Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière (SCI) Le Cannet Maurice Jean Pierre a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 17 décembre 2013 par lequel le maire de la commune du Cannet a refusé de lui délivrer un permis de construire valant permis de démolir pour la construction d'un ensemble immobilier de vingt-sept logements et deux commerces en rez-de-chaussée sur un terrain situé 37, avenue Maurice Jean Pierre.
Par un jugement n° 1402567 du 1er décembre 2016, le tribunal administratif de Nice a annulé cet arrêté.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er février 2017 et le 9 mars 2017, sous le n° 17MA00464, la commune du Cannet, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 1er décembre 2016 ;
2°) de rejeter la demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de la SCI Le Cannet Maurice Jean Pierre la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la notification du jugement qui comportait une mention erronée sur les modalités d'appel l'entache d'irrégularité ;
- le projet méconnaît l'article UC 7 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) qu'il faut appliquer littéralement en tenant compte de la hauteur du bâtiment y compris au-delà de la bande des 16 mètres et sans se référer aux modalités de calcul de l'article UC 10 du même règlement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mai 2017, la SCI Le Cannet Maurice Jean Pierre, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la commune du Cannet la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
II. Par une décision n° 407433 du 12 décembre 2017 enregistrée le 8 janvier 2017 au greffe de la Cour sous le n° 18MA00034, le Conseil d'État statuant au contentieux a transmis à la cour administrative d'appel de Marseille la requête présentée par la commune du Cannet.
Par une requête et un mémoire enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'État le 1er février 2017 la commune du Cannet, représentée par Me A..., demande à la Cour :
- d'annuler le jugement précité du 1er décembre 2016 ;
- de mettre à la charge de la SCI Le Cannet la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué méconnaît les droits de la défense, le principe du contradictoire et les garanties du procès équitable énoncées par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à défaut de communication intégrale et régulière des mémoires et pièces adverses ; il est insuffisamment motivé ;
- la règle de prospect énoncée par l'article 7 du règlement du document d'urbanisme doit être appliquée en fonction de la hauteur au point le plus haut de la construction dans son ensemble.
En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.
La présidente de la Cour a désigné Mme Muriel Josset, présidente assesseure de la 1ère chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Alain Poujade, président de la 1ère chambre.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gougot,
- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteure publique,
- et les observations de Me D..., représentant la commune du Cannet, et de Me B..., substituant Me C..., représentant la SCI Le Cannet Maurice Jean Pierre.
Une note en délibéré présentée par la SCI Le Cannet Maurice Jean Pierre a été enregistrée le 8 juin 2018 dans les deux instances.
1. Considérant que le maire du Cannet a, par arrêté du 17 décembre 2013 refusé d'accorder à la société civile immobilière (SCI) Le Cannet Maurice Jean Pierre un permis de construire valant permis de démolir portant sur la construction d'un immeuble en R+4 de vingt-sept logements dont huit logements sociaux avec commerce en rez-de-chaussée pour une surface de 1834 m², sur un terrain cadastré AK n° 409, situé avenue Maurice Jean Pierre, en zone UC du plan d'occupation des sols (POS) communal ; que, par une requête enregistrée sous le n° 17MA00464, la commune du Cannet a interjeté appel devant la cour administrative d'appel de Marseille, du jugement du 1er décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé cet arrêté et lui a enjoint de procéder à une nouvelle instruction de la demande d'autorisation ; que parallèlement, elle a saisi le Conseil d'Etat d'un recours en cassation dirigé contre le même jugement ; que, par une décision du 12 décembre 2017, le Conseil d'État statuant au contentieux a transmis à la cour administrative d'appel de Marseille, qui l'a enregistré sous une requête n° 18MA00034, le recours présenté par la commune du Cannet, au motif que la voie d'appel demeurait ouverte contre ce jugement en application des articles R. 811-1 et R. 811-1-1 du code de justice administrative, s'agissant d'un refus d'autorisation ;
Sur la jonction :
2. Considérant que les requêtes de la commune du Cannet enregistrées sous les n° 17MA00464 et 18MA00034 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Considérant qu'aux termes de l'article UC 7 du règlement du POS communal : " Implantation des constructions par rapport aux limites séparatives : [...] / Marges latérales : Dans la bande des 16 mètres, toute construction doit être éloignée des limites séparatives de l'unité foncière qui touchent une voie d'une distance au moins égale à la moitié de sa hauteur, cette distance ne devant jamais être inférieure à 5 mètres./ Cette distance peut être ramenée à 5 mètres, quelle que soit la hauteur de la construction, si les façades latérales ne donnent jour que par des ouvertures de moins de 0,80 m² de surface... " ; que l'article UC 10 du même règlement précise que : "La hauteur totale de toutes constructions, toutes superstructures comprises, est mesurée du point le plus haut de la construction, à son point le plus bas au niveau du terrain naturel ou excavé... " ; qu'en l'espèce, contrairement à ce que soutient la commune du Cannet, il ressort des termes mêmes de l'article UC 7 précité du règlement du POS que la hauteur de la construction objet de la demande d'autorisation qui doit être retenue pour calculer le prospect doit être celle du point le plus haut de ladite construction dans la limite de cette bande des 16 mètres ; que la hauteur de la construction au sens de l'article UC 7 est, en application de l'article UC 10 la hauteur totale de toutes constructions et non la hauteur de la construction au point le plus proche de la limite séparative concernée comme le soutient la SCI Le Cannet Maurice Jean Pierre ; qu'il ressort du dossier de demande de permis de construire, et notamment du document PC 2 que la hauteur maximum de la construction dans la bande des 16 mètres est de 19,30 mètres ce qui impliquait que la façade Sud se situe à une distance de la limite séparative d'au moins 9,65 mètres ; qu'il ressort du même document PC 2 que la distance varie entre 6,81 mètres et 8,38 mètres ; que par suite, le maire du Cannet a pu à bon droit refuser de délivrer l'autorisation demandée en se fondant sur le fait que les dispositions de l'article UC 7 du règlement du POS étaient méconnues ; que la commune du Cannet est donc fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé qu'en retenant la hauteur totale de la construction sur l'intégralité du projet d'assiette au-delà de la bande des 16 mètres pour refuser l'autorisation sollicitée, le maire du Cannet avait commis une erreur de droit ; que ce motif suffit à justifier la décision de refus opposée ;
4. Considérant qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SCI Le Cannet Maurice Jean Pierre tant en première instance qu'en cause d'appel ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement... " ; que l'article L. 2121-18 du même code dispose que : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d'une délégation à des membres du conseil municipal. " ; que s'il résulte de l'article L. 2121-24 du même code que : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, le dispositif des délibérations à caractère réglementaire est publié dans un recueil des actes administratifs dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. ", ces dispositions n'ont pas dérogé au principe fixé au premier alinéa selon lequel la formalité de publicité qui conditionne l'entrée en vigueur des actes réglementaires du maire peut être soit la publication, soit l'affichage ;
6. Considérant qu'en l'espèce, le maire de la commune du Cannet justifie avoir accordé au signataire de l'acte attaqué une délégation le 22 avril 2008, régulièrement affichée le même jour et transmise au contrôle de légalité le 22 mai 2009 ; que la société pétitionnaire ne peut utilement soutenir qu'il n'est pas justifié d'une publication au recueil des actes administratifs, qui n'est pas une condition du caractère exécutoire de cette délégation, ainsi qu'il a été dit au point5 ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement, la commune du Cannet est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé le refus de permis de construire attaqué ;
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la SCI Le Cannet Maurice Jean Pierre dirigées contre la commune du Cannet qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Le Cannet Maurice Jean Pierre la somme de 2 000 euros, à verser à la commune du Cannet en application de ces dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 1er décembre 2016 est annulé.
Article 2 : Les demandes de la SCI Le Cannet Maurice Jean Pierre sont rejetées.
Article 3 : La SCI Le Cannet Maurice Jean Pierre versera à la commune du Cannet une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune du Cannet et à la SCI Le Cannet Maurice Jean Pierre.
Délibéré après l'audience du 7 juin 2018, où siégeaient :
- Mme Josset, présidente assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Gonneau, premier conseiller,
- Mme Gougot, première conseillère.
Lu en audience publique, le 21 juin 2018.
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N° 17MA00464, 18MA00034