Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... G...et Mme E... G...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 19 septembre 2013 par laquelle le maire de la commune de Sérignan a délivré un permis de construire à M. et Mme B....
Par un jugement n° 1403753 du 24 mars 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 24 mai 2016, M. et Mme G..., représenté par la SCP d'avocats Caudrelier-Esteve, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 24 mars 2016 ;
2°) d'annuler la décision du 19 septembre 2013 par laquelle le maire de la commune de Sérignan a délivré un permis de construire à M. et Mme B... ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Sérignan une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les pièces du dossier de permis de construire ne permettent pas d'avoir une connaissance précise du projet, notamment en ce qui concerne les plantations en violation des articles R. 431-8 e) et R. 431-9 du code de l'urbanisme ;
- compte tenu de leur dimension et de leur adossement à l'habitation principale, les locaux en litige ne constituent pas une construction annexe nouvelle au sens de l'article UC7 du règlement du plan local d'urbanisme mais une extension de la maison d'habitation ;
- le mur séparant la cour de la construction d'habitation méconnaît le même article UC7.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juin 2016, la commune de Sérignan, représentée par la SELARL d'avocats Valette-Berthelsen conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme G... d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les appelants ne justifient pas leur intérêt à agir ;
- les moyens soulevés par M. et Mme G... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 septembre 2016, M. D... B...et Mme F...B..., représentés par la SELARL d'avocats Chatel et associés, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme G... d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que les moyens soulevés par M. et Mme G... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lopa Dufrénot,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me H... représentant la commune de Sérignan, et de Me C... représentant M. et Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 19 septembre 2013, le maire de la commune de Sérignan a délivré à M. et Mme B... un permis de construire une maison d'habitation d'une surface de plancher de 136 m² comportant en outre un garage et un cellier attenants, sur les parcelles cadastrées section AV n° 216 et 2017, classées en zone UC du plan local d'urbanisme. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande présentée par M. et Mme G... tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la fin de non recevoir opposée par la commune de Sérignan à la requête d'appel :
2. La commune de Sérignan oppose l'irrecevabilité de la requête d'appel au motif que les appelants sont dépourvus d'un intérêt leur donnant qualité à agir contre l'arrêté du 19 septembre 2013.I..., en leur qualité de partie à l'instance devant le tribunal administratif qui a rejeté leur demande, M. et Mme G... ont intérêt à interjeter appel du jugement en cause. La fin de non-recevoir opposée par la commune de Sérignan ne peut qu'être écartée.
Sur les fins de non recevoir opposées à la demande de première instance :
3. D'une part, l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme énonce qu'une personne n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire que si la construction est de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement. Il en résulte qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Il appartient ensuite au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
4. Il ressort des pièces du dossier, notamment d'un acte de donation-partage et d'un avis d'imposition au titre de l'année 2014 que M. G... résidant au 6 rue de Montplaisir à Sérignan, à proximité du terrain d'assiette du projet en cause situé au 8-10 de la même rue, justifie de sa qualité de propriétaire voisin immédiat. De plus, il ressort notamment de clichés photographiques versés aux débats que la partie de la construction envisagée à usage de garage et de cellier, édifiée en limite de propriété, sur une longueur de près de 9 mètres et d'une hauteur de 2,70 mètres, eu égard à ses caractéristiques et à la configuration des lieux, est de nature à affecter directement les conditions de jouissance de son bien. Ainsi, la fin de non-recevoir opposée par M. et Mme B... et la commune de Sérignan, tirée du défaut d'intérêt à agir de M. et Mme G..., doit être écartée.
5. D'autre part, l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme prévoit que le délai de recours contentieux à l'encontre notamment d'un permis de construire court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. L'article R. 424-15 de ce code précise les conditions d'affichage de la mention du permis sur le terrain. Il en résulte que s'il incombe au bénéficiaire d'un permis de construire de justifier qu'il a bien rempli les formalités d'affichage prescrites par les dispositions précitées, le juge doit apprécier la continuité de l'affichage en examinant l'ensemble des pièces qui figurent au dossier qui lui est soumis.
6. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la copie d'un rapport journalier du 28 mai 2014 de la SARL C. Maurel, chargée de l'exécution des travaux pour le compte des bénéficiaires du permis de construire, du courriel de cette entreprise à l'architecte le même jour auquel était jointe une photographie du panneau faisant mention du permis délivré, apposé sur le grillage de clôture du terrain d'assiette ainsi que des attestations de l'entrepreneur et de son employé et, du reste ce n'est pas contesté, que mention du permis de construire a été affichée sur le terrain le 28 mai 2014. Néanmoins, eu égard aux témoignages versés aux débats, émanant de tiers dépourvus de tout lien avec les parties, dont l'un est riverain, attestant de la réalité de l'affichage sur le terrain exclusivement à partir du 10 juin 2014, M. et Mme B... qui n'apportent aucun élément de nature à infirmer ces attestations, ne sauraient soutenir que l'affichage du permis de construire a été continu à compter du 28 mai 2014. Dans ces circonstances, en raison de l'irrégularité de l'affichage du permis, le délai de recours n'a pas commencé à courir à compter de cette date. Dès lors, la demande présentée par M. et Mme G... et enregistrée le 5 août 2014, au greffe du tribunal administratif de Montpellier tendant à l'annulation du permis de construire en litige, n'était pas tardive.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
7. L'article 7 du règlement de la zone UC du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Sérignan énonce que : " Lorsque les constructions ne jouxtent pas la limite séparative, la distance comptée horizontalement de tout point de ce bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à 3 M. / I...la construction d'un bâtiment joignant la limite parcellaire est admise : / - Soit lorsqu'il s'agit de constructions annexes nouvelles telles que garage, remises, etc... ne dépassant 4 m de hauteur totale et 10 m de longueur totale à mesurer le long de la limite séparative. / - Soit pour édifier des bâtiments jointifs en mitoyenneté de dimensions sensiblement équivalente. / - Soit lorsqu'il peut être adossé à un bâtiment sur le fond voisin et de gabarit sensiblement identique. / - Soit les constructions pourront être jumelées par le garage. (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge administratif de rechercher si tant par leur destination que par leurs caractéristiques et, notamment, leurs dimensions, les constructions annexes en cause peuvent être regardées comme des accessoires du bâtiment principal et non comme des extensions.
8. Il ressort des pièces du dossier, plus précisément du plan de masse PCMI 2B et du plan PCMI 2C, annexés à la demande de permis que le garage de 15,06 m² qui donne accès directement au cellier de 8,55 m² et ce dernier local, tous deux d'une longueur totale de 8,95 et d'une hauteur de 2,70 m, adossés à la partie de la construction principale à usage d'habitation, sont implantés en limite de propriété du terrain d'assiette. Le cellier dans le prolongement du garage avec lequel il communique, présente un accès direct sur la cuisine de la partie habitable et sur l'extérieur vers une petite cour. Alors même que le garage et le cellier en litige présentent une dimension limitée compte tenu des affectations prévues, eu égard à la configuration du projet de construction envisagé, ces locaux qui font partie intégrante du bâtiment à usage d'habitation, ne peuvent être regardés comme étant des locaux accessoires de la partie du bâtiment principal. En conséquence, ils ne constituent pas des " constructions annexes nouvelles " au sens de l'article 7 du règlement de la zone UC du plan local d'urbanisme. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est, au demeurant, pas allégué que ces locaux en litige relèveraient des autres exceptions posées par ces dispositions.
9. Pour l'application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens de la requête n'est susceptible de fonder l'annulation de l'arrêté du 19 septembre 2013.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme G... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande. Il y a lieu, dès lors, d'annuler ce jugement et l'arrêté du maire de la commune de Sérignan du 19 septembre 2013.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme G..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. et Mme B... et la commune de Sérignan demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge d'une part de la commune de Sérignan et, d'autre part, de M. et Mme B..., la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme G... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 24 mars 2016 et l'arrêté du maire de la commune de Sérignan du 19 septembre 2013 sont annulés.
Article 2 : M. et Mme B... verseront à M. et Mme G... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La commune de Sérignan versera à M. et Mme G... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... G..., à Mme E...G..., à la commune de Sérignan, à M. et Mme D...B....
Copie en sera adressée au Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Béziers.
Délibéré après l'audience du 10 avril 2018, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère.
Lu en audience publique, le 20 avril 2018.
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N° 16MA02032