Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme H... E...et Mme C... D...ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 1er septembre 2014 par laquelle le conseil municipal du Collet-de-Dèze a procédé au déclassement d'une partie du chemin rural dit " des Crozes " et a décidé sa cession et d'enjoindre au maire d'interrompre toute transaction concernant la cession du chemin rural dit " des Crozes ".
Par un jugement n° 1403321 du 31 mai 2016, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 28 juillet 2016, le 5 septembre 2017, le 27 octobre 2017 et le 6 novembre 2017, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 31 mai 2016 ;
2°) d'annuler la délibération du 1er septembre 2014 du conseil municipal du Collet-de-Dèze et d'enjoindre au maire d'interrompre toute transaction concernant la cession du chemin rural dit " des Crozes " ;
3°) de mettre à la charge de la commune du Collet-de-Dèze la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la délibération querellée a été adoptée en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ;
- cette délibération méconnaît les dispositions de l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime ;
- la cession pour l'euro symbolique de la portion du chemin rural des Crozes objet de cette délibération constitue une libéralité.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 21 juillet 2017, le 29 septembre 2017 et le 26 novembre 2017, la commune du Collet-de-Dèze, représentée par Me G..., conclut au rejet de la requête et demande, en outre, que Mme D... lui verse une somme de 3 600 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coutier,
- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 1er septembre 2014, le conseil municipal du Collet-de-Dèze a procédé au déclassement d'une partie du chemin rural dit " des Crozes " et a décidé sa cession. Mme D... relève appel du jugement du 31 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération.
2. Aux termes de l'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune. ". Aux termes de l'article L. 161-2 du même code : " L'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale. (...) ". Selon l'article L. 161-10 de ce code : " Lorsqu'un chemin rural cesse d'être affecté à l'usage du public, la vente peut être décidée après enquête par le conseil municipal, à moins que les intéressés groupés en association syndicale conformément à l'article L. 161-11 n'aient demandé à se charger de l'entretien dans les deux mois qui suivent l'ouverture de l'enquête. (...) ".
3. Il résulte des dispositions de l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime que la vente d'un chemin rural peut être décidée par le conseil municipal lorsque ce chemin cesse d'être affecté à l'usage du public. Pour retenir la présomption d'affectation à usage du public prévue par l'article L. 161-2 du même code, un seul des éléments indicatifs figurant à cet article suffit.
4. Il ressort des pièces du dossier, particulièrement du rapport d'expertise rendu le 23 janvier 2013 par M. A..., expert désigné par ordonnance du 23 juillet 2012 du tribunal de grande instance de Mende dans le cadre d'une instance introduite par Mme D... en vue de faire reconnaître l'état d'enclavement des parcelles cadastrées section B n° 1136 et 1138 dont elle est propriétaire, que la partie terminale du chemin des Crozes objet de la cession en litige, qui aboutit dans la propriété de Mme I... et M. F..., se prolonge par un passage non cadastré, assis sur les parcelles B 885 et B 901 appartenant également à ces derniers, accès qui selon les termes du rapport " est constitué d'une plateforme de 2,5 à 3 mètres de largeur environ, avec des murs de soutènement anciens de part et d'autre du passage " et " comprend également des ouvrages caractéristique d'un chemin : dalots pour l'évacuation des eaux, murs, escaliers fossés ". Sur le fondement de ces constatations ainsi que des témoignages qu'il a recueillis indiquant que ce passage était utilisé par les riverains avant que Mme I... et M. F... n'en interdisent l'usage, l'expert a conclu que ledit passage " constitue concrètement un chemin d'accès aux parcelles B 1136, B 1138 et B 1137 ". Au vu de ce rapport d'expertise, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Mende a au demeurant, par ordonnance du 16 mars 2016, autorisé à titre provisoire Mme D... à utiliser la partie terminale du chemin en litige en jugeant que les parcelles B 1136 et B 1138 devaient être regardées en fait comme enclavées compte tenu de la topographie des lieux. Il résulte de ces éléments que la portion du chemin des Crozes en litige constitue elle-même une voie de passage et demeure donc affectée à l'usage du public. Dès lors, les dispositions de l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime faisaient obstacle à la cession par la commune du Collet-de-Dèze de cette partie de chemin rural.
5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ".
7. L'annulation de la délibération du 1er septembre 2014 du conseil municipal du Collet-de-Dèze n'implique pas nécessairement que la commune prenne une décision dans un sens déterminé ou prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées par Mme D... tendant à ce qu'il soit enjoint à celle-ci d'interrompe toute transaction concernant la cession du chemin rural des Crozes.
Sur les conclusions indemnitaires :
8. Mme D..., qui se borne à demander dans sa requête d'appel qu'il soit fait droit à ses conclusions de première instance, n'articule devant le juge d'appel aucun moyen au soutien des conclusions indemnitaires qu'elle a présentées devant le tribunal administratif de Nîmes. Ces conclusions doivent dès lors être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme D..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune du Collet-de-Dèze demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune du Collet-de-Dèze une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme D... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 31 mai 2016 et la délibération du 1er septembre 2014 du conseil municipal du Collet-de-Dèze sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D... est rejeté.
Article 3 : La commune du Collet-de-Dèze versera à Mme D... une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune du Collet-de-Dèze au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D...et à la commune du Collet-de-Dèze.
Délibéré après l'audience du 31 août 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président-assesseur,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique le 14 septembre 2018.
2
N° 16MA03059
ia