Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... E...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 10 avril 2015 par laquelle le conseil municipal de Six-Fours-les-Plages a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.
Par un jugement du 7 novembre 2017, le tribunal administratif de Toulon, qui a joint quatorze demandes, a annulé cette délibération en tant qu'elle classe les parcelles cadastrées section AZ n° 18, 19, 20 et 1077 en secteur N2 et a rejeté le surplus des conclusions.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 décembre 2017 et 27 avril 2018, M. E..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 7 novembre 2017 ;
2°) d'annuler la délibération du 10 avril 2015 par laquelle le conseil municipal de Six-Fours-les-Plages a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune et la décision de rejet de son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Six-Fours-les-Plages la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le rapporteur public ne s'est pas prononcé sur l'argument tiré de ce que l'alignement d'arbres identifié sur sa parcelle est en fait situé sur la parcelle voisine ;
- le classement en secteur UJ des parcelles AX2243 à AX2247 n'est pas justifié par la seule évocation par le rapport de présentation d'une étude paysagère ;
- l'alignement d'arbres identifié sur sa parcelle est situé sur la parcelle voisine ;
- la servitude d'espaces à planter ne répond pas aux conditions posées par les dispositions de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le classement en secteur UJ est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2018, la commune de Six-Fours-les-Plages et la métropole Toulon-Provence-Méditerranée concluent au rejet de la requête, à l'annulation du jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de la commune de Six-Fours-les-Plages présentées au titre de l'article L. 761-1, et à ce que soit mise à la charge de M. E... la somme de 3 000 euros au bénéfice de la commune de Six-Fours-les-Plages et de la métropole Toulon- Provence-Méditerranée au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Un mémoire, enregistré le 25 mai 2018, présenté par la commune de Six-Fours-les-Plages et la métropole Provence-Toulon-Méditerranée n'a pas été communiqué en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 2017-1758 du 26 décembre 2017 portant création de la métropole dénommée " Toulon-Provence-Méditerranée " ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gonneau,
- les conclusions de Mme Giocanti,
- et les observations de Me C..., substituant Me A..., représentant M. E..., et de Me B..., représentant la métropole Toulon-Provence-Méditerranée et la commune de Six-Fours-les-Plages.
Une note en délibéré présentée par M. E... a été enregistrée le 22 juin 2018.
Considérant ce qui suit :
Sur l'intervention de la commune de Six-Fours-les-Plages :
1. Aux termes de l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales : " I.- La métropole exerce de plein droit, en lieu et place des communes membres, les compétences suivantes : / (...) 2° En matière d'aménagement de l'espace métropolitain : / a) (...) plan local d'urbanisme (...) " ; aux termes du III de l'article L. 5211-5 du même code : " (...) L'établissement public de coopération intercommunale est substitué de plein droit, à la date du transfert des compétences, aux communes qui le créent dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes. (...) ". Il résulte des dispositions du décret du 26 décembre 2017 susvisé que la métropole dénommée " Toulon-Provence-Méditerrannée " a été créée le 1er janvier 2018.
2. Il résulte des dispositions précitées qu'à compter du 1er janvier 2018, la métropole Toulon-Provence-Méditerranée s'est trouvée substituée de plein droit à la commune de Six-Fours-les-Plages pour ce qui concerne, notamment, l'approbation du plan local d'urbanisme et a seule, par suite, la qualité de partie dans la présente instance. Si la commune de Six-Fours-les-Plages peut être regardée comme intervenant au soutien des conclusions de la métropole, cette intervention n'a toutefois pas été formée par mémoire distinct, comme l'exige l'article L. 632-1 du code de justice administrative, et est par suite irrecevable.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 7 du code de justice administrative : " Un membre de la juridiction, chargé des fonctions de rapporteur public, expose publiquement, et en toute indépendance, son opinion sur les questions que présentent à juger les requêtes et sur les solutions qu'elles appellent. ".
4. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier de première instance transmis par le tribunal administratif de Toulon à la Cour, que M. E... a soulevé l'argument selon lequel l'alignement d'arbres identifié sur sa parcelle serait en réalité situé sur une parcelle voisine. D'autre part, le rapporteur public n'a pas l'obligation de répondre à tous les arguments que font valoir les parties. Ainsi, le moyen tiré de ce que le rapporteur public n'a pas répondu à l'argument précité doit, en tout état de cause, être écarté.
Sur l'appel principal :
5. Aux termes de l'article L. 123-1-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. (...) ". Aux termes de l'article R*123-2 du même code : " Le rapport de présentation : (...) 3° Explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durable et, le cas échéant, les orientations d'aménagement et de programmation ; il expose les motifs de la délimitation des zones, des règles et des orientations d'aménagement et de programmation mentionnées au 1 de l'article L. 123-1-4, des règles qui y sont applicables, notamment au regard des objectifs et orientations du projet d'aménagement et de développement durables. (...) ".
6. Le projet d'aménagement et de développement durable du plan local d'urbanisme de Six-Fours-les-Plages a notamment pour orientations la conservation et la valorisation des spécificités paysagères du territoire par une identification et une préservation de ses originalités paysagères, et une identification et une préservation des spécificités de chaque quartier : environnement végétal, propriétés remarquables (bastides de caractère, jardins d'intérêt paysager...). Le diagnostic territorial identifie à la page 105 la propriété de M. E... comme une propriété remarquable, présentant, comme d'autres propriétés, " des enjeux paysagers particuliers (paysage/environnement agricole/rural, jardins/boisements remarquables...) ". Il est aussi mentionné que " L'enjeu est, dans le cadre du plan local d'urbanisme, de considérer ces propriétés en vue de préserver les plus remarquables à travers des dispositions réglementaires spécifiques : identification comme élément du paysage à préserver et/ou définition d'un zonage et règlement spécifiques. ". A la page 124 du diagnostic territorial, la propriété de M. E... est présentée de manière détaillée, au moyen notamment d'une photographie satellite et décrite comme un " espace rural intéressant car positionné comme une coupure verte au sein d'un quartier pavillonnaire. Le jardin de la propriété est marquée par son étendue et la présence au Sud d'alignements d'arbres remarquables.". La partie du rapport de présentation relative à la justification du projet d'aménagement indique à la page 157 que le zonage découle directement des différentes typologies identifiées sur le territoire, dont le secteur UJ regroupant les propriétés remarquables avec vocation principale d'habitat. A la page suivante, l'institution de ce secteur UJ est qualifiée comme étant en cohérence avec les orientations 1.1 et 1.2 du projet d'aménagement et de développement durable qui affirment l'enjeu d'identifier et de préserver les spécificités patrimoniales et paysagères de Six-Fours-les-Plages.
7. Le rapport de présentation a ainsi expliqué, conformément aux dispositions précitées, le parti pris d'urbanisme relatif à l'identification et à la préservation des éléments paysagers propres à la commune et les raisons pour lesquelles, d'une part, dans ce cadre, un secteur UJ permettant d'atteindre cet objectif a été créé et d'autre part, la propriété de M. E... a été classée dans ce secteur. Cette justification n'est pas subordonnée, par les dispositions du code de l'urbanisme, à la réalisation d'une étude paysagère préalable. Par suite, la circonstance que l'étude, réalisée en 1998 ou 2008, ne permettrait pas de justifier ce classement n'a pas d'influence sur la régularité du rapport de présentation. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisante justification du classement en secteur UJ des parcelles AX 2243 à AX 2247 doit être écarté.
8. Aux termes de l'article R*123-8 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les zones urbaines sont dites "zones U". Peuvent être classés en zone urbaine, les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter. ". Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
9. Il résulte du point 4 que la délimitation au sein d'une zone urbaine d'un secteur permettant la préservation d'une propriété remarquable au regard notamment, en ce qui concerne la propriété de M. E..., de l'étendue de son jardin, est cohérent d'une part avec le parti pris d'urbanisme retenu par la commune et d'autre part avec l'état des parcelles en cause, qui supportent un vaste jardin arboré entourant des constructions à usage d'habitation. Les circonstances que ce jardin ne serait pas entretenu et serait à l'état de friche, et qu'il ne ferait pas partie d'une continuité écologique, qui ne constitue pas un des motifs du classement, ne sont pas de nature à faire regarder ce classement comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
10. Aux termes de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " (...) III.-Le règlement peut, en matière de caractéristiques architecturale, urbaine et écologique : (...) 2° Identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les quartiers, îlots, immeubles, espaces publics, monuments, sites et secteurs à protéger, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d'ordre culturel, historique, architectural ou écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation. (...) ".
11. L'annexe 2 du règlement, relative aux éléments identifiés au titre du 2° du III de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme identifie, au titre des espaces verts à protéger et des éléments végétaux intéressants, à la page 311, sous le n° C 20, un alignement d'arbres remarquables situé au Sud de la propriété de M. E.... Le " vaste jardin arboré " de cette même propriété est quant à lui identifié à la page 328 sous le n° E 19 comme un " espace à planter ".
12. Il ressort du rapport de présentation, et notamment de la photographie satellite de la page 124 du diagnostic territorial, qu'il existe, au Sud de la propriété de M. E..., des alignements d'arbres. Il ressort des pièces du dossier que les quelques arbres situées à l'extrémité Sud-Est de ces alignements sont situés sur la parcelle AX 1888 et non pas sur la parcelle AX 2247. M. E... est par suite fondé à demander l'annulation du plan local d'urbanisme en tant que cette partie des alignements figure sur la parcelle AX 2247.
13. Il ressort du rapport de présentation, comme il a été dit au point 4, que le plan local d'urbanisme entend préserver la propriété de M. E... pour des raisons paysagères, dès lors qu'elle se présente, en raison de son vaste jardin arboré, comme un espace rural au sein d'un quartier pavillonnaire. Ainsi, ce jardin n'a pas été identifié comme faisant partie d'une continuité écologique et, par suite, le moyen tiré de ce qu'il ne ferait pas partie d'une telle continuité écologique est sans influence sur la légalité de son classement en tant qu'élément de paysage, et doit être écarté.
14. Enfin, l'identification de ce jardin comme un élément de paysage à préserver n'impose pas à son propriétaire de l'améliorer et ne porte pas ainsi atteinte, en tout état de cause, au droit de propriété de M.E..., dont celui-ci n'est pas privé.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande en tant que le plan local d'urbanisme fait figurer une partie de l'alignement C 20 sur la parcelle AX 2247.
Sur l'appel incident :
16. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
17. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E... le versement d'une somme de 300 euros au titre des frais exposés en première instance par la commune de Six-Fours-les-Plages.
Sur les frais liés à l'instance d'appel :
18. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
19. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Six-Fours-les-Plages, qui n'est pas partie dans la présente instance, la somme que demande M. E... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E... le versement à la métropole Toulon-Provence-Méditerranée d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : L'intervention présentée par la commune de Six-Fours-les-Plages est rejetée.
Article 2 : La délibération du 10 avril 2015 par laquelle le conseil municipal de Six-Fours-les-Plages a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune est annulée en tant que le plan local d'urbanisme fait figurer une partie de l'alignement C 20 sur la parcelle AX 2247.
Article 3 : M. E... versera une somme de 300 euros à la commune de Six-Fours-les-Plages au titre des frais exposés en première instance.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 7 novembre 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 2 et 3.
Article 5 : M. E... versera une somme de 2 000 euros à la métropole Toulon-Provence-Méditerranée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E..., à la commune de Six-Fours-les-Plages et à la métropole Toulon-Provence-Méditerranée.
Délibéré après l'audience du 21 juin 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Poujade, président de chambre,
- Mme Josset, présidente assesseure,
- M. Gonneau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 juillet 2018.
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N° 17MA05004
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