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19/10/2017 | FRANCE | N°17MA02358

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 19 octobre 2017, 17MA02358


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 2 janvier 2017 par lequel le préfet du Var lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1700310 du 12 mai 2017, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du préfet du Var du 2 janvier 2017.

Procédure devant la Cour :

Par une requête,

enregistrée le 1er juin 2017, le préfet du Var demande à la Cour d'annuler ce jugement du tribunal ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 2 janvier 2017 par lequel le préfet du Var lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1700310 du 12 mai 2017, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du préfet du Var du 2 janvier 2017.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2017, le préfet du Var demande à la Cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 12 mai 2017.

Il soutient que, compte tenu du caractère récent tant de la présence en France de Mme D... que de son mariage, son arrêté n'a pas porté à la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 août 2017, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête du préfet du Var ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable car elle vise un arrêté " en date du 31 octobre 2016 " inexistant et donc inopposable ;

- les moyens soulevés par le préfet du Var ne sont pas fondés.

Un mémoire a été présenté le 21 septembre 2017 par le préfet du Var.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli,

- et les observations de Me B..., représentant Mme D....

1. Considérant que Mme D..., ressortissante algérienne née en 1988, a sollicité le 9 mai 2016 la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement des stipulations du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que, par un arrêté du 2 janvier 2017, le préfet du Var a opposé un refus à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que le préfet du Var relève appel du jugement du 12 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé son arrêté du 2 janvier 2017 ;

Sur la recevabilité de l'appel du préfet du Var :

2. Considérant que la circonstance que la phrase concluant la requête du préfet du Var vise un " arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire du 31 octobre 2016 " résulte d'une simple erreur de plume qui n'a pu induire en erreur Mme D... au sujet de l'objet de la requête dont les autres mentions font une référence exacte à l'arrêté du 2 janvier 2017, de surcroît versé en annexe à cette requête ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par Mme D... à la requête du préfet ne peut qu'être écartée ;

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant que Mme D... ne justifie sa présence en France que depuis juin 2014 et n'a épousé un ressortissant français que le 10 janvier 2015 ; que, même si sa mère et sa soeur résident en France de manière régulière, compte tenu de la brièveté et des conditions irrégulières de son séjour en France et du caractère récent de son mariage, alors que la communauté de vie avec M. D... antérieurement au mariage n'est pas établie et que l'intéressée a vécu dans son pays d'origine au moins jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans, l'arrêté du 2 janvier 2017 n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet du Var est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulon s'est fondé sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour prononcer l'annulation de sa décision ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme D... tant en première instance qu'en appel ;

6. Considérant, en premier lieu, que, par arrêté préfectoral n° 2016/77/SGPJI du 19 septembre 2016, régulièrement publié le même jour au recueil n° 58 spécial des actes administratifs de la préfecture du Var, Mme Houspic, secrétaire générale de la préfecture, a reçu délégation " à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances, documents, relevant des attributions de l'Etat dans le département du Var (...) " ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 2 janvier 2017 doit être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que la décision comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles le préfet s'est fondé et qui permet à Mme D... de les discuter et au juge de les contrôler ; que le préfet n'avait pas à expliciter les éléments d'appréciation l'ayant conduit à ne pas tenir compte de la convocation à la signature d'un contrat d'intégration républicaine ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait insuffisamment motivé doit être écarté ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) 2) Au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français(...) " :

9. Considérant que Mme D..., qui n'établit ni même n'allègue être entrée régulièrement en France, n'est pas fondée à se prévaloir des stipulations du 2) de cet article ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : a) au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2), et au dernier alinéa de ce même article (...) " ;

11. Considérant que Mme D..., qui n'est pas en situation régulière, ne peut utilement se prévaloir des stipulations du a) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien ;

12. Considérant, enfin, que compte tenu des circonstances du séjour et de la situation familiale et personnelle de Mme D..., le préfet du Var ne peut être regardé comme ayant commis une erreur de fait ou une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Var est fondé à demander l'annulation du jugement du 12 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé son arrêté du 2 janvier 2017 ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de Mme D... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 12 mai 2017 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Toulon et ses conclusions d'appel tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Mme A... C... épouse D....

Copie en sera adressée préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2017, où siégeaient :

- M. Bédier, président,

- Mme Paix, président assesseur,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique le 19 octobre 2017.

5

N° 17MA02358


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA02358
Date de la décision : 19/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : MACONE

Origine de la décision
Date de l'import : 31/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-10-19;17ma02358 ?
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