Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B... C...ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 30 juin 2014 par laquelle le conseil municipal du Collet-de-Dèze a décidé de vendre à la société Christal la parcelle cadastrée C 1407.
Par un jugement n° 1402649 du 22 mars 2016, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. et Mme C....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 24 mai 2016 et le 28 juillet 2017, M. et Mme C..., représentés par Me D..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 22 mars 2016 ;
2°) d'annuler la délibération du 30 juin 2014 du conseil municipal du Collet-de-Dèze ;
3°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer dans l'attente de la décision du tribunal de grande instance de Mende ;
4°) de mettre à la charge de la commune du Collet-de-Dèze le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la présence d'un conseiller intéressé a entaché la délibération contestée d'irrégularité ;
- cette délibération de vente à un tiers d'une parcelle appartenant au domaine privé de la commune méconnaît leur droit de rétrocession prioritaire en application de l'article 12-6 du code de l'expropriation ;
- la délibération du 16 décembre 2013, si la Cour considère qu'elle est créatrice de droit, est frauduleuse et méconnaît le droit de propriété reconnu par les articles 544 et suivants du code civil ainsi que l'article premier du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Un mémoire non communiqué présenté pour M. et Mme C... a été enregistré le 11 mai 2018.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 août 2017, la commune du Collet-de-Dèze conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge des appelants la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 août 2017, non communiqué, la société civile immobilière Christal conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. et Mme C..., la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;
- les accusations portées à son encontre sont diffamatoires.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office, tiré de l'irrecevabilité du moyen soulevant la méconnaissance de l'article 12-6 du code de l'expropriation ;
Par un mémoire enregistré le 9 mai 2018, M. et Mme C... ont présenté des observations en réponse au moyen d'ordre public.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Féménia,
- et les conclusions de M. Chanon.
1. Considérant que par délibération du 30 juin 2014, le conseil municipal du Collet-de-Dèze a décidé de vendre à la société civile immobilière Christal la parcelle cadastrée C 1407 d'une superficie de 213 m² au prix de 1 100 euros ; que M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 22 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en a fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataire " ; qu'il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération, par une personne intéressée à l'affaire qui fait l'objet de cette disposition, est de nature à entraîner l'illégalité de cette disposition ; que, de même, la participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération, par une personne intéressée à l'affaire qui fait l'objet de cette disposition, est susceptible de vicier la légalité de cette disposition, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation au vote de la disposition litigieuse, dès lors que la personne intéressée a été en mesure d'exercer une influence effective sur la délibération litigieuse ;
3. Considérant qu'en sa qualité d'acheteur de la parcelle n° 1407, l'intérêt de Mme A... à l'adoption de la délibération en litige est certain ; que toutefois, il ne ressort d'aucune pièce produite au dossier que celle-ci aurait pris une part active au débat lors de la séance au cours de laquelle a été adoptée la délibération en litige, ni qu'elle aurait exercé une influence effective sur cette délibération, adoptée à l'unanimité ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2131-11 précité doit être écarté ;
4. Considérant en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 12-6 du code de l'expropriation alors en vigueur : " Si les immeubles expropriés en application du présent code n'ont pas reçu dans le délai de cinq ans la destination prévue ou ont cessé de recevoir cette destination, les anciens propriétaires ou leurs ayants droit à titre universel peuvent en demander la rétrocession pendant un délai de trente ans à compter de l'ordonnance d'expropriation, à moins que ne soit requise une nouvelle déclaration d'utilité publique. " ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par jugement du 20 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Mende a débouté M. et Mme C... de leur demande tendant au prononcé de la nullité de la vente de la parcelle C 1407 intervenue les 4 et 8 novembre 2013 entre l'Etat et la commune du Collet de Dèze ainsi que la rétrocession de cette parcelle à leur profit au motif tiré de ce que l'acquisition par l'Etat en 1989 de ladite parcelle ne s'est pas inscrite dans le cadre de la déclaration d'utilité publique du 30 août 1983 relative au projet d'aménagement de la route nationale n° 106 sur le territoire de la commune du Collet-de-Dèze, qui seule permet l'expropriation ; que M. et Mme C... qui n'allèguent pas avoir fait appel de ce jugement, ne sont dès lors pas fondés à soutenir que la cession de la parcelle en litige à la société civile immobilière Christal est intervenue en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 12-6 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
6. Considérant qu'en soutenant que la délibération du 16 décembre 2013 par laquelle le conseil municipal s'est prononcé pour proposer aux établissementsA..., soit la vente de la parcelle litigieuse, soit sa location dans des conditions à définir, est entachée de fraude et méconnaît les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article 544 du code civil, M. et Mme C... doivent être regardés comme soulevant par voie d'exception l'illégalité de cette délibération ; que toutefois, cette décision qui n'emporte aucune modification de l'ordonnancement juridique, a le caractère d'un acte préparatoire dont l'illégalité ne peut être utilement invoquée à l'encontre de la délibération ultérieure approuvant l'aliénation du bien en cause ; que par suite, le moyen tiré de l'illégalité prétendue de cette décision est inopérant ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, alors qu'il n'y a pas lieu de sursoir à statuer compte tenu de l'intervention du jugement du tribunal de grande instance de Mende, que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 30 juin 2014 par laquelle le conseil municipal du Collet-de-Dèze a décidé de vendre à la société Christal la parcelle cadastrée C 1407 ;
Sur les frais liés au litige :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune du Collet-de-Dèze, qui n'a pas la qualité de partie perdante au présent litige, voit mis à sa charge une quelconque somme au titre des frais exposés par M. et Mme C... et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande formulée par la société immobilière Christal en application de ces dispositions ; qu'en revanche, il y a lieu, de mettre à la charge de M. et Mme C... une somme de 2 000 euros à verser à la commune du Collet-de-Dèze sur le fondement des mêmes dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme C... verseront à la commune du Collet-de-Dèze une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par la société immobilière Christal sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...C..., à la commune du Collet-de-Dèze et à la société civile immobilière Christal.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2018, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Maury, premier conseiller,
- Mme Féménia, première conseillère.
Lu en audience publique, le 15 juin 2018.
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N° 16MA02017
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