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code précité, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle du refus de séjour, lequel est suffisamment motivé ainsi qu'il a été dit au point 3. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
13. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
14. Mme D..., qui a la même nationalité que son époux et ses deux enfants, n'établit pas l'existence d'obstacles à la reconstitution de la cellule familiale dans le pays d'origine. Par suite, l'arrêté en litige n'a pas méconnu l'intérêt supérieur des enfants de la requérante.
15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme A... D...épouse E...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2018, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 26 octobre 2018.
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N° 17MA03359
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