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18/09/2018 | FRANCE | N°16MA04629

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 18 septembre 2018, 16MA04629


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 12 mars 2014 par laquelle le ministre de la défense a refusé de lui accorder le bénéfice de la majoration de l'indemnité volontaire et de condamner l'Etat à lui verser cette majoration ainsi qu'une somme de 2 000 euros en réparation du préjudice subi.

Par un jugement n° 1401788 du 13 octobre 2016, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enr

egistrée le 12 décembre 2016, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 12 mars 2014 par laquelle le ministre de la défense a refusé de lui accorder le bénéfice de la majoration de l'indemnité volontaire et de condamner l'Etat à lui verser cette majoration ainsi qu'une somme de 2 000 euros en réparation du préjudice subi.

Par un jugement n° 1401788 du 13 octobre 2016, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 12 décembre 2016, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 13 octobre 2016 ;

2°) d'annuler cette décision du ministre de la défense du 12 mars 2014 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la majoration de l'indemnité volontaire à compter du 12 septembre 2013, subsidiairement, à lui verser la somme de 18 700 euros en réparation du préjudice financier subi résultant de l'illégalité de la décision du 12 mars 2014 ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros en réparation du préjudice moral résultant de l'illégalité de la décision du 12 mars 2014 ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

* le jugement est irrégulier en ce qu'il rappelle les règles probatoires applicables en matière de discrimination sans en faire application ;

* la détermination de la date à laquelle il a été radié des contrôles ne résulte pas de sa volonté ;

* le décret n° 2013-804 du 3 septembre 2013 qui constitue la base légale de la décision attaquée méconnaît le principe d'égalité ;

* l'illégalité de la décision du 12 mars 2014 est à l'origine d'un préjudice financier dont le montant s'élève à 18 700 euros et d'un préjudice moral évalué à 2 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 mars 2018, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu :

* les autres pièces du dossier.

Vu :

* la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 ;

* le décret n° 2009-83 du 21 janvier 2009 ;

* le décret n° 2013-804 du 3 septembre 2013 ;

* le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

* le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

* et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ouvrier d'Etat né le 27 mars 1953, a été rayé des contrôles le 1er février 2010 à sa demande et a perçu à ce titre l'indemnité de départ volontaire prévue par le décret du 21 janvier 2009. Il a bénéficié de l'allocation d'aide au retour à l'emploi du 8 février 2010 au 7 février 2013, puis de l'allocation de solidarité spécifique. Ne pouvant plus prétendre à la liquidation immédiate de sa pension de retraite à compter du 1er avril 2013 en raison du relèvement, résultant de la loi du 9 novembre 2010, de l'âge légal de départ à la retraite de 60 à 61 ans et 2 mois pour les personnes nées comme lui en 1953, il a demandé à bénéficier d'une majoration de l'indemnité de départ volontaire sur le fondement du décret du 3 septembre 2013. Par une décision du 12 mars 2014, le ministre de la défense a refusé de lui accorder cet avantage. M. A... relève appel du jugement du 13 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. Il ressort des mentions du jugement attaqué que celui-ci vise le moyen, soulevé par M. A..., tiré de ce que la décision du 12 mars 2014 crée une discrimination entre les ouvriers d'un même corps qui ont opté pour un départ volontaire dans les mêmes conditions, ainsi que la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations. Le jugement rappelle dans ses motifs les règles portant sur la charge de la preuve applicables en cas de contestation d'une mesure qui serait empreinte d'une discrimination. Il ne mentionne cependant ni les raisons spécifiques à cette affaire pour lesquelles le moyen en cause devait être écarté, ni, d'ailleurs, que ce moyen est écarté alors que le dispositif rejette la demande de M. A.... Ainsi, le tribunal administratif de Toulon a insuffisamment motivé son jugement. Celui-ci doit, par suite, être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Toulon.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Aux termes de l'article 1er du décret du 3 septembre 2013 portant majoration de l'indemnité de départ volontaire de certains ouvriers de l'Etat du ministère de la défense et des établissements publics placés sous sa tutelle : " I. Peuvent bénéficier d'une majoration de l'indemnité de départ volontaire prévue par le décret du 21 janvier 2009 susvisé, sous réserve de présenter une demande écrite avant le 1er janvier 2015, les ouvriers de l'Etat remplissant les conditions cumulatives suivantes : / 1° Avoir été radié des contrôles avec le bénéfice de l'indemnité de départ volontaire avant le 10 novembre 2010 ; / 2° Etre né entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1953 ou, pour les ouvriers de l'Etat exposés à des risques particuliers d'insalubrité au sens du 1° du I de l'article 21 du décret du 5 octobre 2004 susvisé, entre le 1er juillet 1956 et le 31 décembre 1958 ; / 3° Avoir épuisé leurs droits à l'assurance chômage en application de l'article R. 5422-1 du code du travail ; / 4° Avoir atteint, à l'extinction de leurs droits à l'assurance chômage, l'âge de 60 ans ou, pour les ouvriers de l'Etat exposés à des risques particuliers d'insalubrité au sens du 1° du I de l'article 21 du décret du 5 octobre 2004 susvisé, l'âge de 55 ans ; / 5° Ne pas dépasser, à la date d'épuisement des droits à l'assurance chômage, un plafond de ressources mensuelles défini annuellement par arrêté du ministre de la défense. / II. La majoration de l'indemnité de départ volontaire garantit aux bénéficiaires le versement d'une allocation, dont le montant journalier maximal est fixé à l'article 2. / La majoration est versée à compter du dépôt de la demande. Elle est exclusive de toute autre allocation ou prestation ayant pour objet de compenser, à compter de la date d'extinction des droits à l'assurance chômage, le report de la liquidation de la pension de retraite jusqu'à l'âge d'ouverture du droit à pension. / Lorsque le demandeur bénéficie du versement de l'allocation de solidarité spécifique prévue aux articles L. 5423-1 et suivants du code du travail, le montant de la majoration est diminué du montant de l'allocation spécifique de solidarité perçu au moment de la demande. ".

5. Le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier.

6. Il résulte des dispositions précitées du I de l'article 1er du décret du 3 septembre 2013 que le bénéfice d'une majoration de l'indemnité de départ volontaire prévue par le décret du 21 janvier 2009 est notamment conditionné à l'âge des demandeurs à l'extinction de leurs droits à l'assurance chômage, fixé à 60 ans ou à 55 ans, pour les ouvriers de l'Etat exposés à des risques particuliers d'insalubrité au sens du 1° du I de l'article 21 du décret du 5 octobre 2004 susvisé. La différence de traitement qui résulte de ces dispositions réglementaires entre les ouvriers de l'Etat qui ont atteint cet âge à l'extinction de leurs droits à l'assurance chômage et ceux qui ne l'ont pas atteint se justifie par une différence de situation au regard des effets du relèvement de l'âge légal de départ à la retraite résultant de la loi du 9 novembre 2010, les premiers ayant opté pour un départ volontaire en faisant coïncider l'extinction prévue de leurs droits à l'assurance chômage avec la liquidation de leur pension de retraite à l'âge légal alors en vigueur de soixante ans, les seconds ayant accepté au moment de leur départ volontaire une baisse de leurs revenus entre la date de l'extinction de ces droits et celle de leur départ à la retraite. La mesure instituée par le décret du 3 septembre 2013 vise à compenser dans l'intérêt général les effets imprévus de la loi du 9 novembre 2010. Ainsi, les dispositions réglementaires contestées ne méconnaissent pas le principe d'égalité en excluant du bénéfice d'une majoration de l'indemnité de départ volontaire les ouvriers de l'Etat qui ont atteint l'âge de 60 ou 55 ans à l'extinction de leurs droits à l'assurance chômage.

7. Ainsi qu'il a été rappelé au point 1, M. A... n'avait pas atteint l'âge de 60 ans à la date du 7 février 2013 à laquelle se sont éteints ses droits à l'assurance chômage. Si dans un premier courrier daté du 1er avril 2009, il a demandé à bénéficier de l'indemnité de départ volontaire en souhaitant que son départ soit effectif à la date du 25 mars 2010 compte tenu de la durée d'indemnisation de 36 mois prévue en l'espèce par le régime d'assurance chômage, il a, dans un second courrier daté du 1er juin 2009, souhaité avancer son départ au 24 décembre 2009. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la date du 1er février 2010 à laquelle il a été radié des contrôles, soit moins de 36 mois avant son anniversaire des 60 ans, a été fixée indépendamment de sa volonté. L'impossibilité de bénéficier d'une majoration de l'indemnité de départ volontaire ne résultant que de l'application des dispositions du I de l'article 1er du décret du 3 septembre 2013, il n'est pas davantage fondé à invoquer une méconnaissance du principe d'égalité pour ce motif.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'indemnisation :

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander la condamnation de l'Etat à lui verser la majoration de l'indemnité volontaire, et, la décision du 12 mars 2014 n'étant pas illégale, la réparation des préjudices financier et moral qu'il allègue avoir subis.

9. Il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Toulon doit être rejetée. Les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 13 octobre 2016 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Toulon et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et à la ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 4 septembre 2018, où siégeaient :

- M. Gonzales, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Jorda, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 septembre 2018.

N° 16MA04629 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA04629
Date de la décision : 18/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : BALENCI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-09-18;16ma04629 ?
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