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23/05/2018 | FRANCE | N°17MA03890

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 23 mai 2018, 17MA03890


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 18 août 2017 par lequel le préfet du Gard a décidé sa remise aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile et l'arrêté du même jour l'assignant à résidence dans le département du Gard pour une durée de quarante-cinq jours, soit jusqu'au 2 octobre 2017, et d'autre part, d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer l'attestation de demande d'asile prévue par les dispositions de l

'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'as...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 18 août 2017 par lequel le préfet du Gard a décidé sa remise aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile et l'arrêté du même jour l'assignant à résidence dans le département du Gard pour une durée de quarante-cinq jours, soit jusqu'au 2 octobre 2017, et d'autre part, d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer l'attestation de demande d'asile prévue par les dispositions de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un jugement n°1702588 du 21 août 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 12 septembre 2017 et le 27 octobre 2017, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 août 2017 du préfet du Gard décidant sa remise aux autorités italiennes ;

3°) d'annuler l'arrêté du 18 août 2017 du préfet du Gard l'assignant à résidence ;

4°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer l'attestation de demande d'asile prévue par les dispositions de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de réexaminer sa situation ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à Me B... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'auteur de la décision de remise aux autorités italiennes est incompétent ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- les articles 4 et 5 du règlement n° 604/2013 ont été méconnus ;

- cette décision est entachée d'erreur de droit car sa situation personnelle n'a pas été examinée et le préfet s'est estimé en situation de compétence liée ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement n° 604/2013 ;

- l'arrêté d'assignation à résidence est illégal par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant remise aux autorités italiennes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 octobre 2017, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 11 octobre 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 octobre 2017.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 novembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné, par arrêté du 29 mars 2018, Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président assesseur, pour présider par intérim la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille à compter du 1er avril 2018.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... Grimaud a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. A..., ressortissant nigérian né le 20 avril 1984, est entré en France le 1er octobre 2016 selon ses déclarations ; que, par un premier arrêté du 18 août 2017, le préfet du Gard a décidé sa remise aux autorités italiennes en application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; que, par un second arrêté du même jour, il l'a assigné à résidence pour une durée de quarante cinq jours, soit jusqu'au 2 octobre 2017 ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 7 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride : " 1. Les critères de détermination de l'État membre responsable s'appliquent dans l'ordre dans lequel ils sont présentés dans le présent chapitre. / 2. La détermination de l'État membre responsable en application des critères énoncés dans le présent chapitre se fait sur la base de la situation qui existait au moment où le demandeur a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre (...) " ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative " ;

3. Considérant que l'arrêté attaqué se borne à mentionner la demande de reprise en charge formulée par les autorités françaises auprès des autorités italiennes et l'acceptation implicite de celles-ci, sans préciser le critère sur le fondement duquel ces dernières ont été regardées comme responsables de l'examen de la demande d'asile de M. A... ; que celui-ci est dès lors fondé à soutenir que cette décision est insuffisamment motivée ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision le transférant aux autorités italiennes ; qu'il y a lieu, dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, d'annuler le jugement du 21 août 2017 et l'arrêté du 18 août 2017 prononçant son transfert ainsi que par voie de conséquence, l'arrêté du même jour l'assignant à résidence ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;

6. Considérant qu'eu égard au motif pour lequel elle est prononcée, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique seulement, au vu des motifs exposés au point 4, que le préfet du Gard réexamine la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de sa notification ; qu'il y a lieu de le lui enjoindre ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me B... de la somme de 1 500 euros ;

D É C I D E :

Article 1 : Le jugement n°1702588 du tribunal administratif de Nîmes du 21 août 2017 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet du Gard du 18 août 2017 décidant la remise de M. A... aux autorités italiennes est annulé.

Article 3 : L'arrêté du préfet du Gard du 18 août 2017 assignant M. A... à résidence est annulé.

Article 4 : Il est enjoint au préfet du Gard de réexaminer la demande de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à Me B...en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à Me B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 7 mai 2018, où siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président,

- M. C... Grimaud, premier conseiller,

- M. Allan Gautron, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 mai 2018.

2

N° 17MA03890


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA03890
Date de la décision : 23/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur ?: M. Philippe GRIMAUD
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS VIENS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-05-23;17ma03890 ?
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