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15/10/2018 | FRANCE | N°16MA04387

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 15 octobre 2018, 16MA04387


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MmeA..., Nathalie D...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Marseille :

- d'annuler la décision implicite par laquelle la communauté urbaine Marseille Provence Métropole (CUMPM), aux droits de laquelle vient la métropole Aix-Marseille-Provence (MAMP), a refusé de faire cesser l'emprise irrégulière sur la parcelle de terrain cadastrée AO n° 536, au lieu-dit Le Bosquet, sur le territoire de la commune de Gignac-la-Nerthe, dont elle est propriétaire,

- de condamner la métropole

à lui payer la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir su...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MmeA..., Nathalie D...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Marseille :

- d'annuler la décision implicite par laquelle la communauté urbaine Marseille Provence Métropole (CUMPM), aux droits de laquelle vient la métropole Aix-Marseille-Provence (MAMP), a refusé de faire cesser l'emprise irrégulière sur la parcelle de terrain cadastrée AO n° 536, au lieu-dit Le Bosquet, sur le territoire de la commune de Gignac-la-Nerthe, dont elle est propriétaire,

- de condamner la métropole à lui payer la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi,

- et d'enjoindre à la métropole de faire cesser ladite emprise irrégulière et de remettre les lieux dans leur état d'origine.

Par un jugement n° 1405304 du 9 novembre 2016, le tribunal administratif de Marseille. a rejeté ces demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 29 novembre 2016, 18 mai 2017 et 18 janvier 2018, Mme A...C..., représentée par MeE..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 novembre 2016 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle la communauté urbaine Marseille Provence Métropole (CUMPM), aux droits de laquelle vient la métropole Aix-Marseille-Provence (MAMP), a refusé de faire cesser l'emprise irrégulière ;

3°) d'enjoindre à la métropole de faire cesser ladite emprise irrégulière et de remettre les lieux dans leur état d'origine, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir ;

4°) de condamner la métropole à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la faute de la communauté urbaine ;

5°) de mettre à la charge de la métropole une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande est recevable ;

- l'emprise qu'elle a subie est irrégulière ;

- la métropole est à l'origine de cette emprise.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 avril 2017, 29 décembre 2017 et 5 mars 2018, la métropole Aix-Marseille-Provence, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions en annulation et en indemnisation sont nouvelles en appel ;

- les conclusions à fins d'injonction au principal sont irrecevables ;

- les conclusions à fins d'annulation ont été présentées en première instance après l'expiration des délais de recours contentieux ;

- la demande indemnitaire n'a pas été précédée d'une demande préalable ;

- les autres moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales. ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marcovici,

- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,

- et les observations de Me F...substituant MeE..., représentant MmeC..., et de MeB..., représentant la métropole Aix-Marseille-Provence.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C...relève appel du jugement du 9 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision par laquelle la communauté urbaine Marseille Provence Métropole a refusé de faire droit à sa demande relative à l'emprise irrégulière sur sa propriété, à la condamnation de la métropole Aix-Marseille-Provence qui a succédé aux droits de la communauté urbaine à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi et à ce qu'il soit d'enjoint à la métropole de faire cesser ladite emprise irrégulière et de remettre les lieux dans leur état d'origine.

Sur la recevabilité de la demande en annulation et en injonction présentée en première instance :

2. Si, aux termes de sa demande introductive devant le tribunal administratif, Mme C... avait exclusivement conclu à ce qu'il soit enjoint à la communauté urbaine Marseille Provence Métropole de faire cesser l'emprise irrégulière sur sa propriété, ces conclusions devaient être regardées, eu égard à l'argumentation développée et à l'office du juge en la matière, comme liées par la décision implicite née du silence gardé sur la demande en ce sens, qu'elle avait adressée le 24 mars 2014 à la communauté urbaine. La requérante a, du reste, explicitement formulé, aux termes de son mémoire en réplique enregistré le 28 juin 2016, des conclusions en annulation de cette décision. Ainsi, la métropole Aix-Marseille-Provence n'est fondée à soutenir ni que ces conclusions en annulation sont nouvelles en appel, ni qu'elles auraient été présentées de façon irrecevable en première instance, ni, enfin, que les conclusions à fin d'injonction, présentées à titre principal, étaient elles-mêmes irrecevables.

Sur la recevabilité de la demande indemnitaire présentée en première instance :

3. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dans sa rédaction en vigueur à la date à laquelle Mme C...a présenté sa requête devant le tribunal administratif : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ".

4. Mme C...a également présenté devant le tribunal administratif des conclusions indemnitaires, aux termes de son mémoire enregistré le 28 juin 2016. En application des dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative alors en vigueur, la présentation de telles conclusions n'était pas subordonnée au rejet d'une réclamation préalable, dès lors que le litige relevait de la matière des travaux publics. Par suite, la métropole Aix-Marseille-Provence n'est fondée à soutenir ni que ces conclusions en annulation sont nouvelles en appel, ni qu'elles auraient été présentées de façon irrecevable en première instance.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la demande en annulation et en injonction :

5. Mme C...est propriétaire d'une parcelle de terrain cadastrée AO n° 536, au lieu-dit Le Bosquet, sur le territoire de la commune de Gignac-la-Nerthe, bordée par l'avenue des Bosquets. Il est constant qu'une bande de 30 m² appartenant à sa propriété a été goudronnée et intégrée de fait à l'avenue des Bosquets. Si la métropole persiste à contester que la communauté urbaine serait à l'origine de ce goudronnage, elle est, en tout état de cause, en tant que gestionnaire de la voirie concernée par ces travaux, seule compétente pour faire cesser l'emprise irrégulière.

6. Lorsque le juge administratif est saisi d'une demande tendant à l'annulation d'une décision rejetant une demande de démolition d'un ouvrage public édifié irrégulièrement et à ce que cette démolition soit ordonnée, il lui appartient, pour déterminer, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, s'il convient de faire droit à cette demande, de rechercher, d'abord, si, eu égard notamment à la nature de l'irrégularité, une régularisation appropriée est possible. Dans la négative, il lui revient ensuite de prendre en considération, d'une part les inconvénients que la présence de l'ouvrage entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence et notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'ouvrage, d'autre part, les conséquences de la démolition pour l'intérêt général, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si la démolition n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général.

7. En l'espèce, il résulte de ce qui a été dit plus haut que l'emprise dont se plaint Mme C... est irrégulière. Toutefois, cette emprise est susceptible de faire l'objet d'une régularisation soit par acquisition amiable à un juste prix de la parcelle concernée, soit, le cas échéant, par voie d'expropriation qui paraît, en l'état du dossier, susceptible d'être fondée sur l'utilité publique de l'opération. Dès lors, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande d'injonction formulée par MmeC....

8. Il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande principale.

En ce qui concerne la demande indemnitaire :

9. Mme C...demande la condamnation de la métropole Aix-Marseille-Provence à réparer le préjudice qu'elle a subi du seul fait que les bornes délimitant sa propriété ont été irrégulièrement recouvertes. S'il résulte de l'instruction que ces bornes ont pu être remises en place, il y a néanmoins lieu de condamner la métropole Aix-Marseille-Provence à verser à Mme C... une somme de 3 000 euros, en réparation des troubles dans ses conditions d'existence qu'elle a ainsi subis.

10. La requérante est, en conséquence, fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté ses conclusions indemnitaires.

Sur les frais de l'instance :

11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la métropole Aix-Marseille-Provence une somme de 2 000 euros, à verser à Mme C...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, en revanche, de faire droit aux conclusions de même objet présentées par la métropole Aix-Marseille-Provence.

D É C I D E :

Article 1er : La métropole Aix-Marseille-Provence est condamnée à verser à Mme C...une somme de 3 000 euros en réparation de ses troubles dans ses conditions d'existence.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 novembre 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Il est mis à la charge de la métropole Aix-Marseille-Provence une somme de 2 000 euros à verser à Mme C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...et les conclusions de la métropole Aix-Marseille-Provence présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à MmeA..., Nathalie D...épouse C...et à la métropole Aix-Marseille-Provence.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2018, où siégeaient :

- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,

- M. Marcovici, président assesseur,

- M. Pecchioli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 octobre 2018.

2

N° 16MA04387


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA04387
Date de la décision : 15/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

26-04-04-01 Droits civils et individuels. Droit de propriété. Actes des autorités administratives concernant les biens privés. Voie de fait et emprise irrégulière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : SOCIÉTÉ D'AVOCATS VEDESI

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-10-15;16ma04387 ?
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