La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/03/2018 | FRANCE | N°16MA04681

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 22 mars 2018, 16MA04681


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie (SNOL) a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1402820 du 18 août 2016, le tribunal administratif de Toulon a déchargé la SARL SNOL, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les soci

étés mises à sa charge au titre de l'année 2010.

Procédure devant la Cour :

Par un recou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie (SNOL) a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1402820 du 18 août 2016, le tribunal administratif de Toulon a déchargé la SARL SNOL, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'année 2010.

Procédure devant la Cour :

Par un recours, enregistré le 16 décembre 2016, le ministre des finances et de l'économie demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement 18 août 2016 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) de remettre à la charge de la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie la somme de 173 330 euros correspondant à la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2010 dégrevée en exécution du jugement du tribunal administratif de Toulon.

Il soutient que :

- le jugement du tribunal administratif de Toulon est insuffisamment motivé ;

- l'exercice 2010 constituait le premier exercice non prescrit déterminé conformément au délai de reprise de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales de sorte que c'est à tort que le jugement déféré a considéré pour l'application de l'intangibilité du bilan d'ouverture, que le premier exercice non prescrit était l'exercice clos le 31 décembre 2009.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mars 2017, la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie conclut au rejet du recours du ministre.

Elle soutient que l'année 2009 n'était pas prescrite dès lors que les opérations de vérification sur place s'étaient achevées à la date du 31 décembre 2012.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné Mme Évelyne Paix, président assesseur, pour présider par intérim la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sauveplane,

- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.

1. Considérant que le ministre de l'économie et des finances relève appel du jugement du 18 août 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulon a déchargé la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle avait été assujettie au titre de l'année 2010 à la suite d'une vérification de comptabilité ;

2. Considérant que, pour décharger la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2010 en litige, le tribunal administratif de Toulon a jugé que la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture s'appliquait au premier exercice non prescrit, qui en l'espèce était l'exercice 2009 ; qu'il en a déduit que l'administration n'était pas fondée à rectifier l'exercice 2010 et qu'en conséquence, le moyen tiré de l'erreur commise par le vérificateur sur la détermination du premier exercice non prescrit devait être accueilli ;

3. Considérant que l'administration a constaté au cours des opérations de contrôle qu'une dette d'un montant de 498 899 euros avait été maintenue au passif du bilan de la société alors que cette créance de la société Afflelou sur la SARL vérifiée avait été abandonnée en vertu d'une convention signée entre les deux parties le 16 juillet 2007 ; que l'administration a regardé cette somme de 498 899 euros comme un passif non justifié qu'elle a réintégré aux résultats de l'exercice clos le 31 décembre 2010 ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. " ; qu'à ceux de l'article L. 189 du même livre : " la prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification. Toutes les notifications régulièrement faites dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire interrompent donc la prescription... " ; qu'il résulte de ce qui précède que seule la notification d'une proposition de rectification permet d'interrompre la prescription qui n'est acquise, pour le contribuable, que le 1er janvier de la quatrième année qui suit celle au titre de laquelle l'impôt est dû ; que la date d'achèvement sur place des opérations de contrôle reste sans incidence sur la prescription ;

5. Considérant qu'en l'espèce, l'administration a notifié le 13 février 2013 à la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie une proposition de rectification ; qu'à cette date, l'année 2009 était prescrite depuis le 1er janvier 2013 ; que, dès lors, le 1er exercice non prescrit était l'exercice clos le 31 décembre 2010 ; que la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction fiscale référencée 4 A-10-10-06 du 29 juin 2006, dont les énonciations ne donnent pas sur ce point, une interprétation différente de celle faite par la loi ; qu'ainsi, c'est à tort que les premiers juges ont fait droit au moyen tiré de l'erreur sur l'exercice de rattachement de la plus-value pour décharger la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulon a déchargé la société requérante de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2010, sans qu'il soit besoin de statuer sur la motivation du jugement ;

7. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie tant en première instance qu'en appel ;

8. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient la société, l'administration n'avait aucune obligation légale de lui adresser la proposition de rectification avant le 31 décembre 2012, soit avant la fin de l'année qui a vu le début des opérations de contrôle ; qu'en revanche, l'absence de notification d'une proposition de rectification avant le 31 décembre 2012 a eu pour effet, ainsi qu'il a été déjà dit au point 5, d'empêcher le droit de reprise de l'administration de s'étendre à l'année 2009 qui se trouvait ainsi prescrite à la date de réception de la proposition de rectification le 13 février 2013 ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) " ; qu'aux termes du 4 bis du même article 38 du code général des impôts issu du I de l'article 43 de la loi de finances rectificative pour 2004 susvisée : " Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. / Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit... " ;

10. Considérant que l'erreur comptable est née de l'abandon de créance consenti par la société Afflelou à la suite de la signature d'un protocole d'accord le 16 juillet 2007, soit moins de sept ans avant le premier exercice non prescrit, soit en l'espèce l'exercice clos le 31 décembre 2010 ; que, dès lors, la société requérante ne peut se prévaloir de l'exception à la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit, prévue par l'article 38-4 bis du code général des impôts, en faveur des erreurs ou omissions commises par le contribuable plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit ;

11. Considérant, en troisième lieu, que si la société requérante soutient que l'abandon de créance de société Afflelou suite à la signature d'un protocole d'accord le 16 juillet 2007 constituait un profit exceptionnel imposable au titre de l'année 2007, il est constant toutefois qu'elle s'est abstenue de comptabiliser un tel profit exceptionnel au cours de l'exercice 2007 et a maintenu cette créance au bilan de clôture de l'exercice 2007 ; que, dès lors, l'administration était fondée à rapporter cette dette aux résultats de l'exercice 2010, premier exercice non prescrit ;

12. Considérant, en dernier lieu, que la circonstance que l'erreur comptable ne serait pas délibérée mais due à une erreur de rattachement des créances, dont la responsabilité incomberait au comptable de la société est sans incidence dès lors qu'un contribuable ne saurait utilement invoquer l'erreur commise par un comptable pour faire échec aux conséquences d'une rectification proposée par l'administration fiscale ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a accordé à la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010 ; qu'il y a lieu d'annuler le jugement et de remettre à la charge de la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés établie au titre de l'année 2010 et les pénalités correspondantes ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1402820 du 18 août 2016 du tribunal administratif de Toulon est annulé.

Article 2 : La cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie a été assujettie au titre de l'année 2010 et les pénalités correspondantes sont remises à sa charge.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à la SARL Société nationale d'optique et de lunetterie Jourdan et compagnie

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-Mer.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2018, où siégeaient :

- Mme Paix, président assesseur, président de la formation de jugement par intérim,

- M. Haïli, premier conseiller,

- M. Sauveplane, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 mars 2018.

2

N° 16MA04681


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA04681
Date de la décision : 22/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Mathieu SAUVEPLANE
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : OULMI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-03-22;16ma04681 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award