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25/09/2018 | FRANCE | N°17MA04814

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 25 septembre 2018, 17MA04814


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 13 avril 2015 par laquelle le conseil municipal de Brouzet-lès-Alès a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune en tant qu'elle classe la parcelle, cadastrée section C n° 320, en zone 2AU et qu'elle délimite un périmètre de protection affectant sa parcelle, cadastrée section C n° 580, d'un rayon de 50 mètres et d'enjoindre à la commune de Brouzet-lès-Alès de modifier le classement de la parcelle section n°

C 320.

Par un jugement n° 1503132 du 17 octobre 2017, le tribunal administratif...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 13 avril 2015 par laquelle le conseil municipal de Brouzet-lès-Alès a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune en tant qu'elle classe la parcelle, cadastrée section C n° 320, en zone 2AU et qu'elle délimite un périmètre de protection affectant sa parcelle, cadastrée section C n° 580, d'un rayon de 50 mètres et d'enjoindre à la commune de Brouzet-lès-Alès de modifier le classement de la parcelle section n° C 320.

Par un jugement n° 1503132 du 17 octobre 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2017, M.C..., représenté par la SCP d'avocats Massal-Raoult-Alardet-Vergani, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 17 octobre 2017 ;

2°) d'annuler la délibération du 13 avril 2015 par laquelle le conseil municipal de Brouzet-lès-Alès a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune en tant qu'elle classe la parcelle cadastrée section C n° 320 en zone 2AU et qu'elle délimite un périmètre de protection affectant sa parcelle cadastrée section C n° 580, d'un rayon de 50 mètres ;

3°) d'enjoindre à la commune de Brouzet-lès-Alès de modifier le périmètre de protection affectant sa parcelle ;

4 °) de mettre à la charge de la commune de Brouzet-lès-Alès une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la délibération en cause méconnaît l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales et est entachée de détournement de pouvoir ;

- les dispositions de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime et celles de l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Gard s'imposent à l'autorité administrative et ont été méconnues.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 13 avril 2018 et le 10 juillet 2018, la commune de Brouzet-lès-Alès, représentée par la SCP d'avocats CGCB, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de M. C...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés ;

- en tout état de cause, la demande de première instance était irrecevable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lopa Dufrénot,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant la commune de Brouzet-lès-Alès.

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 13 avril 2015, le conseil municipal de Brouzet-lès-Alès a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. M.C..., propriétaire la parcelle cadastrée section C n° 580 située sur le territoire, où il exploite une chèvrerie, a présenté, le 9 juin 2015, un recours gracieux auprès du maire de cette commune, afin de voir modifier le classement de la parcelle voisine cadastrée n° C 320 en zone 2AU. Par décision du 3 août 2015, notifiée le 10 août 2015, le maire de la commune Brouzet-lès-Alès a rejeté son recours. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande requalifiée comme tendant à l'annulation de la délibération du 13 avril 2015 en tant qu'elle classe la parcelle n° C 320 en zone 2AU et établit un périmètre de protection affectant notamment sa chèvrerie.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales dispose que sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil municipal intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires.

3. Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération. Cependant, s'agissant d'une délibération déterminant des prévisions et règles d'urbanisme applicables dans l'ensemble d'une commune, la circonstance qu'un conseiller municipal intéressé au classement d'une parcelle ait participé aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption ou à son vote n'est de nature à entraîner son illégalité que s'il ressort des pièces du dossier que, du fait de l'influence que ce conseiller a exercée, la délibération prend en compte son intérêt personnel.

4. Par la délibération du conseil municipal de Brouzet-lès-Alès en cause, la parcelle cadastrée section C n° 320, située lieu-dit la Vignasse, est intégrée à la zone 2AU. Il est constant que M.A..., propriétaire de cette parcelle, voisine du terrain d'assiette de l'exploitation de M.C..., a été élu, en 2008, adjoint en charge de la gestion des travaux et de l'état civil, son mandat ayant pris fin en 2014. Il ressort des pièces versées aux débats que, sous l'empire du plan d'occupation des sols de la commune, antérieur au plan approuvé par la délibération contestée, cette parcelle, partiellement constructible, était, pour partie, classée en zone NB, le reliquat étant classé en zone NDa en raison du périmètre de protection de l'ancienne station d'épuration. Au cours de la séance du 14 novembre 2012, cet adjoint a présenté au conseil municipal le rapport relatif à l'extension du réseau d'assainissement collectif aux terrains longeant le chemin des Plans, desservant notamment la parcelle en cause, vers la nouvelle station d'épuration implantée à l'Ouest de la commune alors qu'il n'est pas contesté que le principe de cette station avait été validé par le conseil général du Gard sur la base du schéma directeur d'assainissement réalisé par le cabinet Poyry, en 2006, identifiant les zones d'extension du réseau, avant son élection en qualité d'élu. Si au cours de la phase d'élaboration du plan, engagée le 27 juin 2011, ont été confiées le plan de zonage d'assainissement du plan local d'urbanisme de la commune, le schéma directeur de l'eau et l'évaluation environnementale aux sociétés Cereg Ingénierie et Cereg Territoire, le propriétaire de la parcelle dont le classement est en cause, n'a assuré les fonctions de co-gérant de la société Cereg dont le lien juridique avec ces entreprises ne ressort pas des pièces communiquées aux débats, qu'à compter de février 2013. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la participation de cet élu au vote de la délibération du 16 décembre 2013 du conseil municipal arrêtant le projet du plan local d'urbanisme, aurait été de nature à exercer une influence entraînant la prise en compte, par la délibération attaquée, de son intérêt personnel. La désignation des sociétés Cereg Ingénierie et Cereg Territoire pour rédiger les documents précités n'est pas, non plus, de nature à établir l'influence de cet élu sur le classement de la parcelle en cause. En conséquence, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales doit être écarté.

5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que les auteurs du plan local d'urbanisme ont entendu, aux termes des orientations d'aménagement et de programmation, ouvrir à l'urbanisation le secteur de la Vignasse, situé en continuité du village, par la réalisation de dix logements, s'inscrivant dans les orientations du schéma de cohérence territoriale du pays Cévennes, à mesure de la réalisation des équipements internes à ce secteur, notamment de la création d'une voie transversale Nord/Sud avec un accès sur le chemin des Plans, dans le cadre d'un aménagement cohérent. Les circonstances alléguées que le propriétaire de la parcelle cadastrée section C n°320, co-gérant de la SARL Céreg dont les " filiales " Céreg Ingénierie et Céreg Territoire ont réalisé, dans le cadre de la procédure d'élaboration du plan d'urbanisme en cause, respectivement le dossier relatif au zonage de l'assainissement et l'évaluation environnementale, ne sont pas de nature à établir que le classement de cette parcelle en zone constructible a pour objet exclusif de répondre aux intérêts privés du propriétaire de la parcelle cadastrée section C n° 320 alors que, eu égard aux objectifs d'urbanisme poursuivis par les auteurs du plan dans le site en cause, l'aménagement du secteur de la Vignasse poursuit un intérêt général. En conséquence, M. C...ne peut soutenir que la délibération contestée est entachée d'un détournement de pouvoir.

6. En troisième lieu et, d'une part, l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération contestée, dispose que le plan local d'urbanisme comprend notamment un rapport de présentation et un règlement. En vertu de l'article L. 123-1-5 du même code dans sa rédaction applicable au litige, le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et qu'il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées.

7. D'autre part, le premier alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime dispose que lorsque des dispositions législatives ou réglementaires soumettent à des conditions de distance l'implantation ou l'extension de bâtiments agricoles vis-à-vis des habitations et immeubles habituellement occupés par des tiers, la même exigence d'éloignement doit être imposée à ces derniers à toute nouvelle construction et à tout changement de destination précités à usage non agricole nécessitant un permis de construire, à l'exception des extensions de constructions existantes. L'article 153 du règlement sanitaire départemental du Gard, relatif aux règles d'implantation de bâtiments d'élevage, de gardiennage ou d'engraissement énonce que : " 153-1) Présentation du dossier / Toute création ou extension d'un bâtiment d'élevage (...) doit faire l'objet (...) d'un dossier comportant les informations suivantes : / a) Plan de masse (...) sur lequel doivent figurer notamment : (...) // - l'emplacement des immeubles habités ou occupés habituellement par des tiers, des zones de loisirs et de tout établissement recevant du public dans un rayon de 100 mètres (...) 153-4) Dispositions particulières / Sans préjudice de l'application des documents d'urbanisme existant dans la commune ou de cahiers des charges de lotissement, l'implantation des bâtiments renfermant des animaux doit respecter les règles suivantes : / - les élevages porcins à lisier ne peuvent être implantés à moins de 100 mètres des immeubles habités ou habituellement occupés par des tiers (...) / - les autres élevages, à l'exception des élevages de type familial et de ceux de volailles et de lapins, ne peuvent être implantés à moins de 50 mètres des immeubles habités ou habituellement occupés par des tiers (...) ".

8. Le règlement sanitaire départemental n'est pas au nombre des règles dont le respect s'impose aux auteurs d'un plan local d'urbanisme en vertu des dispositions législatives et réglementaires applicables. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'au plan général des zones, annexé au plan local d'urbanisme de la commune, figure l'existence d'un périmètre affectant notamment la parcelle de M.C..., débordant, à l'Est, en partie sur la frange de la parcelle cadastrée section C n° 320. Les auteurs du rapport de présentation évoquent les " périmètres de protection de 50 m ", autour des bâtiments, destiné à soutenir l'activité agricole en confortant les exploitations existantes et dont un extrait du plan y est inséré. Si aux termes des dispositions du règlement de la zone 2AU du plan local d'urbanisme, applicables aux terrains classés dans cette zone, " dans le périmètre de protection de 50 mètres autour de la chèvrerie repéré sur les documents graphiques, toute construction est interdite. ", le règlement de la zone A, dans laquelle est classée le terrain où est implantée l'exploitation agricole de M.C..., ne comporte aucune interdiction de construire en lien avec ce périmètre de protection. Ainsi, la seule délimitation, dans les documents graphiques du plan local d'urbanisme de la commune, d'un périmètre de protection, à titre indicatif, et repris dans le rapport de présentation, en l'absence de toute disposition du règlement de la zone A prohibant la réalisation de constructions dans ce périmètre de protection, ne suffit pas, par elle-même, à conférer à ce terrain et à ceux englobés dans ce périmètre et classés en zone A, un caractère inconstructible faisant obstacle à la réalisation des constructions, occupations et aux utilisations autorisées expressément par les dispositions du règlement de la zone A. Par voie de conséquence, M. C...n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime et celles de l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Gard ont été méconnues et il n'est, dès lors, pas fondé à demander l'annulation de la délibération en litige en tant qu'elle délimite un périmètre de protection affectant sa parcelle cadastrée section C n° 580, d'un rayon de 50 mètres.

9. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la commune de Brouzet-lès-Alès à la demande de première instance, que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 13 avril 2015 en tant qu'elle classe la parcelle cadastrée section C n° 320 en zone 2AU et qu'elle délimite un périmètre de protection affectant sa parcelle cadastrée section C n° 580, d'un rayon de 50 mètres.

En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette les concluions à fin d'annulation présentées par M. C..., n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées pour M. C...doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Brouzet-lès-Alès, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M.C..., au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M.C..., la somme demandée par la commune de Brouzet-lès-Alès, au même titre.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Brouzet-lès-Alès présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et à la commune de Brouzet-lès-Alès.

Délibéré après l'audience du 11 septembre 2018, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- MmeE..., première conseillère,

- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère.

Lu en audience publique, le 25 septembre 2018.

2

N°17MA04814


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA04814
Date de la décision : 25/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Micheline LOPA-DUFRENOT
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS CGCB et ASSOCIES MONTPELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-09-25;17ma04814 ?
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