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12/10/2017 | FRANCE | N°17MA00542

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 12 octobre 2017, 17MA00542


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2016, par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n° 1605435 du 3 janvier 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requêt

e enregistrée le 6 février 2017, M. A... représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2016, par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n° 1605435 du 3 janvier 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 février 2017, M. A... représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 3 janvier 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à son conseil qui renonce dans ce cas à percevoir la part contributive de l'Etat due au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la décision contestée qui mentionne qu'il a été convoqué devant le Procureur pour port d'arme à munition est entachée d'erreur de fait ;

- il faut tenir compte pour apprécier son droit au séjour en application de l'article 20 du Traité fondateur de l'Union européenne (TFUE) du fait qu'il a reconnu son deuxième enfant de nationalité lituanienne après la décision contestée ; il contribue à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants de nationalité lituanienne depuis leur naissance ;

- le refus de séjour méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la production de documents falsifiés à l'appui d'une demande de titre de séjour n'est pas à elle seule constitutive d'une menace pour l'ordre public ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est contradictoire avec la décision de contrôle judiciaire avec interdiction de quitter le territoire dont il a fait l'objet ;

- la décision fixant l'Ukraine comme pays de destination de la mesure d'éloignement méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 24 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de procédure civile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Gougot a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que, par arrêté du 20 septembre 2016, le préfet des Pyrénées-Orientales a rejeté la demande de titre de séjour que lui avait présentée le 3 décembre 2015, M. A..., ressortissant ukrainien, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que M. A... interjette appel du jugement du 3 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 2. Les citoyens de l'Union jouissent des droits et sont soumis aux devoirs prévus par les traités. Ils ont, entre autres:/ a) le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres ; (...) Ces droits s'exercent dans les conditions et limites définies par les traités et par les mesures adoptées en application de ceux-ci. (...) " ; que l'article 7 de la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 prévoit, au titre de ces limitations : " 1. Tout citoyen de l'Union a le droit de séjourner sur le territoire d'un autre État membre pour une durée de plus de trois mois : / (...) b) s'il dispose, pour lui et pour les membres de sa famille, de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale de l'État membre d'accueil au cours de son séjour, et d'une assurance maladie complète dans l'État membre d'accueil (...) / 2. Le droit de séjour prévu au paragraphe 1 s'étend aux membres de la famille n'ayant pas la nationalité d'un État membre lorsqu'ils accompagnent ou rejoignent dans l'État membre d'accueil le citoyen de l'Union, pour autant que ce dernier satisfasse aux conditions énoncées au paragraphe 1, points a), b) ou c) (...) " ; que ces dispositions combinées confèrent au ressortissant mineur d'un Etat membre, en sa qualité de citoyen de l'Union, ainsi que, par voie de conséquence, au ressortissant d'un Etat tiers, parent de ce mineur et qui en assume la charge, un droit de séjour dans l'Etat membre d'accueil à la double condition que cet enfant soit couvert par une assurance maladie appropriée et que le parent qui en assume la charge dispose de ressources suffisantes ;

3. Considérant, d'une part, que M. A... se déclare père de deux enfants de nationalité lituanienne, nés en France en 2009 et 2012 à l'éducation desquels il participe " dans la mesure de son possible " depuis sa séparation d'avec leur mère ; qu'alors même que le requérant justifie avoir reconnu son second enfant après la décision attaquée, il ne justifie cependant pas en assumer la charge effective par la seule production de quelques factures d'achat de produits nécessaires aux enfants au titre des années 2011 à 2016 ; que, d'autre part, en se bornant à se prévaloir d'une promesse d'embauche pour un emploi dans une entreprise de bâtiment dont le gérant est son beau-frère, M. A... ne justifie pas disposer de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas méconnu les dispositions précitées en refusant à M. A... la délivrance d'un titre de séjour en qualité de membre de la famille d'un citoyen de l'Union ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne à droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ; que M. A... déclare être entré en France au mois de décembre 2003 et s'y être maintenu depuis cette date ; que, toutefois, les documents produits attestant de sa présence en France à compter de 2004 ne permettent pas d'établir la réalité d'un séjour habituel sur l'ensemble de la période revendiquée par le requérant dès lors que les diverses attestations, émanant pour la plupart de proches, ne présentent pas de caractère suffisamment probant, à l'exception d'une attestation de l'association " Carcharias Boxing " qui indique qu'il était licencié au club pour la saison 2004-2005 ; que le requérant ne conteste pas qu'il est séparé de sa compagne ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, il ne justifie pas avoir la charge effective de ses deux enfants dont le second a au demeurant été reconnu après la décision contestée ; que s'il se prévaut de la présence sur le territoire français de ses enfants et de son unique soeur et indique n'avoir plus d'attaches en Ukraine, ses parents y étant décédés, ces éléments ne sont pas suffisants à établir qu'il a ancré sa vie privée et familiale en France ; que, par ailleurs, la seule production de deux promesses d'embauche établies les 2 novembre 2015 et 2 novembre 2016 et d'articles de presse non datés relatant sa participation aux finales des championnats régionaux de boxe anglaise ne sont pas de nature à démontrer son insertion socio-économique en France, alors notamment qu'il se déclare comme étant hébergé chez sa soeur ; que, par suite, la décision du préfet des Pyrénées-Orientales refusant de l'admettre au séjour n'a pas porté au droit de l'intéressé, au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue duquel elle a été prise ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces dernières stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 3, le requérant ne justifie pas assumer la charge effective de ses deux enfants de nationalité lituanienne ; que s'il soutient entretenir des liens affectifs avec eux, la décision portant refus de titre de séjour n'a pas pour objet de le séparer de ses enfants alors notamment que le requérant ne donne pas d'élément sur les conditions de séjour en France de la mère de ses deux enfants dont il est séparé ; que, par suite, le moyen tiré de la violation par l'arrêté contesté des stipulations précitées doit être écarté ;

6. Considérant que la décision contestée mentionne par erreur qu'il a été convoqué devant le procureur pour port d'arme à munition alors qu'il ressort en réalité des pièces du dossier qu'il a été convoqué en justice pour le 5 avril 2016 pour port d'une arme ou munition, en l'espèce un couteau à cran ; que l'usage de faux documents administratifs n'est pas à lui seul, de nature à établir que sa présence sur le territoire français créait une menace pour l'ordre public ; que toutefois, il ressort tant de la décision contestée que des écritures en défense de première instance du préfet des Pyrénées-Orientales que le motif tiré de l'atteinte à l'ordre public est surabondant et que le préfet des Pyrénées-Orientales aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur le motif tiré de l'absence de droit au séjour, alors que le requérant ne justifie pas que ses deux enfants de nationalité lituanienne qui se trouvent sur le territoire national avec leur mère soient à sa charge ainsi qu'il a été dit au point 3 ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions du requérant tendant à l'annulation du refus de séjour doivent être rejetées ;

Sur la mesure d'éloignement :

8. Considérant que les moyens selon lesquels, d'une part, la mesure d'éloignement serait contradictoire avec la décision de contrôle judiciaire avec interdiction de quitter le territoire dont il a fait l'objet le 28 juillet 2015 et, d'autre part, la décision fixant le pays de destination de l'obligation de quitter le territoire méconnaitrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés, par adoption des motifs des premiers juges qui n'appellent pas de précision en appel ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2017, où siégeaient :

- M. Poujade, président de chambre,

- Mme Josset, présidente assesseure,

- Mme Gougot, première conseillère.

Lu en audience publique, le 12 octobre 2017.

2

N° 17MA00542

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00542
Date de la décision : 12/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: M. GONNEAU
Avocat(s) : SUMMERFIELD TARI

Origine de la décision
Date de l'import : 31/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-10-12;17ma00542 ?
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