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25/09/2018 | FRANCE | N°16MA04670

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 25 septembre 2018, 16MA04670


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 15 juillet 2014 par laquelle le maire de la commune d'Avignon a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation du solde de ses congés payés, de condamner la commune d'Avignon à lui payer une indemnité compensatrice correspondant à 38 jours et demi au titre de ses congés, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 avril 2014 et une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi, outre les i

ntérêts à compter de la décision à intervenir.

Par un jugement n° 1402809 du 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 15 juillet 2014 par laquelle le maire de la commune d'Avignon a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation du solde de ses congés payés, de condamner la commune d'Avignon à lui payer une indemnité compensatrice correspondant à 38 jours et demi au titre de ses congés, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 avril 2014 et une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi, outre les intérêts à compter de la décision à intervenir.

Par un jugement n° 1402809 du 14 octobre 2016, le tribunal administratif de Nîmes a condamné la commune d'Avignon à verser à M. D...une indemnité compensatrice correspondant à 6,5 jours de congés payés, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 avril 2014 et a renvoyé M. D...devant la commune d'Avignon pour qu'il soit procédé, dans les conditions fixées par les motifs du jugement, à la liquidation de l'indemnité compensatrice de congés payés et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 décembre 2016, et un mémoire, enregistré le 9 mars 2018, la commune d'Avignon, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 14 octobre 2016 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Nîmes ;

3°) à titre subsidiaire, de réformer le jugement en tant qu'il a condamné la commune d'Avignon à verser des intérêts au taux légal à compter du 4 avril 2014 ;

4°) de mettre à la charge de M. D...une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif a fait une interprétation inexacte des dispositions de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 en s'écartant de l'esprit de l'arrêt C-350/06 du 20 janvier 2009 de la Cour de justice des Communautés européennes et de l'interprétation du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation ;

- l'article 5 du décret du 15 février 1988 n'est pas incompatible avec la directive 2003/88 en tant qu'il ne réserve pas le cas des agents qui n'ont pas pris leurs congés annuels de l'année N s'ils bénéficient d'un congé de maladie l'année N + 1, soit au titre d'une autre période que celle au titre de laquelle ils ont acquis des droits à congé ;

- en conséquence, M. D...n'ayant pas été empêché de prendre l'intégralité de ses congés annuels en 2013, ne peut prétendre à aucune indemnisation au titre des 7 jours de congés qu'il a omis de prendre en 2013, suite à des congés maladie et une fin de contrat en 2014.

- dès lors que le moyen de défense soulevé, tiré du caractère irrégulier du congé maladie, opposé en première instance n'était pas inopérant, les premiers juges ont commis une erreur de droit, l'agent ayant fait obstacle à la mise en oeuvre de la procédure de contre-visite dont dispose l'administration ;

- la demande tendant au paiement des intérêts à compter du 4 avril 2014, date du terme de l'engagement de M. D...et non à celle de la demande préalable doit être rejetée et, sur ce point, les premiers juges n'ont pas motivé le jugement en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 février 2017, M. D...conclut au rejet de la requête et, par la voie d'un appel incident, demande à la Cour de condamner la commune d'Avignon à lui payer une indemnité compensatrice correspondant à 38 jours et demi au titre de ses congés payés, assortie d'intérêts au taux légal à compter du 4 avril 2014 et, enfin, de mettre à la charge de la commune d'Avignon une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il est en droit de bénéficier d'une indemnité compensatrice correspondant à 15 jours de congés payés au titre des années 2013 et 2014 ;

- les droits qu'il tient sur son compte épargne-temps ne peuvent être utilisés que sous forme de congés et ainsi, ceux-ci obéissent aux mêmes règles en cas de maladie ;

- les moyens soulevés par la commune d'Avignon ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 relative à certains aspects de l'aménagement du temps de travail ;

- l'arrêt C-350/06 et C-520/06 du 20 janvier 2009 de la Cour de justice de l'Union européenne ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°85-1250 du 26 novembre 1985 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le décret n° 2004-878 du 26 août 2004 ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lopa Dufrénot,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la commune d'Avignon.

Considérant ce qui suit :

1. M. D...a été engagé, à compter du 1er octobre 2009, en qualité de collaborateur de cabinet du maire de la commune d'Avignon afin d'exercer des fonctions de chargé de mission, son engagement prenant fin au plus tard à la date du terme du mandat du maire en exercice. Cet engagement est parvenu à son terme le 4 avril 2014. Il a sollicité auprès de la commune d'Avignon, le paiement d'une indemnité compensatrice correspondant à 7 jours de congés annuels au titre de l'année 2013, à 8 jours de congés annuels au titre de l'année 2014, à 3, 5 jours de réduction du temps de travail (RTT) et de 20 jours épargnés sur le compte épargne-temps. Par décision du 15 juillet 2014, le maire de la commune d'Avignon a rejeté sa demande. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a partiellement fait droit à la demande de M. D...en condamnant la commune d'Avignon à lui verser une indemnité compensatrice correspondant à 6,5 jours de congés payés au titre de l'année 2014, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 avril 2014 et a renvoyé M. D... devant la commune d'Avignon pour qu'il soit procédé à la liquidation de cette indemnité compensatrice et a rejeté le surplus de sa demande. La commune d'Avignon relève appel de ce jugement. En outre, M. D...demande, par la voie de l'appel incident, la réformation du jugement et la condamnation de la commune à lui verser une indemnité correspondant à 38, 5 jours au titre des congés payés.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les congés annuels au titre de l'année 2013 :

2. Aux termes de l'article 5 du décret du 15 février 1988 relatif aux congés annuels des agents non titulaires de la fonction publique territoriale en vigueur : " L'agent non titulaire en activité a droit, dans les conditions prévues par le décret n° 85-1250 du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux, à un congé annuel dont la durée et les conditions d'attribution sont identiques à celles du congé annuel des fonctionnaires titulaires./ A la fin d'un contrat à durée déterminée ou en cas de licenciement n'intervenant pas à titre de sanction disciplinaire, l'agent qui, du fait de l'administration n'a pu bénéficier de tout ou partie de ses congés annuels a droit à une indemnité compensatrice. /Lorsque l'agent n'a pu bénéficier d'aucun congé annuel, l'indemnité compensatrice est égale au 1/10 de la rémunération totale brute perçue par l'agent lors de l'année en cours. - Lorsque l'agent a pu bénéficier d'une partie de ses congés annuels, l'indemnité compensatrice est proportionnelle au nombre de jours de congés annuels dus et non pris. - L'indemnité ne peut être inférieure au montant de la rémunération que l'agent aurait perçue pendant la période de congés annuels dus et non pris. - L'indemnité est soumise aux mêmes retenues que la rémunération de l'agent.". L'article 1er du décret du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux énonce que tout fonctionnaire a droit pour une année de service accompli du 1er janvier au 31 décembre, à un congé annuel d'une durée égale à 5 fois ses obligations hebdomadaires de service, cette durée est appréciée en nombre de jours. En vertu de l'article 5 du même décret, sous réserve des dispositions de l'article précédent, le congé dû pour une année de service accompli ne peut se reporter sur l'année suivante, sauf autorisation exceptionnelle donnée par l'autorité territoriale. Un congé non pris ne donne lieu à aucune indemnité compensatrice.

3. Il est constant qu'au titre de l'année 2013, M. D...conservait un reliquat de 7 jours de congés annuels non pris avant le 31 décembre 2013, dont la commune d'Avignon reconnaît avoir accepté qu'ils soient effectivement pris au cours de l'année 2014, avant le terme de son engagement. Il n'est pas contesté que M.D..., après avoir été déclaré en arrêt maladie, a été placé, par son administration, en congés annuels à compter du 11 février 2014 jusqu'au 24 février 2014, date à compter de laquelle, ayant adressé aux services municipaux un nouvel arrêt de travail, il était, de nouveau, en congé maladie. Comme l'ont jugé, à juste titre, les premiers juges, pendant cette période correspondant à 8,5 jours, M. D... a, ainsi, soldé le reliquat des congés annuels acquis et non pris au cours de l'année 2013, à concurrence de 7 jours. Dès lors, la commune d'Avignon n'est pas fondée à contester le motif du jugement qui rejette la demande de M. D...tendant au versement d'une indemnité compensatrice des congés payés au titre de l'année 2013.

En ce qui concerne les congés payés au titre de l'année 2014 :

4. D'une part, l'article 12 5ème alinéa du décret n 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale dans sa rédaction en vigueur au litige prévoit qu'un contrôle peut être effectué à tout moment par un médecin agréé de l'administration. En cas de contestation des conclusions du médecin chargé du contrôle, le comité médical et le comité médical supérieur peuvent être saisis dans les mêmes conditions que celles qui sont prévues pour les fonctionnaires titulaires.

5. Il est constant que comme il a été dit au point 3, la commune d'Avignon a été destinataire d'un nouvel arrêt de travail initial à compter du 24 février 2014, adressé par M. D... et de sa prolongation jusqu'au 4 avril 2014, terme de leurs relations contractuelles. D'une part, contrairement à ce que persiste à soutenir la commune d'Avignon, les propos tenus par M.D..., à savoir " j'avais posé des congés, mais à partir de la mi-janvier, j'ai eu plusieurs pressions et je me suis mis en maladie ", diffusés dans la presse régionale le 20 mars 2014 ne sont pas de nature à établir que l'arrêt de travail établi par son médecin traitant le 24 février 2014 présenterait un caractère frauduleux. D'autre part, il résulte de l'instruction, notamment de l'arrêt de travail établi par le médecin traitant de M. D..., que le formulaire comporte une rubrique relative à l'adresse où le malade peut être visité, à renseigner si l'adresse est différente de l'adresse habituelle. En conséquence, le défaut de mention d'adresse sur l'arrêt de travail contesté n'a pas fait obstacle à la faculté ouverte à l'administration de contester le bien-fondé du congé de maladie conformément aux procédures fixées par les dispositions du décret du 15 février 1988, en recourant à une contre-visite réalisée auprès de l'agent, à son domicile habituel, par un médecin agréé en application de l'article 5 du décret du 30 juillet 1987 relatif au régime des congés de maladie applicable aux fonctionnaires territoriaux. Or, il est constant que les services de la commune d'Avignon n'ont pas mis en oeuvre la procédure afin d'effectuer une contre-visite au domicile habituel de l'agent, dont ils ne pouvaient méconnaître l'adresse. Par voie de conséquence, la commune d'Avignon ne peut soutenir que M. D...doit être regardé comme ayant été placé en congés annuels à compter du 24 février 2014 jusqu'au 4 avril 2014, terme de son contrat. Par suite, le moyen soulevé par la commune d'Avignon, tiré de la régularité de la notification de la lettre du 28 janvier 2014, réitérée par une nouvelle correspondance du 4 mars 2014 informant à M. D...qu'il était en congés annuels à compter du 11 février 2014 est sans incidence sur la position de ce dernier en congés de maladie au cours de la période du 24 février 2014 au 4 avril 2014.

6. D'autre part, tout justiciable peut se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive, lorsque l'Etat n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transpositions nécessaires. Aux termes de l'article 7 de la directive n° 2003/88 du 4 novembre 2003 susvisée : " Congé annuel 1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d'un congé annuel payé d'au moins quatre semaines, conformément aux conditions d'obtention et d'octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales. 2. La période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité financière, sauf en cas de fin de relation de travail. ". Le délai de transposition de cette directive expirait le 23 mars 2005.

7. Aux termes de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 relative à certains aspects de l'aménagement du temps de travail : " 1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d'un congé annuel payé d'au moins quatre semaines, conformément aux conditions d'obtention et d'octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales / 2. La période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité financière, sauf en cas de fin de relation de travail ". Dans son arrêt C-350/06 et C-520/06 du 20 janvier 2009, la Cour de Justice de l'Union européenne a rappelé que " le droit au congé annuel payé de chaque travailleur doit être considéré comme un principe général du droit social communautaire revêtant une importance particulière, auquel il ne saurait être dérogé (...) " et que " l'article 7 § 1 de la directive 2003/88 doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à des dispositions ou à des pratiques nationales qui prévoient que le droit à congé annuel payé s'éteint à l'expiration de la période de référence et/ou d'une période de report fixée par le droit national même lorsque le travailleur a été en congé de maladie durant toute la période de référence et que son incapacité de travail a perduré jusqu'à la fin de sa relation de travail, raison pour laquelle il n'a pas pu exercer son droit au congé annuel payé (...) ".

8. Les dispositions du paragraphe 1 de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 relative à certains aspects de l'aménagement du temps de travail, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt C-350/06 et C-520/06 du 20 janvier 2009, font obstacle à ce que le droit au congé annuel payé qu'un travailleur n'a pas pu exercer pendant une certaine période parce qu'il était placé en congé de maladie pendant tout ou partie de cette période s'éteigne à l'expiration de celle-ci. En outre, il résulte clairement des dispositions du paragraphe 2 de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 relative à certains aspects de l'aménagement du temps de travail, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt C-350/06 et C-520/06 du 20 janvier 2009 que ces dispositions font obstacle à ce que le versement d'une indemnité compensatrice de congé annuel payé non pris soit refusé, lors de la fin de la relation de travail, au travailleur qui a été en congé de maladie durant tout ou partie d'une certaine période, raison pour laquelle il n'a pas pu exercer son droit à congé payés.

9. Les dispositions de l'article 5 du décret du 15 février 1988, citées au point 2, en tant qu'elles ne prévoient le versement d'une indemnité compensatrice que pour les agents qui, du fait de l'administration, n'ont pu bénéficier de tout ou partie de leurs congés annuels, sans réserver le cas de ces mêmes agents qui ont été dans l'impossibilité de les prendre pour des motifs indépendants de leur volonté en raison d'un congé de maladie ou des motifs tirés de l'intérêt du service et qui se trouvent en fin de relation de travail, sont incompatibles avec les dispositions de l'article 7 de cette directive et par suite illégales.

10. Il résulte de l'instruction qu'au cours de la période du 11 février 2014 au 24 février 2014, M. D...a été placé en congés annuels par son administration et a soldé, ainsi, qu'il a été dit au point 3, le reliquat des congés annuels dus et non pris, au titre de l'année 2013 à hauteur de 7 jours ainsi que 1, 5 jour de congés annuels dus et non pris, au titre de l'année 2014. Ainsi, M. D...restait détenteur d'un reliquat de 6,5 jours de congés annuels dus et non pris au titre de l'année 2014. Toutefois, étant dans l'impossibilité de prendre effectivement ces congés pour des motifs indépendants de sa volonté en raison du congé de maladie dont il bénéficiait, comme il a été dit au point 5, du 24 février 2014 au 4 avril 2014, date de la fin des relations de travail, M. D...a droit, ainsi que l'ont jugé, à bon droit, les premiers juges, à une indemnité compensatrice de congés payés dus, au titre de l'année 2014 et non pris pour les motifs précités. Cette indemnité proportionnelle au nombre de jours de congés annuels dus et non pris en application de l'article 5 du décret du 15 février 1988 relatif aux congés annuels des agents non titulaires de la fonction publique territoriale, correspond à 6,5 jours. M. D...n'est pas donc pas fondé à réclamer une indemnité compensatrice de congés payés correspondant à un nombre de jours supérieurs.

En ce qui concerne le point de départ des intérêts au taux légal :

11. La créance détenue sur l'administration existe, en principe, à la date à laquelle se produit le fait qui en est la cause, sans qu'il soit besoin que le juge se livre au préalable à une appréciation des faits de l'espèce et en liquide le montant. Saisie d'une demande tendant au paiement de cette créance, l'administration est tenue d'y faire droit dès lors que celle-ci est fondée. Par suite, les intérêts moratoires, dus en application de l'article 1153 du code civil, lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue à l'administration ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine. Par suite, M. D...a donc droit aux intérêts au taux légal sur l'indemnité compensatrice de congés payés due, à compter de la date de la réception par la commune d'Avignon de sa réclamation préalable, soit le 15 juillet 2014 et non, comme l'ont jugé à tort les premiers juges, au jour de la fin de son engagement, le 4 avril 2014.

En ce qui concerne le compte épargne-temps :

12. D'une part, l'article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives la fonction publique territoriale dispose que les règles relatives à la définition, à la durée et à l'aménagement du temps de travail des agents des collectivités territoriales et des établissements publics mentionnés au premier alinéa de l'article 2 sont fixées par la collectivité ou l'établissement, dans les limites applicables aux agents de l'Etat, en tenant compte de la spécificité des missions exercées par ces collectivités ou établissements. Le même article prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du premier alinéa. Ce décret prévoit les conditions dans lesquelles la collectivité ou l'établissement peut, par délibération, proposer une compensation financière à ses agents, d'un montant identique à celle dont peuvent bénéficier les agents de l'Etat, en contrepartie des jours inscrits à leur compte épargne-temps. Le décret n° 2004-878 du 26 août 2004 relatif au compte épargne-temps dans la fonction publique territoriale, applicable aux agents non titulaires, en vigueur à la date du litige institue dans la fonction publique territoriale un compte épargne-temps. Aux termes de l'article 3, ce compte est alimenté par le report de jours de réduction du temps de travail et par le report de congés annuels tels que prévus par le décret du 26 novembre 1985 susvisé, sans que le nombre de jours de congés annuels pris dans l'année puisse être inférieur à vingt. L'article 4 de ce décret énonce que " lorsqu'une collectivité ou un établissement a pris une délibération, en vertu du deuxième alinéa de l'article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, tendant à l'indemnisation ou à la prise en compte au sein du régime de retraite additionnelle de la fonction publique des droits ainsi épargnés sur le compte épargne-temps et dès lors qu'au terme de chaque année civile le nombre de jours inscrits sur le compte est supérieur à vingt : I.-Les jours ainsi épargnés n'excédant pas vingt jours ne peuvent être utilisés par l'agent que sous forme de congés, pris dans les conditions mentionnées à l'article 3 du décret du 26 novembre 1985 susvisé. ". Il résulte des dispositions de l'article 7-1 et des autres dispositions précédemment citées que les agents des collectivités locales ne peuvent solliciter l'indemnisation des jours qu'ils ont épargnés sur leur compte épargne-temps que si une délibération a prévu une telle possibilité. En l'absence de délibération du conseil municipal sur le sort des droits ainsi épargnés sur le compte épargne-temps et dès lors qu'au terme de chaque année civile le nombre de jours inscrits sur le compte est inférieur à vingt, les jours ainsi épargnés n'excédant pas vingt jours ne peuvent être utilisés par l'agent que sous forme de congés, pris dans les conditions mentionnées à l'article 3 du décret du 26 novembre 1985.

13. D'autre part, par délibération du 21 octobre 2010, le conseil municipal d'Avignon a décidé de mettre en place de nouvelles règles de gestion du compte épargne-temps en permettant aux agents de la collectivité, de bénéficier des options pour les jours épargnés au-delà du seuil de 20 jours parmi lesquelles leur indemnisation selon un barème forfaitaire par catégories définies par décret.

14. Il est constant que M. D...est titulaire d'un compte épargne- temps portant 20 jours. Or, comme il a été dit au point précédent, la délibération du conseil municipal du 21 octobre 2010 dont la légalité n'est pas contestée par M.D..., prévoit le bénéfice d'une indemnisation des jours épargnés au-delà de 20 jours. En conséquence, il ne peut prétendre à l'allocation de l'indemnité sollicitée.

15. Il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Avignon est seulement fondée à demander que l'indemnité compensatrice de congés payés correspondant à 6,5 jours que le tribunal administratif de Nîmes l'a condamnée à verser à M.D..., soit assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2014. En conséquence, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'irrégularité du jugement, il y a lieu de réformer l'article 3 du jugement attaqué, dans cette mesure. Les conclusions présentées, par la voie de l'appel incident, par M. D...ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Avignon, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdant pour l'essentiel, la somme demandée par M.D..., au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M.D..., la somme demandée par la commune d'Avignon, au même titre.

D É C I D E :

Article 1er : L'indemnité compensatrice de congés payés dus au titre de l'année 2014 et non pris à laquelle la commune d'Avignon a été condamnée à verser à M.D..., portera intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2014.

Article 2 : L'article 3 du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 14 octobre 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune d'Avignon et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions de M. D...présentées par la voie de l'appel incident et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Avignon et à M. B...D....

Délibéré après l'audience du 11 septembre 2018, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- MmeC..., première conseillère,

- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère.

Lu en audience publique, le 25 septembre 2018.

2

N°16MA04670


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA04670
Date de la décision : 25/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés annuels.

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Micheline LOPA-DUFRENOT
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SELARL MAZARIAN - LEVY LEROY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-09-25;16ma04670 ?
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