Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Delta recyclage a demandé au tribunal administratif de Marseille, à titre principal, d'annuler le titre exécutoire d'un montant de 41 550 euros émis à son encontre le 13 août 2013 par le président de la communauté d'agglomération Salon-Berre-Durance, et à titre subsidiaire, de ramener le montant des pénalités de retard faisant l'objet de ce titre à une somme symbolique.
Par un jugement n° 1306397 du 24 janvier 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 15 mars 2017, la société Delta recyclage, représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 24 janvier 2017 ;
2°) d'annuler le titre exécutoire n° 000231 émis le 13 août 2013 par le président de la communauté d'agglomération Salon-Berre-Durance pour une somme de 41 550 euros toutes taxes comprises ;
3°) de mettre à la charge de la métropole Aix Marseille Provence, venant aux droits de la communauté d'agglomération, une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement a omis de se prononcer sur l'installation, par le pouvoir adjudicateur, de nouvelles colonnes ;
- le pouvoir adjudicateur avait renoncé à la transmission de l'intégralité des informations prévues par le cahier des clauses techniques particulières ainsi qu'au versement de pénalités ;
- le pouvoir adjudicateur a reçu les pièces requises ;
- le montant des pénalités appliqué est disproportionné et doit être minoré dès lors que moins de 8 % des colonnes n'ont pas été géolocalisées et qu'aucune réclamation préalable et identification des colonnes litigieuses n'a été faite.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2017, la métropole Aix-Marseille-Provence, venant aux droits de la communauté d'agglomération " Salon-Etang de Berre-Durance " dite " Agglopole Provence ", représentée par Me B... conclut au rejet de la requête, et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la société Delta recyclage au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la société requérante ne lui a pas communiqué, en méconnaissance de l'article 4.1.2 du cahier des clauses techniques particulières, un fichier informatique reprenant l'identification des colonnes et leur géolocalisation, et la communauté n'a jamais renoncé à leur transmission ;
- le courrier du 1er février 2010 ne comportait pas les tableaux GPS joints produits devant la juridiction administrative et la pièce 5 produite doit être écarté des débats ;
- le pouvoir adjudicateur n'a jamais renoncé à l'application des pénalités, qui ne sont pas disproportionnées ;
- le jugement n'est pas entaché d'une omission à statuer.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E... Steinmetz-Schies, président assesseur,
- les conclusions de M. A... Thiele, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant la métropole Aix-Marseille-Provence.
1. Considérant que par un marché public conclu le 29 septembre 2008, la communauté d'agglomération Salon-Berre-Durance a confié à la société Delta recyclage la collecte et le tri des matériaux recyclables sur son territoire ; qu'à la suite de plusieurs demandes exigeant du titulaire du marché la transmission des coordonnées de géolocalisation des colonnes d'apport volontaires recueillant les déchets ménagers recyclables, le président de la communauté d'agglomération Salon-Berre-Durance, aux droits de laquelle vient la métropole Aix-Marseille-Provence, a émis à l'encontre de la société Delta recyclage un titre exécutoire d'un montant de 41 550 euros en vue de recouvrer les pénalités de retard destinées à sanctionner le défaut de production de ces données ; que la société Delta recyclage relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation du titre exécutoire et de modération du montant des pénalités ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'il ressort des termes mêmes du jugement contesté que le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments soulevés par la société Delta recyclage au soutien de ses moyens, a nécessairement répondu à l'argument de cette société, tiré de ce que le motif réel de la réclamation de la communauté tenait à l'existence d'un contentieux concernant la construction de nouvelles colonnes par le pouvoir adjudicateur alors que cette tâche lui était contractuellement dévolue, en citant le jugement rendu par le tribunal le même jour portant sur cet autre contentieux et en jugeant que la société n'était pas fondée à contester ni l'application de pénalités, ni le mode de calcul ; qu'il s'ensuit que le jugement attaqué n'est entaché d'aucune omission et est, par suite, régulier ;
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Considérant que les stipulations de l'article 4.1.2 du cahier des clauses techniques particulières du marché en litige imposent au titulaire du marché, au titre des obligations relatives à la pesée embarquée des déchets, à l'identification des colonnes d'apport volontaire et de leur géolocalisation, de fournir au pouvoir adjudicataire " au plus tard six mois après le début des prestations, un fichier informatique reprenant a minima, en fonction de son code, les références de chaque point d'apport volontaire (les candidats communiqueront un document descriptif des données et de leur mode d'acquisition (méta-données). Caractéristiques attendues de fichiers : / formats : shapefile, ou géodatabase. Système de projection : Lambert zone 3), le type de colonnes présentes (volume, type de colonne et type de déchet). Par la suite, le titulaire transmettra semestriellement la mise à jour de ce fichier au maître d'ouvrage. / Les données (coordonnées géographiques et horaires associés) seront récupérées par un dispositif d'informatique embarquée et seront transmises à la communauté d'agglomération par l'intermédiaire d'un système agréé par la collectivité " ;
4. Considérant, en premier lieu, que la société Delta recyclage soutient qu'en lui accordant des délais successifs de report, la communauté d'agglomération a renoncé à lui appliquer les pénalités de retard et qu'un accord contractuel des parties, intervenu lors d'une réunion, ainsi que l'atteste un compte-rendu de réunion du 28 octobre 2008, a substitué à la production du fichier informatique la simple production d'un relevé de positions des colonnes d'apport selon le système de coordonnées GPS ; que toutefois, ce compte-rendu se borne à indiquer que la société effectuera un relevé GPS de l'ensemble des points d'apport volontaire " afin que dès le premier jour de prestation les chauffeurs aient une tournée définie dans leur GPS " ; que, si par un courrier du 21 juin 2013, le président de la communauté reconnaît que la société a transmis des relevés de coordonnées GPS pour une majorité des points d'apport volontaire, il souligne néanmoins que l'établissement n'a " disposé à aucun moment depuis le début du marché et a fortiori dans le délai imparti, de l'intégralité des éléments de référencement GPS prescrits à l'article 4.1.2 du CCTP " ; que par des courriers des 8 juillet 2010, 2 août 2010, 25 janvier 2011, 21 juin 2013 et 17 juillet 2013, la communauté a reproché à la société requérante l'absence de transmission des données en cause, a exigé d'elle leur production dans les plus brefs délais, et a, dans quatre de ces cinq courriers, menacé de lui infliger des pénalités ; que par suite, il ne résulte ni de ces pièces, ni d'aucune autre émanant de l'administration que celle-ci ait accepté de renoncer à la transmission par le titulaire du marché de l'intégralité des informations prévues par les stipulations précitées du cahier des clauses techniques particulières selon les modalités de présentation et le format de données qu'elles imposaient, ni qu'elle ait renoncé à lui appliquer les pénalités prévues au marché ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que les pièces fournies par la société Delta recyclage dans son message électronique du 1er février 2010 ne constituent, ni par leur contenu, ni par leur format, les données informatiques exigées par les stipulations précitées du cahier des clauses techniques particulières ; qu'en outre, dès le 2 février 2010, en réponse à ce message, la communauté d'agglomération a demandé la communication des données exigées ; qu'il est ainsi constant que la société Delta recyclage n'a jamais transmis le fichier informatique exigé, non plus les mises à jour semestrielles prévues en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 4.1.2 du cahier des clauses techniques particulières du marché litigieux ;
6. Considérant, en troisième lieu, que la pénalité P8 prévue à l'article 8 du cahier des clauses administratives particulières du marché, appliquée en l'espèce, sanctionne le " non-respect d'un délai précisé dans le CCTP (par jour de retard) - applicable notamment pour les délais contractuels de remise des rapports périodiques d'activité " ; qu'il résulte de l'instruction que les prestations ont commencé le 2 janvier 2009 et que les données de géolocalisation des colonnes étaient dues six mois après ; qu'ainsi la pénalité était due à compter du 2 juillet 2009 ;
7. Considérant d'une part, qu'il résulte de l'instruction que par un premier courrier du 21 juin 2010, la communauté d'agglomération a mis en demeure la société de fournir les coordonnées de géolocalisation des colonnes sous peine d'application des pénalités de retard ; que les premières coordonnées ont été fournies de façon incomplète, et après relances, le 8 mars 2013 ; qu'ainsi, la société requérante ne peut soutenir que la communauté ne lui a jamais demandé de remplir ses obligations contractuelles ;
8. Considérant d'autre part, qu'à la date du 17 juillet 2013 à laquelle l'administration a arrêté le décompte des pénalités, les données dont la production est exigée par le marché n'avaient pas été transmises dans leur intégralité à l'administration ; qu'il en résulte que la société n'est pas fondée à soutenir qu'en lui infligeant la pénalité journalière à compter du 25 mars 2011, alors qu'elle aurait pu la lui infliger dès le 2 juillet 2009, l'administration ait fait une inexacte application de ces stipulations contractuelles ;
9. Considérant enfin, qu'il est loisible au juge administratif, saisi de conclusions en ce sens, de modérer ou d'augmenter les pénalités de retard résultant du contrat, par application des principes dont s'inspire l'article 1231-6 du code civil, si ces pénalités atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire eu égard au montant du marché ;
10. Considérant que la société Delta recyclage soutient que le montant des pénalités est disproportionné et doit être ramené à une somme symbolique ; que toutefois, cette seule affirmation n'est pas de nature à faire regarder le montant des pénalités comme disproportionné dès lors que celui-ci ne représente que 0,52 % du montant total du marché ; qu'ainsi la pénalité infligée ne saurait être regardée comme manifestement excessive ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que la société Delta recyclage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la métropole Aix-Marseille-Provence qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Delta recyclage demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Delta recyclage une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la métropole Aix-Marseille-Provence et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société Delta recyclage est rejetée.
Article 2 : La société Delta recyclage versera à la métropole Aix-Marseille-Provence une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Delta recyclage et à la métropole Aix-Marseille-Provence.
Délibéré après l'audience du 29 janvier 2018, où siégeaient :
- Mme Isabelle Carthé Mazères, présidente,
- Mme E... Steinmetz-Schies, président assesseur,
- M. Allan Gautron, premier conseiller.
Lu en audience publique le 12 février 2018.
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N° 17MA01022