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11/10/2018 | FRANCE | N°16MA02612

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 11 octobre 2018, 16MA02612


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Bormes-les-Mimosas a rejeté son recours administratif dirigé contre la décision du 22 février 2013 portant opposition à déclaration préalable de travaux et d'enjoindre à la commune de Bormes-les-Mimosas de ne pas s'opposer à sa déclaration préalable.

Par un jugement n° 1301362 du 21 avril 2016, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédu

re devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 juin 2016, Mme C..., représentée pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Bormes-les-Mimosas a rejeté son recours administratif dirigé contre la décision du 22 février 2013 portant opposition à déclaration préalable de travaux et d'enjoindre à la commune de Bormes-les-Mimosas de ne pas s'opposer à sa déclaration préalable.

Par un jugement n° 1301362 du 21 avril 2016, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 juin 2016, Mme C..., représentée par la SELARL d'avocats Sansone, doit être regardée comme demandant à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 21 avril 2016 avec toutes les conséquences de droit ;

2°) d'annuler la décision du 22 février 2013 du maire de la commune de Bormes-les-Mimosas portant opposition à déclaration préalable de travaux ;

3°) d'enjoindre à la commune de Bormes-les-Mimosas de lui accorder l'autorisation demandée ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bormes-les-Mimosas la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté en litige n'est pas motivé ;

- la commune ne peut se prévaloir du plan de prévention des risques d'incendie de forêt qui n'était pas opposable à la date de la décision attaquée ; en outre, le plan de prévention des risques d'incendie de forêt en cours d'élaboration autorise les travaux de rénovation qu'elle souhaite effectuer ;

- le projet n'a pas pour objet la réalisation d'une construction nouvelle ni d'un accroissement de " la surface de vie " ; le rafraichissement d'une petite bâtisse n'engendre aucun risque en matière d'incendie ; le secteur est desservi par le réseau d'adduction d'eau et par une voie carrossable.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 octobre 2016, la commune de Bormes-les-Mimosas, représentée par le cabinet d'avocats Grimaldi-Molina, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme C... de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance est irrecevable car l'intéressée s'est bornée à demander le rejet de son recours gracieux dirigé contre la décision d'opposition à sa déclaration préalable de travaux sans demander l'annulation de cette décision ;

- le secteur où se situe la parcelle de la requérante est fortement boisé de sorte que le refus d'autorisation est légal en application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme eu égard au risque d'incendie lié à l'accroissement de la fréquentation de la construction du fait des travaux en litige.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Portail,

- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la commune de Bormes-les-Mimosas.

1. Considérant que Mme C... est propriétaire d'une parcelle cadastrée section AI n° 50, située 1183 chemin du moulin d'eau, sur le territoire de la commune de Bormes-les-Mimosas ; qu'elle a déposé le 26 novembre 2012 une déclaration de travaux, complétée le 30 janvier 2013, avec pour objet le ravalement des façades, la réfection de la toiture et le remplacement des menuiseries extérieures d'une construction existant sur cette parcelle ; que par un arrêté du 22 février 2013, le maire de la commune de Bormes-les-Mimosas s'est opposé à cette déclaration de travaux en se fondant sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, en raison de l'exposition des lieux à un risque d'incendie ; que Mme C... relève appel du jugement du 21 avril 2016 par lequel le tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 février 2013 ;

Sur les fins de non recevoir opposées par la commune de Bormes-les-Mimosas à la demande de première instance :

2. Considérant en premier lieu que le moyen tiré de ce que la demande de première instance ne comporterait pas le timbre fiscal exigé par les dispositions des articles R. 761-1 du code de justice administrative et 1635 bis Q du code général des impôts, dans leur rédaction qui était en vigueur à la date de la demande soumise au tribunal administratif par Mme C..., manque en fait ;

3. Considérant en deuxième lieu qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à la date de la demande soumise au tribunal : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans le délai de deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaqué. " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commune de Bormes-les-Mimosas a reçu le 27 mars 2013, donc dans le délai de recours contentieux, le recours administratif formé par Mme C... contre l'arrêté du 22 février 2013 ; que le silence gardé par le maire de la commune de Bormes-les-Mimosas sur ce recours administratif qui a conservé le délai de recours contentieux a fait naitre au bout de deux mois une décision implicite de rejet ; que la demande enregistrée devant le tribunal administratif de Toulon le 29 mai 2013 l'a donc été dans le délai de recours contentieux ;

5. Considérant en troisième lieu qu'il est toujours loisible à la personne intéressée, sauf à ce que des dispositions spéciales en disposent autrement, de former à l'encontre d'une décision administrative un recours gracieux devant l'auteur de cet acte et de ne former un recours contentieux que lorsque le recours gracieux a été rejeté ; que l'exercice du recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d'un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l'autorité administrative ; qu'il appartient, en conséquence, au juge administratif, s'il est saisi dans le délai de recours contentieux qui a recommencé de courir à compter de la notification du rejet du recours gracieux, de conclusions dirigées formellement contre le seul rejet du recours gracieux, d'interpréter les conclusions qui lui sont soumises comme étant aussi dirigées contre la décision administrative initiale ; que dès lors, la fin de non-recevoir tirée de ce que Mme C... s'est bornée en première instance à demander l'annulation de la décision qui a rejeté son recours gracieux doit être écartée ;

6. Considérant enfin que les conclusions par lesquelles Mme C... a demandé qu'il soit enjoint à la commune de Bormes-les-Mimosas de lui délivrer une autorisation de travaux doivent être regardées comme une demande fondée sur les dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, tendant à ce que la Cour prescrive cette injonction aux fins d'exécution de l'arrêt à intervenir ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'écarter les fins de non-recevoir opposées par la commune de Bormes-les-Mimosas ;

Sur la légalité de l'arrêté du 22 février 2013 :

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. " ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les travaux objet de la déclaration portent exclusivement sur la rénovation d'un cabanon existant sans augmentation de superficie, par réfection de la toiture, remplacement des menuiseries existantes par des menuiseries bois et ravalement des façades ; que si à la date de la décision attaquée le plan de prévention des risques d'incendie était en cours d'élaboration et n'était pas opposable, il appartient au juge comme à l'administration de prendre en compte les informations utilisées pour cette élaboration ; que si ce projet de plan de prévention des risques d'incendie classe le terrain en zone d'aléa feu de forêt fort, il n'exclut pas les travaux de rénovation des bâtiments existants, en l'absence de changement de destination, dès lors qu'ils n'augmentent pas la vulnérabilité des personnes et des biens ; que le projet n'entraîne pas de changement de destination de ce bâtiment, qui a servi au logement d'ouvriers agricoles et dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il a perdu sa vocation d'habitation ; qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que le bâtiment rénové est destiné à un habitat permanent et que les travaux en litige sont de nature à augmenter la vulnérabilité des personnes et des biens ; que le terrain d'assiette du projet est situé dans un secteur naturel, mais peu boisé ; qu'il existe des bâtiments à usage professionnel à proximité ; que ce terrain est desservi par la voirie ; qu'en s'opposant aux travaux objet de la déclaration, au motif que le projet est de nature à porter atteinte à la sécurité publique en raison du risque d'incendie, le maire de la commune de Bormes-les-Mimosas, eu égard à la nature des travaux, a méconnu les dispositions précitées de l'article R. 111-2 ;

10. Pour l'application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens de la requête n'est susceptible de fonder l'annulation de l'arrêté du 22 février 2013.

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande et à demander l'annulation du jugement attaqué et de l'arrêté du 22 février 2013 ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;

13. Considérant que le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le maire de la commune de Bormes-les-Mimosas délivre à la requérante une décision de non opposition de réaliser les travaux objet de sa déclaration ; qu'en revanche, il implique qu'il prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction sur sa déclaration de travaux ; qu'il y a lieu de lui adresser une injonction en ce sens ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de Mme C... une somme au titre des frais exposés par la commune de Bormes-les-Mimosas et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce et sur le fondement de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Bormes-les-Mimosas la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la requérante et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 21 avril 2016 et l'arrêté du 22 février 2013 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la commune de Bormes-les-Mimosas de prendre une nouvelle décision sur la déclaration de travaux présentée par Mme C..., dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : La commune de Bormes-les-Mimosas versera à Mme C... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C...et à la commune de Bormes-les-Mimosas.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2018, où siégeaient :

- M. Poujade, président de chambre,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme Gougot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 octobre 2018.

3

N° 16MA02612


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA02612
Date de la décision : 11/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-045-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Régimes de déclaration préalable. Déclaration de travaux exemptés de permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : SELARL MAUDUIT LOPASSO GOIRAND et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-10-11;16ma02612 ?
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