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23/04/2018 | FRANCE | N°16MA01968

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 23 avril 2018, 16MA01968


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I - M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Nice, par une requête enregistrée sous le n° 1305385, d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur de la maison d'arrêt de Grasse a rejeté sa demande tendant à la restitution de livres, de jeux de société, d'accusés de réception prépayés et d'un sceau de cire et à la délivrance d'un bulletin de paie pour le mois de décembre 2012, et d'enjoindre au directeur de la maison d'arrêt, sous astreinte, de lui restituer sans délai ces bie

ns, de lui délivrer ce bulletin de paie et de laisser aux détenus la possibilité ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I - M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Nice, par une requête enregistrée sous le n° 1305385, d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur de la maison d'arrêt de Grasse a rejeté sa demande tendant à la restitution de livres, de jeux de société, d'accusés de réception prépayés et d'un sceau de cire et à la délivrance d'un bulletin de paie pour le mois de décembre 2012, et d'enjoindre au directeur de la maison d'arrêt, sous astreinte, de lui restituer sans délai ces biens, de lui délivrer ce bulletin de paie et de laisser aux détenus la possibilité de recevoir des livres à couverture rigide.

II - M. C... a demandé au tribunal administratif de Nice, par une requête enregistrée sous le n° 1303588, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 056 euros ainsi que les intérêts au taux légal et la capitalisation de ces intérêts, en réparation du préjudice subi en raison de la suspension illégale de son activité professionnelle aux ateliers de la maison d'arrêt de Grasse en novembre et décembre 2012.

Par un jugement du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Nice, après avoir joint ces deux instances, a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation du refus de restitution d'objets à l'exception de celles portant sur le refus de restitution du sceau et des bâtonnets de cire, et a rejeté le surplus des conclusions présentées par M. C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 mai 2016, M. C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 19 novembre 2015 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 056 euros ainsi que les intérêts au taux légal et la capitalisation de ces intérêts, en réparation du préjudice subi en raison de la suspension illégale de son travail aux ateliers de la maison d'arrêt de Grasse en novembre et décembre 2012 ;

3°) d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur de la maison d'arrêt de Grasse a rejeté sa demande tendant à la restitution de livres, de jeux de société, de courriers avec accusés de réception prépayés, d'un sceau et de bâtonnets de cire, et à la délivrance d'un bulletin de paie pour le mois de décembre 2012 ;

4°) d'enjoindre au directeur de la maison d'arrêt de Grasse de lui restituer sans délai ses biens et de laisser les détenus recevoir des livres à couvertures rigides, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'insuffisance de motivation quant au motif de sécurité justifiant le refus de restitution du sceau et des bâtonnets de cire ;

- le directeur de l'établissement a retenu illégalement des livres, jeux de sociétés et DVD à couverture rigide sans motif légal ;

- les moyens de correspondance que constituent son sceau et sa cire ne sont utilisés qu'afin d'écrire aux autorités officielles de la République et de communiquer avec ses avocats sous le couvert du secret des correspondances garanti par l'article 25 de la loi du 24 novembre 2009 et les articles 727-1, R. 57-6-6 et D. 262 du code de procédure pénale.

Par une ordonnance du 14 juin 2016, le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat la requête de M. C... en tant que celle-ci comporte des conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à verser au requérant la somme de 1 056 euros ainsi que les intérêts au taux légal et la capitalisation de ces intérêts.

La requête de M. C... a été communiquée le 20 juin 2016 au garde des sceaux, ministre de la justice.

Par ordonnance du 25 septembre 2017, l'instruction a été close le 16 octobre 2017 à douze heures.

Les parties ont été informées le 30 mars 2018, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées par M. C... au tribunal administratif de Nice à fin d'annulation de la décision implicite du directeur de la maison d'arrêt de Grasse refusant de lui restituer un sceau et des bâtonnets de cire dès lors que celle-ci constitue une mesure d'ordre intérieur non susceptible de recours.

Le garde des sceaux, ministre de la justice a présenté le 4 avril 2018 des observations en réponse au moyen susceptible d'être relevé d'office par la Cour.

Il soutient que la décision de refus de restitution du sceau de cire constitue une mesure d'ordre intérieur.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 21 mars 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi pénitentiaire n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hameline

- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public.

1. Considérant que par un jugement du 19 novembre 2015 le tribunal administratif de Nice, saisi par M. D... C...d'un recours indemnitaire contre l'Etat et d'un recours en annulation de la décision implicite du directeur de la maison d'arrêt de Grasse du 29 octobre 2013 refusant de lui restituer divers objets et de lui délivrer un bulletin de salaire pour le mois de décembre 2012, a joint ces deux instances, a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation du refus de restitution d'objets à l'exception de celles portant sur le refus de restitution d'un sceau et de bâtonnets de cire, et a rejeté le surplus des conclusions présentées par l'intéressé ; que les conclusions présentées par M. C... devant la cour administrative d'appel de Marseille contre ce jugement en tant qu'il rejetait ses conclusions indemnitaires ont été transmises au Conseil d'Etat ; que la Cour demeure saisie des seules conclusions de la requête de M. C... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice en tant que celui-ci s'est prononcé sur ses conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet prise par le directeur de la maison d'arrêt de Grasse et sur les conclusions à fin d'injonction accessoires des précédentes ;

Sur le non-lieu à statuer partiel constaté par les premiers juges :

2. Considérant que le tribunal administratif de Nice a considéré que les conclusions à fin d'annulation présentées par M. C... étaient devenues sans objet en ce qu'elles portaient sur le refus de lui permettre l'usage en cellule de livres, jeux de société et d'accusés de réception prépayés, au motif que le requérant en avait obtenu la restitution ; qu'il n'est pas contesté que peu après l'introduction de son recours, l'intéressé s'est effectivement vu restituer les objets en litige ainsi que l'indique l'administration dans son mémoire du 26 juin 2014 ; que M. C... ne critique aucunement en appel, au demeurant, la perte d'objet du litige dans cette mesure au cours de l'instance introduite devant les premiers juges ; que, par suite, les conclusions tendant à l'annulation du jugement en tant que par son article 1er celui-ci a constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur cette demande ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;

Sur la recevabilité des conclusions de M. C... dirigées contre le refus de lui restituer un sceau et des bâtonnets de cire :

3. Considérant que, pour déterminer si une mesure prise par l'administration pénitentiaire à l'égard d'un détenu constitue un acte administratif susceptible de recours pour excès de pouvoir, il y a lieu d'apprécier sa nature et son incidence sur la situation du détenu ;

4. Considérant que le refus de laisser à M. C... l'usage en cellule d'un sceau et de cire à cacheter, qui ne constitue pas une mesure disciplinaire, a été motivé par l'administration par l'objectif d'éviter un détournement de l'utilisation de ces objets pour des raisons de maintien de la sécurité ; que cette décision n'a pas eu d'effet notable sur les conditions de vie en détention de l'intéressé ; que celui-ci n'a pas été privé de la propriété de ces objets ; qu'enfin, la mesure en litige n'entraîne aucun effet par elle-même ni sur le libre exercice par M. C... de son droit de correspondre avec des personnes extérieures, ni sur le respect par l'administration du secret des correspondances dans les conditions prévues notamment par les articles 25 et 40 de la loi du 24 novembre 2009 et par l'article R. 57-8-20 du code de procédure pénale ; qu'elle ne met, dès lors, pas en cause les libertés et droits fondamentaux des détenus ; que, par suite, le refus opposé à la demande de restitution de ces objets par le directeur de la maison d'arrêt de Grasse le 29 octobre 2013 constituait une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours pour excès de pouvoir ;

5. Considérant qu'il suit de là que les conclusions présentées par M. C... au tribunal administratif à fin d'annulation de cette décision de refus étaient, en toute hypothèse, irrecevables ;

Sur le bien-fondé du jugement en tant qu'il statue sur les conclusions de M. C... dirigées contre le refus de lui délivrer un bulletin de salaire pour le mois de décembre 2012 :

6. Considérant que la requête d'appel de M. C... n'est assortie d'aucun moyen à l'encontre du jugement contesté en tant que celui-ci a rejeté sa demande d'annulation de la décision du directeur de la maison d'arrêt de Grasse refusant de lui délivrer un bulletin de salaire pour le mois de décembre 2012 ; que ses conclusions tendant à l'annulation du jugement dans cette mesure ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

7. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions tendant à l'annulation du refus de restitution de livres, jeux de société et d'accusés de réception prépayés, et a rejeté le surplus de ses conclusions à fin d'annulation ainsi que ses conclusions à fin d'injonction accessoires des précédentes ;

Sur les conclusions présentées devant la Cour aux fins d'injonction et d'astreinte :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête d'appel de M. C..., n'appelle aucune mesure d'exécution de la part de l'administration ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées à nouveau par M. C... devant la Cour ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

9. Considérant que les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que les sommes réclamées par Me A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., au garde des sceaux, ministre de la justice, et à Me B...A....

Délibéré après l'audience du 9 avril 2018, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme Hameline, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 avril 2018.

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N° 16MA01968


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA01968
Date de la décision : 23/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Juridictions administratives et judiciaires - Exécution des jugements - Exécution des peines - Service public pénitentiaire.

Procédure - Introduction de l'instance - Décisions pouvant ou non faire l'objet d'un recours - Actes ne constituant pas des décisions susceptibles de recours - Mesures d'ordre intérieur.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Marie-Laure HAMELINE
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : CABINET DGK AVOCATS ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-04-23;16ma01968 ?
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