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18/10/2018 | FRANCE | N°17MA03574

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2018, 17MA03574


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner solidairement la communauté d'agglomération de Perpignan et la société Entreprises Morillon Courvol Courbot (EMCC) à lui verser la somme de 10 816,26 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 juin 2015, en réparation des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait de l'exécution de travaux publics de dragage dans le port de Barcarès.

Par un jugement n° 1503156, 1503155 et 1602229 du 15 juin 2017, le t

ribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner solidairement la communauté d'agglomération de Perpignan et la société Entreprises Morillon Courvol Courbot (EMCC) à lui verser la somme de 10 816,26 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 juin 2015, en réparation des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait de l'exécution de travaux publics de dragage dans le port de Barcarès.

Par un jugement n° 1503156, 1503155 et 1602229 du 15 juin 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 août 2017, M.C... B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de condamner solidairement la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et la société EMCC à lui verser la somme de 11 820,31 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 juin 2015 ;

3°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et la société EMCC la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les dommages sont imputables à une opération de travaux publics à l'égard de laquelle il avait la qualité de tiers ;

- la signalisation a été défectueuse, ce qui constitue une faute ;

- il n'a commis aucune faute de nature à exonérer les responsables ;

- il établit les préjudices subis.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 avril 2018, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, représentée par la SELARL Phelip et associés, demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête présentée par M.B... ;

2°) à titre subsidiaire :

- de réduire le montant de l'indemnité susceptible d'être accordée ;

- de condamner la société EMCC à la garantir de la condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de M. B...la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. C...B..., qui ne justifie pas de sa qualité de propriétaire du bateau, ne dispose pas d'un intérêt à agir ;

- le défaut d'entretien normal de l'ouvrage n'est pas établi ;

- le lien de causalité entre le dommage et la présence d'une conduite de drague n'est pas démontré ;

- la victime a commis une faute de nature à l'exonérer totalement de sa responsabilité ;

- les préjudices allégués ne sont pas établis ;

- elle est fondée à être contractuellement garantie par la société EMCC.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 juin 2018, la société EMCC, devenue la société Vinci Construction Maritime et Fluvial, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter les conclusions dirigées à son encontre ;

2°) à titre subsidiaire :

- de réduire le montant de l'indemnité susceptible d'être accordée à M. B...;

- de condamner la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole à la garantir de la condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de M. B...la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. C...B..., qui ne justifie pas de sa qualité de propriétaire du bateau, ne dispose pas d'un intérêt à agir ;

- les pièces qu'il a produites en première instance sont irrecevables ;

- le lien de causalité entre le dommage et la présence d'une conduite de drague n'est pas démontré ;

- le défaut d'entretien normal de l'ouvrage n'est pas établi ;

- la victime a commis une faute de nature à l'exonérer totalement de sa responsabilité ;

- les préjudices allégués ne sont pas établis ;

- elle est fondée à être contractuellement garantie par la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole sur le fondement des articles 1103, 1193, 1217 et 1231-1 du code civil.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Merenne,

- et les conclusions de M. Argoud, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C...B...relève appel du jugement du 15 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la communauté d'agglomération Perpignan Méditerranée, devenue la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, et la société Entreprises Morillon Courvol Courbot (EMCC), devenue la société Vinci Construction Maritime et Fluvial, à l'indemniser des préjudices subis du fait d'une avarie de la vedette de pêche " Agathe Tyche " intervenue le 7 juin 2014 dans le chenal du port de Barcarès.

Sur les pièces produites par M.B... :

2. Les parties peuvent produire devant le juge administratif les pièces qu'elles estiment utiles à l'appui de leur argumentation. Le juge forme sa propre conviction quant à leur valeur une fois celles-ci communiquées aux autres parties conformément au principe du caractère contradictoire de l'instruction. Il suit de là que la société Vinci Construction Maritime et Fluvial ne peut utilement contester la recevabilité des pièces produites par M. B...au motif qu'elles ne respecteraient pas un formalisme déterminé.

Sur la responsabilité :

3. Par un acte d'engagement signé le 10 avril 2012, la communauté d'agglomération Perpignan Méditerranée a notamment confié à la société EMCC la réalisation de travaux de dragage dans le port de Barcarès du 2 au 30 juin 2014. Ces travaux ont conduit à la mise en place d'une conduite de drague partiellement immergée en largeur du chenal.

4. Il résulte de l'instruction que le 7 juin 2014 au matin, la vedette de pêche " Agathe Tyche " a été victime d'une avarie dans le chenal du port de Barcarès. Le bateau a été stoppé net dans sa progression et n'a pu manoeuvrer, avant d'être remorqué par d'autres bateaux venus à son secours. La conduite de dragage était immergée à l'entrée du port à approximativement 1,50 mètre de profondeur selon un sondage effectué le même jour par un patron pêcheur, ce qui correspond au tirant d'eau du bateau " Agathe Tyche ". Selon le procès-verbal de constat du 16 juin 2014, la conduite de drague, examinée après émersion à l'occasion d'une expertise amiable, comporte à proximité du lieu où s'est produite l'avarie une trace bleue, soit la couleur de la coque du navire avarié. Lors de cette même expertise, le préposé de la société EMCC a retrouvé dans les pales de l'hélice un morceau de plastique provenant de la conduite de drague, qui est non pas en métal comme le soutient devant la cour la société Vinci Construction Maritime et Fluvial, mais en polyéthylène haute densité. Le rapport de mer rédigé par M. C...B...indique qu'il a été induit en erreur par la dérive sur plusieurs dizaines de mètres, en raison de la houle, de la bouée rouge destinée à signaler la voie, ce qui a été confirmé par la capitainerie du port. Les autres pièces du dossier ne révèlent aucun autre obstacle à la circulation maritime dans le chenal. M. B...est en conséquence fondé à soutenir que l'avarie dont a été victime le bateau " Agathe Tyche ", qui a détérioré l'hélice, le gouvernail et la crapaudine du navire, est imputable à la dérive de la bouée de signalement de la canalisation installée à l'occasion de travaux de dragage dans le port de Barcarès, ce qui constitue un défaut d'entretien normal de nature à engager la responsabilité des défendeurs.

5. Il résulte de l'instruction que M.B..., patron pêcheur averti, a respecté les consignes de prudence de l'avertissement urgent de navigation (" AVURNAV ") des autorités maritimes enjoignant aux navires de réduire leur vitesse et de naviguer avec prudence aux abords du chantier. Ainsi qu'il a été vu au point précédent, M. B...a été induit en erreur par un défaut de signalisation de l'obstacle résultant du déport d'une bouée. Il n'a ce faisant commis aucune faute de nature à exonérer les défendeurs de leur responsabilité, même partiellement.

Sur les préjudices :

6. Le préjudice matériel doit être évalué au montant du coût des travaux de réparation, dont il résulte de l'instruction qu'ils se sont élevés, sans amélioration du navire, à 12 640,63 euros. Ces travaux ont été pris en charge par l'assureur du navire à hauteur de 7 324,37 euros. Il suit de là que le préjudice matériel subi par M. C...B..., propriétaire pour moitié du navire avec son frère Stéphane et qui a pris en charge la moitié des travaux de réparation, doit être indemnisé à hauteur de 2 658,13 euros.

7. Il résulte de l'instruction que M. B...a perçu en 2014 des revenus supérieurs à ceux de l'année 2013, sans que les pièces produites ne mettent en évidence une baisse temporaire de son activité en juin 2014. Les défendeurs soutiennent sans être contredits sur ce point que M. B...a pu continuer d'exercer son activité professionnelle par l'utilisation d'un autre navire pendant la période d'immobilisation de l' " Agathe Tyche ". Le manque à gagner dont M. B...demande l'indemnisation ne peut dans ces conditions être regardé comme établi.

8. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de condamner solidairement la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et la société Vinci Construction Maritime et Fluvial à verser la somme de 2 658,13 euros à M. C...B.... Cette somme portera intérêts à compter du 3 juin 2015, date d'enregistrement de la demande de M. B...par le greffe du tribunal administratif.

Sur les appels en garantie :

9. Ainsi qu'il a été vu au point 4, l'avarie dont le bateau " Agathe Tyche " a été victime a pour origine une insuffisance de balisage. La charge des dommages doit en conséquence être supportée par la société Vinci Construction Maritime Fluvial en application de l'article 7.2 de l'acte d'engagement conclu entre la communauté d'agglomération et la société EMCC qui prévoit que : " Tout accident résultant d'une insuffisance de balisage sera à la charge de l'entreprise. " La communauté urbaine est donc fondée à être contractuellement garantie par la société Vinci Construction Maritime et Fluvial de la condamnation prononcée au point précédent.

10. L'appel en garantie réciproquement formé à son encontre par la société Vinci Construction Maritime et Fluvial doit en conséquence être rejeté, sans qu'il soit besoin pour la cour d'examiner la recevabilité de ces conclusions en appel.

Sur les frais liés au litige :

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Vinci Construction Maritime et Fluvial le versement de la somme de 2 000 euros à M. B...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

12. Les dispositions de cet article font en revanche obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et de la société Vinci Construction Maritime et Fluvial présentées sur le même fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et la société Vinci Construction Maritime et Fluvial sont solidairement condamnées à verser la somme de 2 658,13 euros à M. C...B.... Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 3 juin 2015.

Article 2 : La société Vinci Construction Maritime et Fluvial garantira la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole de l'intégralité de la condamnation prononcée à l'article 1er.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 15 juin 2017 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 4 : La société Vinci Construction Maritime et Fluvial versera à M. C...B...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et à la société Vinci Construction Maritime et Fluvial.

Délibéré après l'audience du 4 octobre 2018, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,

- M. Merenne, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 octobre 2018.

2

N° 17MA03574


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA03574
Date de la décision : 18/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

50-027 Ports. Travaux portuaires.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : DESSALCES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-10-18;17ma03574 ?
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