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08/02/2018 | FRANCE | N°17MA00580

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 08 février 2018, 17MA00580


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M B...C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1609434 du 9 janvier 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure suivie devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 février 2017, M

. C..., représenté par Me A... Le Comte, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 janvi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M B...C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1609434 du 9 janvier 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure suivie devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 février 2017, M. C..., représenté par Me A... Le Comte, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 janvier 2017 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2016 du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) d'ordonner au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir.

Il soutient que :

- la compétence de l'auteur de l'arrêté litigieux n'est pas établie ;

- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;

- les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article L. 313-14 du même code et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

- l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant a été méconnu ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'incompétence et méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 août 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête de M. C....

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 24 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Paix.

1. Considérant que M. C..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 9 janvier 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 novembre 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a enjoint de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

En ce qui concerne la légalité externe de la décision :

2. Considérant, en premier lieu, que M. Assouline, secrétaire administratif de préfecture, chef de la section éloignement au bureau de l'éloignement, du contentieux et de l'asile de la préfecture des Bouches-du-Rhône, bénéficiait d'une délégation de signature par arrêté du 20 septembre 2016, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture 13-2016-223 du 22 septembre 2016 pour l'ensemble des attributions de son chef de bureau, M. D..., dans le cadre de la délégation consentie à l'article 1er à M. E..., directeur de la direction des étrangers et de la nationalité ; que le moyen tiré par M. C... de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté lui enjoignant de quitter le territoire manque en fait ;

3. Considérant, en second lieu, que l'arrêté du 18 novembre 2016 expose les circonstances de fait relatives à l'entrée en France de MC..., à sa situation familiale, ainsi que les textes qui lui sont applicables ; qu'il n'est pas stéréotypé ; que, par suite, le moyen tiré par M. C... de l'insuffisance de motivation de cet arrêté a été à bon droit écarté par le premier juge au point 3 de son jugement ;

En ce qui concerne la légalité interne de la décision :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant que M. C... est entré en France selon ses dires le 21 novembre 2013 à l'âge de vingt-sept ans sous couvert d'un visa de court séjour valable jusqu'au 30 décembre 2013, accompagné de son épouse, âgée de vingt et un ans ; qu'il ne s'est jamais manifesté en préfecture afin de régulariser sa situation ; qu'interpellé le 18 novembre 2016, après trois années de présence sur le territoire, il a déclaré exercer occasionnellement la profession de boulanger ; que son épouse, également de nationalité marocaine, est en situation irrégulière ; que si M. C... soutient ne plus avoir d'attaches dans son pays d'origine, il ne l'établit nullement alors qu'il y a vécu jusqu'à l'âge de vingt-sept ans ; que, par suite, eu égard au jeune âge des enfants de M. C..., nés en 2014 et 2016 et à la possibilité pour la cellule familiale de se reconstituer au Maroc, l'obligation de quitter le territoire n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. C... à sa vie privée et familiale ; que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

7. Considérant que M. C... n'établit pas que des considérations humanitaires, ou des motifs exceptionnels justifieraient son admission au séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit, par suite, être écarté ; que, compte tenu de ce qui a été dit au point 5, le préfet des Bouches-du-Rhône, en ne procédant pas à la régularisation de la situation de M. C..., n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ;

9. Considérant que M. C..., comme son épouse, sont en situation irrégulière sur le territoire français ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 5, aucune circonstance ne s'oppose à ce que la vie familiale se poursuive au Maroc, pays d'origine de M. C... ; que, par suite, les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant n'ont pas été méconnues ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

10. Considérant, en premier lieu, que pour les mêmes raisons que celles exposées au point 2, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision fixant le pays de renvoi doit être écarté ;

11. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

13 Considérant que M. C..., qui indique que son mariage avec son épouse aurait été contracté contre l'assentiment des familles, ne produit aucun élément permettant d'établir la réalité des risques qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, par suite, être écarté ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Me A... Le Comte et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2018, où siégeaient :

- M. Bédier, président,

- Mme Paix, président assesseur,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 février 2018.

N° 17MA00580 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00580
Date de la décision : 08/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : AUBRY LE COMTE BOUKERBOUT

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-02-08;17ma00580 ?
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