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29/03/2018 | FRANCE | N°15MA04734

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 29 mars 2018, 15MA04734


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...et Mme E...ont demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune d'Arles à leur verser la somme de 17 251,40 euros en réparation des préjudices qu'elles estiment avoir subis du fait du fonctionnement de compresseurs.

Par un jugement n° 1302990 du 12 octobre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 décembre 2015 et le 11 septembre 2017, MmesB..., représe

ntées par la SCP Troegeler, A..., Bredeau-Troegeler, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...et Mme E...ont demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune d'Arles à leur verser la somme de 17 251,40 euros en réparation des préjudices qu'elles estiment avoir subis du fait du fonctionnement de compresseurs.

Par un jugement n° 1302990 du 12 octobre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 décembre 2015 et le 11 septembre 2017, MmesB..., représentées par la SCP Troegeler, A..., Bredeau-Troegeler, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 12 octobre 2015 ;

2°) de condamner la commune d'Arles à leur verser la somme de 23 311,72 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 6 mai 2013 et la capitalisation de ces intérêts ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Arles la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- la responsabilité sans faute de la commune est engagée en raison des nuisances sonores causées par les ouvrages publics dont elle a la charge ;

- les préjudices subis présentent un caractère anormal et spécial ;

- le lien de causalité entre le fonctionnement des compresseurs et le dommage est établi ;

- elles sont fondées à demander l'indemnisation des loyers de l'appartement, des charges de copropriété, des factures de fourniture de l'eau et du préjudice moral subi par leur mère avant son décès.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 février 2016, la commune d'Arles, représentée par la SELARL Volfin Associés-Arles, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mmes B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le lien de causalité entre le dysfonctionnement de l'ouvrage public et le préjudice n'est pas établi.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant MmesB..., etC..., représentant la commune d'Arles.

1. Considérant que Mmes B...relèvent appel du jugement du 12 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande de condamnation de la commune d'Arles à leur verser la somme de 17 251,40 euros en réparation des préjudices que leur mère aurait subis entre le mois d'octobre 2009 et le mois de décembre 2011 en raison des nuisances sonores causées par le fonctionnement de compresseurs d'appareils de climatisation installés au mois d'avril 2009 dans la cour du musée Réattu à proximité immédiate d'un appartement qu'elle donnait alors en location, situé au n° 15 de la rue Dieudonné, dont les requérantes ont hérité à son décès ;

Sur la fin de non-recevoir opposée en première instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. (...) " ;

3. Considérant que Mmes B...ne se sont pas bornées dans leur demande de première instance, à exposer des faits mais se sont également fondées sur le rapport de l'expert en acoustique désigné par le juge des référés du tribunal de grande instance de Tarascon, pour en déduire que la responsabilité de la commune d'Arles était engagée en raison du fonctionnement d'un ouvrage public ; que la demande devant le tribunal administratif satisfait dès lors aux prescriptions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que la fin de non-recevoir tirée du défaut de motivation de cette demande doit, par suite, être écartée ;

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Considérant que la commune d'Arles ne conteste pas que les nuisances sonores résultant du fonctionnement des ouvrages publics lui appartenant présentaient un caractère anormal et spécial susceptible d'engager sa responsabilité à l'égard des requérantes, qui ont la qualité de tiers par rapport à ces ouvrages ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du courrier du 4 mars 2010 de l'agence immobilière " Liberté Immobilier ", que le logement mis en location, contre un loyer mensuel de 465 euros, a été libéré le 30 septembre 2009 et qu'il n'a pas pu être reloué en raison des nuisances sonores causées par le fonctionnement continu des compresseurs installés dans la cour du musée, jusqu'au mois de décembre 2011, date de réalisation de travaux d'insonorisation par la commune d'Arles ; que le préjudice résultant de la perte de loyers durant la période courant du mois d'octobre 2009 au mois de décembre 2011 présente ainsi un lien de causalité direct et certain avec le fonctionnement de l'ouvrage public en cause et ouvre droit à réparation à MmesB..., pour un montant total de 12 090 euros ;

6. Considérant que l'impossibilité de louer l'appartement du fait des nuisances sonores imputables à la commune a empêché son propriétaire d'obtenir le remboursement de la part des charges de copropriété récupérables auprès du locataire ; qu'il y a lieu d'accorder aux requérantes la somme de 478,40 euros à ce titre ;

7. Considérant que les requérantes ne démontrent pas, eu égard notamment à la durée de la période pendant laquelle l'appartement n'a pu être mis en location, que la charge supportée par le propriétaire en raison de son choix de maintenir l'abonnement au service de distribution d'eau constitue un préjudice directement imputable à l'ouvrage public dont la commune d'Arles a la garde ; qu'elles ne sont dès lors pas fondées à demander une indemnité à ce titre ;

8. Considérant qu'Emilienne Orosco a supporté la charge des frais de l'expertise judiciaire, mentionnée au point 4, qui ont été taxés à la somme de 6 060,32 euros par une ordonnance du 24 février 2012 ; que cette expertise a été utile à la solution du litige ; qu'il y a lieu de réparer le préjudice qui a résulté de cette dépense ;

9. Considérant qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par Emilienne Orosco du fait des diverses démarches qu'elle a dû effectuer pour faire cesser les nuisances sonores affectant le bien dont elle était propriétaire, en allouant aux requérantes la somme de 500 euros ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été indiqué aux points 5 à 9 que le préjudice total s'élève à la somme de 19 128,72 euros ; que, toutefois, le montant total demandé devant les premiers juges s'élevait à la somme de 17 251,40 euros ; que le dommage ne s'est ni aggravé ni révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement attaqué ; qu'il suit de là que l'indemnité mise à la charge de la commune d'Arles doit être fixée à 17 251 euros ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

11. Considérant que Mmes B...ont droit aux intérêts au taux légal de la somme de 17 251 euros à compter du 6 mai 2013, date d'enregistrement de leur demande au greffe du tribunal administratif ;

12. Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 11 décembre 2015 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement, que Mmes B...sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande ;

Sur les frais liés au litige :

14. Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Arles une somme de 2 000 euros à verser à Mmes B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mmes B...la somme que la commune d'Arles demande ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 12 octobre 2015 est annulé.

Article 2 : La commune d'Arles est condamnée à verser à Mmes B...la somme de 17 251 euros avec intérêts au taux légal à compter du 6 mai 2013. Les intérêts échus à la date du 11 décembre 2015 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mmes B...est rejeté.

Article 4 : La commune d'Arles versera une somme de 2 000 euros à Mmes B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de la commune d'Arles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à MmeD..., à Mme E...et à la commune d'Arles.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2018 où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère,

- M. Argoud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 mars 2018.

2

N° 15MA04734


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA04734
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-03-03 Travaux publics. Différentes catégories de dommages. Dommages causés par l'existence ou le fonctionnement d'ouvrages publics.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Agnes BOURJADE
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : TROEGELER GOUGOT BREDEAU TROEGELER MONCHAUZOU

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-03-29;15ma04734 ?
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